Certains vous diront que varier les plaisirs en termes de Metal extrême est à peu près aussi compliqué que de trouver une alternative viable au consumérisme, sans se passer des banques. S’il est certain que le créneau est vaste, il est aussi encombré qu’une habitation à loyer modérée en Chine urbaine, et visiblement envahi d’artistes repoussant certaines limites, pour s’en fixer d’autres. A ce point, on pourrait arguer de son contraire, et citer les DEATHSPELL OMEGA, PORTAL, PRIMITIVE MAN, GNAW THEIR TONGUES, ou même ALUK TODOLO, COMITY, HYPNO5E, et pas mal d’autres qui font fi de barrières invisibles pour tracer leur chemin sans se demander s’il est le bon. Ainsi, le parcours des CHAOS ECHOES est particulier en soi. Le groupe des frères Kalevi/Ilmar Uibo et Stefan Thanneur a commencé sa carrière en toute non discrétion, en publiant un premier EP qui en disait long sur leurs intentions, sans forcément révéler grand-chose. Tone Of Things To Come, c’était un peu leur Shape Of Jazz to Come à eux, sauf qu’en lieu et place d’un Free-Jazz somme toute encore assez timide, ils nous bombardaient d’un concept de Death psychédélisque qui ne ressemblait à rien d’autre existant. Mais comme les musiciens n’étaient pas du genre à se laisser amadouer dès leurs débuts, ils ont ensuite enchaîné sur une affaire beaucoup plus complexe. C’est ainsi que naquit Transient, premier longue durée qui justement la prônait, et qui pendant une heure nous entraînait sur la piste de la liberté musicale absolue. D’ailleurs, beaucoup n’ont pas forcément compris de quoi il en retournait, certainement peu habitués à entendre un groupe prendre autant de latitude avec un style pourtant étirable à l’infini. Et de là, et face à cette richesse dans la violence, la question inutile se posait d’elle-même. Etait-ce du Death expérimental ? Ou bien une forme très larvée de Black psychédélique ? Connaissant les deux vecteurs, la seconde solution semblait la plus fidèle, mais une fois encore, les mots peinaient à définir une œuvre affranchie de toute contrainte. Et tout en se disant que l’avenir allait se montrer plus clair au niveau des sons à venir, Mouvement débarque, et révolutionne l’optique du label US Nuclear War Now, qui lui-même se demande si ce trio déstabilisateur ne va pas foutre la merde dans son écurie bien rangée…
Car au-delà de l’unicité de ce trio qui ne ressemble à aucun autre, c’est l’optique choisie pour offrir une transition entre Transient et Mouvement qui choque. A peu près à moitié aussi long que son aîné, ce second longue-durée est plus monolithique, mais pas forcément plus facile d’accès, malgré ce qu’il laisse à penser. Nous sommes assez éloigné des expérimentations farouches d’il y a quelques années, sans que l’instrumental n’ait adopté une forme plus approchable et plus modelable. En optant pour six morceaux à peine, et une demi-heure de musique, les trois musiciens ont privilégié la concision, tout en gardant sous le coude cette folie nous contraignant à inventer des mots pour les situer. Si les noms de PORTAL, ALUK TOLODO ou COMITY peuvent aider à envisager la chose, ils ne sont qu’une aide de fond, tant la musique développée ici se place aux antipodes de toute simplicité. Appréhendé comme un bloc, ce nouveau chapitre s’avale d’un trait, pour en savourer la violence intrinsèque, et encaisser le coup de rythmiques qui une fois de plus ne font preuve d’aucune complaisance. Mais ne vous y trompez pas, les riffs sont toujours aussi barrés, et l’improvisation de surface se pose en anathème principal d’un disque qui ne conçoit l’extrême que comme moyen d’expression pour parvenir à ses fins. Ainsi, et si Transient pouvait encore se découper en pistes logiques et mouvantes, Mouvement le manipule au travers d’un statisme d’apparat pour aller encore plus loin. Et même avec un guitariste perdu dans l’entre-deux, l’espace sonore est occupé avec autant de mainmise et de fermeté par les trois membres restant. Qui ne font aucun sacrifice pour que le fan lambda puisse s’approcher d’eux d’un peu trop près.
Instrumental, violent, psychédélique, ce nouvel album l’est, et plus encore. Il forme une symphonie ininterrompue à l’outrance, mais joue aussi le jeu de la diversité dans l’unicité. Il frappe, erre, se bloque, semble s’échapper, mais reste bien là, malgré quelques plans répétés à l’envi, qui confèrent à l’ensemble cette sensation de linéarité qui pourtant n’entraîne pas la redondance. Exercice rythmique autant que non-mélodique, il laisse ses six morceaux évoluer en toute liberté, se concentrant la plupart du temps sur des à-coups rythmiques prenant de face, mais aussi sur des riffs arrivant à rebours. Sans totalement emprunter les chemins de traverse biscornus du Free-Jazz, il invente le Free-Death, sans être Death pour autant. Les efforts ne sont jamais relâchés, et il en appelle au ressenti le plus viscéral, et sur une envie d’aller voir ailleurs si l’imagination n’est pas plus probante. Et celle qui a permis aux CHAOS ECHOES d’accoucher d’une telle œuvre semble sans limites, tant on sent qu’ils sont capables d’aller encore plus loin, ou, plus intéressant, de changer complètement de direction pour nous perdre en route, et mieux nous retrouver. D’ailleurs, les envies de démonstration que Transient étalait avec une régularité remarquable ont complètement disparu, comme si le groupe avait déjà prouvé de quoi il était capable, et qu’il se concentrait maintenant sur ce pour quoi il est fait. Ce qui ne veut absolument pas dire que les trois années séparant les deux travaux ont transfiguré le groupe, mais simplement qu’elles lui ont permis de se trouver, et de se détacher de toute obligation contractuelle ou non.
D’aucuns se diraient que trente minutes instrumentales de brutalité orchestrale ont de quoi rebuter, et lasser. Et pourtant, une fois atteint « Alas! Here Is The Feebles' Assent, Exalted By Your Mouth Full Of Flies », et remarquant que le voyage est déjà fini, on pense à une torsion du temps qui compresse et fait rentrer trente minutes en cinq. Là est la magie d’un disque presque indivisible, aussi court qu’une minute d’amour, et pourtant riche comme une vie de sentiments. Ces sentiments ne seront sans doute pas partagés par tout le monde, mais ils prouvent de facto que l’extrême est loin d’avoir tout dit. Et tant qu’il restera des groupes comme CHAOS ECHOES pour ne pas en respecter les règles, ses frontières ne sont pas prêtes d’être fixées avec acuité.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09