J’aime les belles histoires, et celles qui roulent en n’amassant pas mousse ou autre chose. J’aime les histoires de fidélité, d’entités qui grossissent ensemble, de parrainage, de pygmalion, j’aime voir les gens marcher main dans les os dans les couloirs d’un abattoir avant d’aller se mélanger la salive et les liquides séminaux dans un cimetière non surveillé. J’aime penser que Nekromantik n’est pas qu’un film, mais l’autobiographie d’un vrai nécrophile qui n’a pu résister à se donner la mort dans un dernier orgasme macabre. J’aime me dire qu’un beau jour, je croiserai un zombi doté d’un chibre de quarante centimètres de long comme dans Necro Files. J’aime penser que Jeffrey Dahmer a vraiment aimé ses amants d’un soir, et que Dennis Nielsen portait de belles cravates. Et j’aime me rendre compte que les danois de BAEST en sont déjà à leur troisième album en à peine cinq ans de carrière.
Troisième album, la charnière, et toujours huilée par le géant Century Media qui depuis le début, croit dur comme fer que son poulain va devenir l’une des têtes de file de la vague old-school Death européenne. Il faut dire qu’avec deux longue-durée de qualité dans la besace, les danois ont de quoi s’y croire, et personne n’a pu oublier les déflagrations sous influence que furent Danse Macabre et Venenum. Des albums hauts en tripes, encore un peu influencés par les grands aînés, mais témoignages authentiques et indéniables d’un potentiel incroyable. Et alors qu’aujourd’hui, le plus gros et dangereux virage s’amorce, les cinq danois n’ont pas changé d’un fémur leur approche, et continuent de pilonner intelligemment.
Quelle joie aussi de constater que le line-up du groupe est toujours aussi stable depuis ses débuts (Mattias Melchiorsen – basse, Sebastian Abildsten – batterie, Lasse Revsbech & Svend Karlsson - guitares, Simon Olsen – chant), et que l’osmose entre les musiciens prend de plus en plus. Pourtant, rien de révolutionnaire ne vient faire briller la surface de ce Necro Sapiens. Rien ne choquera les fans de la première heure, et rien ne chamboulera les néophytes à l’écoute de ces dix morceaux, tous plus professionnels les uns que les autres. Seule la production, profonde, gravissime mais brillante pourra à la rigueur donner l’indication que le groupe prend la bonne direction pour se glisser sur le podium, mais le reste ne fait que respecter les codes classiques établis par les deux premiers albums. Alors, la qualité dans la continuité ? C’est exactement ça, avec une pointe de personnalité en plus pour en donner pour leur argent aux die-hards.
Les mélodies ont donc été accentuées, le chant de Simon encore plus creusé dans les limbes de l’agonie (sa gravité vient maintenant défier le David Vincent le plus enroué), les riffs travaillés pour adopter les contours d’une rythmique polyvalente, et le parfum dégagé par Necro Sapiens à ces relents de putréfaction qu’on retrouvait chez les cadors des années 90, de l’envergure d’IMMOLATION ou MORBID ANGEL. Ce derniers ont dû d’ailleurs avoir l’oreille gauche qui a longuement sifflé au moment de la composition de ce troisième pamphlet, tant leur période Blessed are the Sick/Covenant/Domination est ici survolée avec une application incroyable. On y retrouve cette même pluralité, cet affrontement permanent entre la vélocité et la pesanteur, les même dissonances, les riffs symptomatiques du génie de Trey, et l’ambiance générale, poisseuse, virile, au propos musical terriblement violent et amer. Alors certes, le travail de mimétisme des danois est assez bluffant, et pourtant, pas question de parler ici de plagiat ou de copie un peu trop carbone. La photocopieuse à certes tourné, mais pour trouver les bonnes citations et les recopier dans un langage plus personnel. Je le concède, personne ne niera que l’oppressant « Czar » aurait largement eu sa place dans la discographie du monstre floridien, tout comme « Abbatoir », mais nonobstant cet hommage largement appuyé, la confiance affichée par le quintet lui permet de s’éloigner de la masse des pompeurs les moins inspirés.
Il faut j’en conviens aimer l’optique US du Death de tradition pour se prendre au jeu. Que les puristes de la HM-2 et des studios Sunlight passent donc leur chemin, ils ne trouveront rien pour satisfaire leurs plaisirs scandinaves les plus pervers. Ici, tout sonne comme à l’époque de la Floride impériale, lorsque tous les groupes du cru se précipitaient au Morrisound pour avoir LE son idoine, et l’impression, loin d’être désagréable ou roborative, est des plus agréables.
Dès « Genesis », et après une courte intro discrète, l’évidence saute aux oreilles. BAEST n’est plus un espoir, il est aujourd’hui une confirmation sur la scène Death. L’envergure prise par le groupe crève les yeux, et son assurance ne peut être remise en question. Lasse Revsbech & Svend Karlsson ont donc fait un tri drastique dans leur idées pour n’en retenir que les riffs et plans les plus létaux, tandis que l’axe Mattias Melchiorsen/Sebastian Abildsten cimente le tout de sa polyvalence percussive. Mais c’est réellement « Goregasm » qui allume définitivement la mèche de son sadisme créatif et de ses harmonies vicieuses. En six minutes, BAEST fait le tour de la question extrême, et en ressort grandi, certain d’avoir assimilé tous les préceptes les plus importants. Le riff d’introduction, emphatique et sombre, nous met sur la piste Lovecraftienne d’un DM occulte, avant que les deux guitares ne reviennent vers un motif plus redonnant et classique. On pense à ce moment-là à un mash-up magique entre MORBID et MORGOTH, lorsque soudainement, un groove miraculeux nous prend à revers. Les musiciens n’ont pas oublié que la brutalité fluide est la plus dangereuse du marché, et nous pondent un hymne définitif, de ceux que l’on attend patiemment en concert pour devenir complètement barge.
Et pourtant, ce morceau d’anthologie ne parvient pas à cacher le reste de la foret, et le groupe nous assomme alors d’un final en sprint incroyable, nous faisant cavaler par alternance sur le terrifiant « Towers of Suffocation », avant de refaire monter la pression et siffler les harmoniques sur « Purification Through Mutilation ». De la franchise dans la complexité, de la préciosité dans la barbarie, des inserts techniques que les spécialistes apprécieront, pour un résultat qui dépasse finalement toutes les espérances nées des deux premiers albums. Et en nous lapidant d’un terminal « Sea of Vomit », introduit par un numéro d’équilibriste de Sebastian Abildsten, BAEST nous laisse la tête complètement vidée, et le cœur malmené. Century Media avait donc parfaitement raison d’accorder une fois de plus sa confiance aux danois, qui réalisent là le plus beau hold-up Death de ce premier trimestre 2021.
Titres de l’album:
01. The Forge
02. Genesis
03. Necro Sapiens
04. Czar
05. Abbatoir
06. Goregasm
07. Towers of Suffocation
08. Purification Through Mutilation
09. Meathook Massacre
10. Sea of Vomit
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30