Tient-on des propos déplacés en affirmant que le Power Metal est un genre qui ne supporte pas la demi-mesure et qui s’accommode très mal d’une approximation de ton ? Je ne pense pas, et ce nouvel album des références brésiliennes d’HIBRIA vient conforter ma pensée. Depuis 1996, ce quintette (Iuri Sanson - chant, Abel Camargo & Renato Osorio - guitares, Ivan Beck - basse et Eduardo Baldo - batterie) s’est ingénié à abonder dans ce sens, proposant des albums toujours plus riches et élaborés, au point d’être devenu une pointure incontestable du style. Après tout, on ne se retrouve pas à jouer sur la scène de festivals aussi importants que le Rock In Rio ou le Loud Park en pratiquant une musique balbutiante aux moyens et à la portée limitée. D’ailleurs, Defying the Rules, leur album de 2004 leur permit alors de tourner comme des fous et de se voir distribués au Japon, en Corée du Sud, en Russie, et il fit partie des meilleures ventes des HMV japonais pendant plus de six semaines consécutives, déclenchant les louanges du magazine respecté Burrn. Avec un tel palmarès à leur actif, les lusophones sentirent alors qu’ils avaient clairement le vent en poupe, et se sentirent pousser des ailes qui les menèrent vers les sommets, atteints lors de la parution du magnifique Silent Revenge en 2013, et de sa suite tout à fait logique Hibria, deux ans plus tard. J’avais abordé leur cas en digressant sur le EP XX, il y a deux ans, qui n’avait servi que de tremplin à une gigantesque tournée, et j’en avais dit le plus grand bien, moi grand réfractaire au genre devant l’éternel. Mais comme je l’affirmais à l’époque, lorsque des instrumentistes mettent tout leur cœur à l’ouvrage, et qu’ils composent de véritables morceaux portés par des riffs pertinents et des mélodies accrocheuses, il n’y a aucune raison de faire la fine bouche et de s’enfermer dans une subjectivité qui n’est pas de mise. Ce qui est immanquablement le cas des HIBRIA, qui une fois encore avec ce Moving Ground raflent la mise et s’imposent comme une des valeurs les plus sûres du créneau, sans changer leur guitare d’épaule.
Osons les jugements à l’emporte-pièce, et affirmons que ce sixième album studio inédit (en soustrayant la version dixième anniversaire de Defying the Rules, éditée en 2014) est un véritable petit joyau de Metal mordant et intelligent, porté aux nues par la grâce et le talent de musiciens qui connaissent leur sujet par cœur. Il est impossible de résister à ces démonstrations de force toutes en séduction, qui transcendent des harmonies vraiment fondantes par un surplus de puissance gonflée à la testostérone, mais bien loin des clichés les plus éculés du genre. On sait les brésiliens très forts au petit jeu du Power Metal futé et biseauté, mais les originaires de Porto Alegre font vraiment partie du haut du sommet du panier, ce que ces dix nouveaux morceaux prouvent avec un panache impressionnant. Rien à jeter sur ce nouvel effort, qui brille de mille feux, et qui bénéficie d’une production soignée aux petits oignons, permettant au combo de faire le lien entre le DREAM THEATER le plus concis et l’ANGRA le plus flamboyant. Ce qui frappe en premier lieu chez eux, c’est ce désir de s’affranchir de toute étiquette trop fermement accolée, pour pouvoir unir dans un même élan Heavy Metal de tradition, Thrash de condition, et Speed symphonique de passion, pour une danse hypnotique sinuant entre les époques pour échapper à la sentence implacable du temps. On peine à vraiment situer chronologiquement les brésiliens, qui pourraient tout autant s’être échappés d’années 80 calibrées, que s’être évadés d’un début de vingt-et-unième siècle connoté. Et en faisant une fois de plus preuve d’une absence totale d’objectivité, je vous mets au défi de trouver la moindre faiblesse dans ces morceaux au lyrisme prononcé, mais à l’emphase maîtrisée, qui osent des couplets incendiaires menant sur le chemin de refrains d’enfer. Mais le paradis est pavé de bonnes intentions, et celles des brésiliens sont de vous faire headbanguer tout en vous laissant chantonner, sans tomber dans la mièvrerie de la facilité. Tâche ardue s’il en est, mais défi remporté avec brio, et la sentence tombe assez vite, Moving Ground s’approche de très près de la perfection, de la façon la plus honnête qui soit.
Il faut dire qu’avec l’entrée en matière la moins discrète qui soit, unissant dans une même euphorie les intro démonstratives de PERIPHERY ou DREAM THEATER (cette basse mes aïeux !) et la force de persuasion Heavy d’un JUDAS PRIEST de légende, les intentions sont clairement affichées, et proches des plus grands accomplissements de VANDEN PLAS et ANGRA à la force décuplée par une cure de Thrash soutenue. Le chant d’Iuri Sanson, toujours aussi puissant et nuancé s’accorde encore une fois à merveille de la furie dont fait preuve le reste du groupe en arrière-plan, à tel point qu’on a parfois le sentiment d’écouter une version Godzilla des LOUDNESS, transcendés par un monde à sauver, mais prenant quand même le temps d’un break des options presque Jazz histoire de ne pas tout brûler. Ce morceau, aussi convaincant qu’héroïque est en fait un révélateur de la tendance 2018 d’un groupe qui injecte toutes ses forces dans la bataille, gagnée d’avance d’ailleurs, et dont la seconde étape se formalise via « A Life For Yourself » temporisant un peu les choses d’un médium directement emprunté aux ACCEPT, PRIMAL FEAR et autres…LOUDNESS justement, validant ainsi les nombreuses accointances qui relient les scènes brésilienne et japonaise. Riff catchy comme un tic Metalcore pour démonstration purement Metal, tâtant même de la radiophonie d’harmonies vocales caressantes, à mi-chemin ente Hard Rock séduisant et Heavy chatoyant. Un hit-single, pour le moins, mais surtout la confirmation que cet album est une épiphanie de savoir-faire.
Et le grand déballage de linge propre continue, de titre en titre, qui pourtant n’ont pas été construits de façon à céder à la facilité. En choisissant de travailler sur la durée, les brésiliens ont pris un risque énorme, celui de verser dans la redondance, écueil qu’ils évitent toujours avec un brio confondant. Ainsi, entre un « The Shapeshifter » clairement Néo-Thrash au chant toujours aussi envoutant, et à la double grosse caisse concassante (et des chœurs purement écrasants) et un « Scream And Shout » qui pourrait presque passer la porte Glam sans avoir recours au make-up, la démonstration tourne à l’écœurement, tant on cherche en vain le petit grain de sable susceptible d’enrayer cette machine si bien huilée. Alors, on accepte l’état de fait, et on savoure les déviations Thrash progressives, aussi ancrées dans les 90’s que dans le nouveau siècle, toujours à la frontière des genres sans oser vraiment les franchir, mais sans non plus tergiverser, et « Sailing Ship » d’insister sur la puissance, « Souls Ain’t For Sale » de pratiquer l’ambivalence d’une émotion portée à ébullition, ou « So Damn Unkind » de trépider d’un Metal sautillant, lardé de soli stridents. Le panel est large, et on se demande bien quelle mouche radioactive a pu piquer le quintette pour oser un tel éventail d’influences sans paraître disparate ou dispersé. Car l’intensité ne faiblit à aucun moment, même si « Safe Shore » semble marquer le pas de ses citations personnelles, qu’un refrain hautement performant vient sauver de la redite. Et lorsque les HIBRIA se lâchent complètement sur l’épique « Heaven », on se dit qu’on est en train de faire face à une incarnation du professionnalisme poussé à son paroxysme, tant les idées s’imbriquent avec logique, et le formalisme du ton ne cède jamais à la passion.
On ne ressort pas d’un album comme Moving Ground totalement indemne. Plus qu’un simple LP, c’est une tornade qui vous laisse complètement décoiffé, l’air hagard, et certain d’avoir assisté à une manifestation de colère de la nature, de celles qui dévastent les côtes et les laissent rasées. Mais surtout, ce nouvel effort des brésiliens risque de devenir à l’avenir une véritable pierre angulaire du genre, jouant la nostalgie tout autant que le réalisme d’une musique qui refuse les conventions pour imposer les siennes. Metal ?
Mais évidemment !
Titres de l'album:
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