Fan d’horreur ? Alors tu dois certainement connaître cette fameuse liste des video nasties, telle qu’elle a été établie dans les années 80 en Angleterre. Sinon, je te rafraîchis la mémoire via Wikipedia :

Video nasty (pl. Video nasties) est un terme anglais familier popularisé par l'Association nationale des téléspectateurs et des auditeurs (NVALA) au Royaume-Uni pour désigner un certain nombre de films, généralement des films d'épouvante ou d'exploitation à petit budget, distribués sur cassette vidéo et critiqués pour leur contenu violent par les critiques, les éditorialistes et diverses organisations religieuses au début des années 1980. Pour aider les autorités locales à identifier les films obscènes, le directeur des poursuites publiques a publié une liste de 72 films qui, selon lui, violaient la loi de 1959 sur les publications obscènes (Obscene Publications Act). 

L’Angleterre a toujours été un pays très conservateur, il n’est donc pas étrange que ces films aient été interdits sur le territoire. Violence excessive, sexualité déviante, perversions multiples et autres mises en scène de psychopathes complètement frappés, cette liste de 72 films contenait des pépites que tous les amateurs connaissent par cœur. Je n’en reproduirai pas les noms ici, mais j’en citerai quelques exemples, dont Cannibal Ferox, I Spit On Your Grave, The Driller Killer, Faces of Death, Don’t Go Near The Park, Nightmare in a Damaged Brain, Snuff, et des dizaines d’autres, dont la présence était plus ou moins justifiée. Ce qui a évidemment entraîné une ruée sur les œuvres en question, souvent plus effrayantes conceptuellement que graphiquement. Ainsi, difficile de justifier la citation d’Argento ou de Fulci, leurs films faisant partie du panthéon de l’horreur depuis fort longtemps.

Mais l’équilibre psychologique des petits nenfants étant plus importante que la liberté d’expression, l’Angleterre a banni ces pellicules de ses épaules côtières, au grand dam des amateurs. Aujourd’hui, ces films apparaissent bien sages au vu des horreurs que les infos nous bombardent chaque jour, mais le souvenir de cette époque de restriction et de bien-pensance est incrusté dans la mémoire des vidéophiles qui ont parfois eu recours à des trafics incroyables pour se procurer des VHS sous le manteau.

Pourquoi cet interminable laïus ? Pour vous dire qu’une bande de tarés australiens a décidé de rendre hommage à ces 72 histoires à leur façon. En deux albums, et un mois d’intervalle, les DISINTERESTED HANDJOB et leur nom du meilleur goût ont donc recensé toutes les bandes de cette liste pour en faire des morceaux, offrant ainsi à leur public clairsemé une vue d’ensemble sur le phénomène. Deux tomes de Nasty Volume, I et II, pour soixante-douze « chansons », aussi variées que chamarrées. Je précise au passage, puisque ça a sa petite importance, que ces bargeots sont versés dans le Grind le plus échevelé, ce qui explique le comment du pourquoi de ce tracklisting interminable, décliné en deux versions.

Le résultat ?

Pas vraiment aussi glauque que les histoires qui leur servent de base. Du Grind parfois académique, parfois complètement fou, qui essaie de se montrer à la hauteur de l’entreprise. Avec les morceaux les plus brefs possibles, DISINTERESTED HANDJOB résume tout un pan de l’histoire de l’horreur En Europe, et son bras de fer truqué avec les instances britanniques. S’il est certain que certaines des entrées dans cette liste de l’infamie méritaient amplement leur classement, d’autres restent un mystère, n’étalant pas plus de sévices que la moyenne.

Mais revenons à nos moutons (que les australiens adorent sodomiser), et plus prosaïquement, jugeons de l’intérêt général d’une telle entreprise. Sur le plan créatif, le groupe aurait pu parler de n’importe quoi, ses textes étant évidemment incompréhensibles. Mais comme de larges samples viennent égayer l’écoute de ces deux tomes, on se laisse embarquer dans un voyage dans le passé assez sympathique, même en étant trop jeune pour avoir connu cette époque. Je l’ai connue par procuration, habitant en France, et j’ai vu les 72 films de cette liste. Certains ont laissé une trace durable dans ma mémoire (les mieux construits), d’autres m’ont marqué pour d’autres raisons, mais je doute que ces deux albums aient le même impact sur ma petite personne.

En tant qu’amateur de Grind bien tassé, j’ai apprécié cette démarche, et savouré ce répertoire sans limites qui privilégie les ambiances sur l’effet choc. Pas de jump scare musical donc, mais des allusions au Goregrind, une bestialité de tous les instants, des instruments sous-accordés, et quelques idées fulgurantes qui surnagent dans ce cloaque.

DISINTERESTED HANDJOB nous offre donc une séance d’onanisme blasé, et mise sur la nostalgie pour faire passer son message. Drôle, pour les anglophones, intéressant pour les historiens du cinéma de quartier (mais alors vraiment mal famé), ce diptyque court mais intense peut se déguster en petites tranches, plutôt que d’être avalé d’un trait.

Mais lorsque les instances s’intéresseront de près aux audio nasties, il y a peu de chance que ces Nasty Volume, I et II figurent sur la liste.                                                                                                                                                                                                           

Titres de l’album:

01. La Flemme de reproduire 72 titres

02. Demerdez-vous

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