Mystery & Mayhem

Forest Field

19/06/2024

Autoproduction

Moi qui aime les créatifs libres, les compositeurs affranchis, les musiciens culottés, je dois admettre être complètement passé à côté de ce collectif international aux qualités évidentes. Il m’aura fallu six albums pour m’intéresser à son cas, ce qui est plus que conséquent, mais je remercie encore le hasard d’avoir mis le bon projet sur ma route.

Fondé, dirigé et emballé par Peter Cox, guitariste de CHINAWHITE, FOREST FIELD est donc une collaboration cosmopolite. Si le guitariste hollandais garde fermement les rênes en main, il partage le travail avec le chanteur américain Phil Vincent et le batteur batave Bart Fleuren. Mais ne vous leurrez pas. Cette union reste très formelle et balisée, puisque tous les morceaux sont composés par la tête pensante. Et l’homme a de l’imagination, des ambitions, et un désir louable : faire tomber les barrières entre les genres pour imposer le sien. Une sorte de Rock progressif dur mais mélodique, qui incorpore des éléments Ambient et zen, ainsi que des inflexions Hard Rock abordables et adorables.

Après cinq longue-durée, Cox sait exactement ce qu’il veut. Mais il semblerait que Mystery & Mayhem soit son bébé le plus équilibré. Si la production est parfois erratique, notamment en ce qui concerne la rythmique, elle sait mettre en avant les thèmes porteurs et les lignes de chant en avant, mais sans empiéter sur le reste de l’instrumentation. Les huit morceaux de cette nouvelle livraison Uber Listen sont tous développés, riches et bien orchestrés, et certains sont même aussi épiques qu’une envolée stellaire de YES ou KING CRIMSON.

Mais on sent assez rapidement que Peter garde une certaine admiration pour PORCUPINE TREE et Steven Wilson. Ce côté futuriste, cette ambiance ouverte et cette volonté de ne pas se cantonner aux structures habituelles sont symptomatiques du petit génie anglais, même si nous sommes encore loin de ses affections électroniques et Synth-Wave.

Néanmoins, Mystery & Mayhem ne se gêne pas pour utiliser des claviers et des sons samplés pour imposer des atmosphères plus confinées et cotonneuses, à l’image d’un film de SF au budget raisonnable. Loin du démonstratif parfois pénible et des idées qui s’étirent en longueur sans réelle raison, FOREST FIELD justifie ses choix par sa qualité de mise en place et d’interprétation, et nous sommes vite attirés par ce monstre placé en milieu de parcours, qui du haut de ses quatorze minutes nous domine méchamment.

« Human Jigsaw » n’est évidemment pas la seule qualité de ce sixième né. Il incarne le sommet de la montagne, le but atteint, le défi relevé, et propose de nombreux thèmes, tous très intelligemment imbriqués. On y sent du SPOCK'S BEARD, et des relents de Progressif des années 80/90, mais surtout, une joie de partager cette passion pour les mélodies les plus séduisantes, et pour les avancées évolutives hypnotiques et obsédantes. Peter nous fait donc voir du pays, et se propose de nous guider à travers les Pays-Bas, de jour comme de nuit, pour en admirer les beautés mais aussi pour s’inquiéter de sa face plus sombre. Ce qui explique ce panel de sensations, allant de la promenade bucolique jusqu’à l’aventure urbaine tardive. Une aventure humaine, partagée, qui parfois dévie vers des paysages dégagés, dont le couchant offre des harmonies Folk de toute beauté (« Slipping Away », gros travail de percussions, avec cette guitare mutine et ludique et ce chant épuré aux chœurs bucoliques).

Il est pourtant très difficile de plaire à tout le monde sans devenir générique et anonyme. Mais FOREST FIELD peut se reposer sur son sens de la variation, allant jusqu’à emprunter aux BEACH BOYS leurs harmonies vocales, pour mieux les fracasser sur un démarrage en trombe (« Calling Me »). Cette constante opposition entre force et nuance est indéniablement le point d’orgue d’un album totalement décomplexé, qui n’utilise le Progressif que comme moyen d’exprimer des émotions.

Pop, Rock, Classique, Ambient, Electronique, les éléments sont disparates, mais très bien intégrés. Comme une mayonnaise parfaite, Mystery & Mayhem est riche mais léger, et dosé au milligramme près. Pourtant, malgré ce professionnalisme, l’album garde toujours sa fraîcheur, comme une relecture des recettes d’IQ en version plus populaire, sans perdre cette touche royale.

Miel pour les oreilles, piment pour l’âme, stimulant pour le corps, Mystery & Mayhem est un chapitre de choix dans la discographie de FOREST FIELD. Beaucoup moins engoncé dans la démonstration que bon nombre de ses pairs, Peter Cox sait lâcher prise et se détendre au son de « The Light », qui s’échappe de l’univers Metal pour suggérer une fascination pour les BEATLES.

« Close Your Eyes », précédant le mastodonte « Human Jigsaw » offre donc un diptyque central très ambitieux, mais même les inserts plus brefs ont leur importance. Comme cet épilogue « Forever », qui semble indiquer une ballade d’au-revoir, tout en imposant un résumé des options dans la plus pure tradition de Neal Morse.

Superbe démonstration de talent et d’humilité pour FOREST FIELD. Ce groupe unique est un genre d’ALAN PARSONS PROJECT plus Metal et plus Rock, aux idées aussi versatiles proposées sans obligation contractuelle. Beaucoup d’influences, de références, de clins d’œil, pour un voyage très agréable, entre visite guidée et après-midi libre.

Beau, et enchanteur. De quoi oublier les heures et les heurts.        

    

Titres de l’album:

01. Rapid Eye Movement

02. This Girl Like Rain

03. Close Your Eyes

04. Human Jigsaw

05. Slipping Away

06. Calling Me

07. The Light

08. Forever


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par mortne2001 le 01/12/2024 à 17:27
90 %    203

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