Necro Sapiens

Baest

05/03/2021

Century Media

J’aime les belles histoires, et celles qui roulent en n’amassant pas mousse ou autre chose. J’aime les histoires de fidélité, d’entités qui grossissent ensemble, de parrainage, de pygmalion, j’aime voir les gens marcher main dans les os dans les couloirs d’un abattoir avant d’aller se mélanger la salive et les liquides séminaux dans un cimetière non surveillé. J’aime penser que Nekromantik n’est pas qu’un film, mais l’autobiographie d’un vrai nécrophile qui n’a pu résister à se donner la mort dans un dernier orgasme macabre. J’aime me dire qu’un beau jour, je croiserai un zombi doté d’un chibre de quarante centimètres de long comme dans Necro Files. J’aime penser que Jeffrey Dahmer a vraiment aimé ses amants d’un soir, et que Dennis Nielsen portait de belles cravates. Et j’aime me rendre compte que les danois de BAEST en sont déjà à leur troisième album en à peine cinq ans de carrière.    

Troisième album, la charnière, et toujours huilée par le géant Century Media qui depuis le début, croit dur comme fer que son poulain va devenir l’une des têtes de file de la vague old-school Death européenne. Il faut dire qu’avec deux longue-durée de qualité dans la besace, les danois ont de quoi s’y croire, et personne n’a pu oublier les déflagrations sous influence que furent Danse Macabre et Venenum. Des albums hauts en tripes, encore un peu influencés par les grands aînés, mais témoignages authentiques et indéniables d’un potentiel incroyable. Et alors qu’aujourd’hui, le plus gros et dangereux virage s’amorce, les cinq danois n’ont pas changé d’un fémur leur approche, et continuent de pilonner intelligemment.

Quelle joie aussi de constater que le line-up du groupe est toujours aussi stable depuis ses débuts (Mattias Melchiorsen – basse, Sebastian Abildsten – batterie, Lasse Revsbech & Svend Karlsson - guitares, Simon Olsen – chant), et que l’osmose entre les musiciens prend de plus en plus. Pourtant, rien de révolutionnaire ne vient faire briller la surface de ce Necro Sapiens. Rien ne choquera les fans de la première heure, et rien ne chamboulera les néophytes à l’écoute de ces dix morceaux, tous plus professionnels les uns que les autres. Seule la production, profonde, gravissime mais brillante pourra à la rigueur donner l’indication que le groupe prend la bonne direction pour se glisser sur le podium, mais le reste ne fait que respecter les codes classiques établis par les deux premiers albums. Alors, la qualité dans la continuité ? C’est exactement ça, avec une pointe de personnalité en plus pour en donner pour leur argent aux die-hards.

Les mélodies ont donc été accentuées, le chant de Simon encore plus creusé dans les limbes de l’agonie (sa gravité vient maintenant défier le David Vincent le plus enroué), les riffs travaillés pour adopter les contours d’une rythmique polyvalente, et le parfum dégagé par Necro Sapiens à ces relents de putréfaction qu’on retrouvait chez les cadors des années 90, de l’envergure d’IMMOLATION ou MORBID ANGEL. Ce derniers ont dû d’ailleurs avoir l’oreille gauche qui a longuement sifflé au moment de la composition de ce troisième pamphlet, tant leur période Blessed are the Sick/Covenant/Domination est ici survolée avec une application incroyable. On y retrouve cette même pluralité, cet affrontement permanent entre la vélocité et la pesanteur, les même dissonances, les riffs symptomatiques du génie de Trey, et l’ambiance générale, poisseuse, virile, au propos musical terriblement violent et amer. Alors certes, le travail de mimétisme des danois est assez bluffant, et pourtant, pas question de parler ici de plagiat ou de copie un peu trop carbone. La photocopieuse à certes tourné, mais pour trouver les bonnes citations et les recopier dans un langage plus personnel. Je le concède, personne ne niera que l’oppressant « Czar » aurait largement eu sa place dans la discographie du monstre floridien, tout comme « Abbatoir », mais nonobstant cet hommage largement appuyé, la confiance affichée par le quintet lui permet de s’éloigner de la masse des pompeurs les moins inspirés.

Il faut j’en conviens aimer l’optique US du Death de tradition pour se prendre au jeu. Que les puristes de la HM-2 et des studios Sunlight passent donc leur chemin, ils ne trouveront rien pour satisfaire leurs plaisirs scandinaves les plus pervers. Ici, tout sonne comme à l’époque de la Floride impériale, lorsque tous les groupes du cru se précipitaient au Morrisound pour avoir LE son idoine, et l’impression, loin d’être désagréable ou roborative, est des plus agréables.  

Dès « Genesis », et après une courte intro discrète, l’évidence saute aux oreilles. BAEST n’est plus un espoir, il est aujourd’hui une confirmation sur la scène Death. L’envergure prise par le groupe crève les yeux, et son assurance ne peut être remise en question. Lasse Revsbech & Svend Karlsson ont donc fait un tri drastique dans leur idées pour n’en retenir que les riffs et plans les plus létaux, tandis que l’axe Mattias Melchiorsen/Sebastian Abildsten cimente le tout de sa polyvalence percussive. Mais c’est réellement « Goregasm » qui allume définitivement la mèche de son sadisme créatif et de ses harmonies vicieuses. En six minutes, BAEST fait le tour de la question extrême, et en ressort grandi, certain d’avoir assimilé tous les préceptes les plus importants. Le riff d’introduction, emphatique et sombre, nous met sur la piste Lovecraftienne d’un DM occulte, avant que les deux guitares ne reviennent vers un motif plus redonnant et classique. On pense à ce moment-là à un mash-up magique entre MORBID et MORGOTH, lorsque soudainement, un groove miraculeux nous prend à revers. Les musiciens n’ont pas oublié que la brutalité fluide est la plus dangereuse du marché, et nous pondent un hymne définitif, de ceux que l’on attend patiemment en concert pour devenir complètement barge.

Et pourtant, ce morceau d’anthologie ne parvient pas à cacher le reste de la foret, et le groupe nous assomme alors d’un final en sprint incroyable, nous faisant cavaler par alternance sur le terrifiant « Towers of Suffocation », avant de refaire monter la pression et siffler les harmoniques sur « Purification Through Mutilation ». De la franchise dans la complexité, de la préciosité dans la barbarie, des inserts techniques que les spécialistes apprécieront, pour un résultat qui dépasse finalement toutes les espérances nées des deux premiers albums. Et en nous lapidant d’un terminal « Sea of Vomit », introduit par un numéro d’équilibriste de Sebastian Abildsten, BAEST nous laisse la tête complètement vidée, et le cœur malmené. Century Media avait donc parfaitement raison d’accorder une fois de plus sa confiance aux danois, qui réalisent là le plus beau hold-up Death de ce premier trimestre 2021.

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. The Forge

02. Genesis

03. Necro Sapiens

04. Czar

05. Abbatoir

06. Goregasm

07. Towers of Suffocation

08. Purification Through Mutilation

09. Meathook Massacre

10. Sea of Vomit


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par mortne2001 le 07/03/2021 à 17:58
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Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête. 

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