Je connaissais déjà l’idole des jeunes, mais j’ai fait la connaissance aujourd’hui de l’idole des nerds. Après tout pourquoi pas, chaque caste a droit à ses propres héros, et en écoutant ce troisième album du trublion suédois Henrik PALM, je comprends pourquoi il se sent chez lui parmi les accros à l’informatique, aux gamers, aux addicts des smartphones, des bouquinistes, hikikomori et autres binoclards en marge de la société. Artistiquement, le bonhomme est du genre iconoclaste, et la maigre biographie accompagnant la sortie de ce nouvel album en dit autant sur lui que les huit chansons de Nerd Icon.
Membre ou ex de CHAINWRECK, IN SOLITUDE, PIG EYES, SÖDRA SVERIGE, SONIC RITUAL, ou V.Ö.M.B (si vous connaissez, tant mieux, sinon, tant pis), Henrik PALM fait partie de ces musiciens inclassables, qu’on range par facilité dans la case du Rock étrange et métissé, quelque part entre l’Alternatif nineties et le lourd 2K. Il est en effet très risqué de s’aventurer sur le terrain de la précision, d’autant que l’auteur même n’en a rien à carrer. Il le dit lui-même avec une nonchalance qui force le respect, et se moque ouvertement de son passé puisque seul le présent l’intéresse.
Avec deux albums dans la besace, dont un déjà pour l’écurie référentielle Svart, Henrik PALM essaie de faire plaisir à tous les parias, outcasts, esseulés, incompris, qui pensent être seuls au monde et les seuls aptes à comprendre à quel point la société est une horreur de conformisme dès lors qu’on a une personnalité un peu décalée. Et les chansons formant le puzzle insoluble de Nerd Icon ressemblent à ce que BECK pourrait produire en travaillant avec les MELVINS et les ELECTRIC BOYS.
Nous sommes donc dans une dimension un peu particulière, qui se veut plus généraliste et ouverte qu’un simple désert Heavy Metal. L’homme joue du Rock, parfois avec l’énergie d’un groupe de Sludge, parfois avec le décalage lysergique d’un Space-Rock band revenu de Saturne avec des réponses tarabiscotées sur le monde. On apprécie donc la variété de ton qui nous fait rebondir d’un riff fatigué sur un tapis de strates compensées, et qui nous balade dans les couloirs de l’inconnu à la recherche non de clés ou d’astuces, mais bien d’une perdition totale qui éveillera nos sens à un champ d’influence très vaste.
Henrik PALM n’est d’ailleurs pas seul dans son univers. Il a convié pour son voyage quelques compagnons de vol assez plantés eux aussi, Simon Söderberg, Daniel Moilanen et Johan Gustafsson, et s’est aussi fait plaisir en lançant des invitations à des membres de groupes aussi illustres que POISON IDEA, VIAGRA BOYS, NORD & SYD, THE BEAR QUARTET, SWITCHBLADE, ou PAPER AND HORNDAL. D’où un joli bordel qui sent HAWKWIND et Francis DUNNERY, WEEZER en plein trip LSD et KYUSS, CROWBAR et Remi ZERO, en gros, tout, n’importe qui, mais surtout, de quoi nous faire plaisir en nous en traînant hors de notre zone de confort.
D’ailleurs, « Instrumental Funeral » agit comme un avertissement, et lâche les watts en débridant une guitare sombre, sentencieuse au bagout insidieux. On prend note immédiatement de cette multitude de sons qui se complètent et se télescopent, et le combat saturation/claviers est relativement intéressant, et même parfois hypnotique. Mais c’est véritablement « Subway Morgue » qui met le feu aux poudres d’une intro associant le « Pinball Wizard » des WHO à un hymne fameux d’AC/DC, avant de s’affaler dans le canapé pour bouffer des chips et zapper comme un fou. Henrik PALM est un artisan, un dilettante, mais il prend quand même ses loisirs au sérieux pour nous dérouler de vraies chansons, et non de simples expérimentations pour ne rien faire comme tout le monde.
On imagine des PIXIES hagards au bord d’une piscine sèche quelque part en Arizona, à la scène Alternative des années MTV, GIRLS AGAINST BOYS en tête de liste, reprenant du JESUS LIZARD en plus digeste, et finalement, on se laisse aller à l’observation d’un alien sympathique, qui boit des pintes et veut nous faire comprendre qu’il est comme nous…ou pas.
Si l’approche putassière de refrains catchy et autres gimmicks faciles est très finement évitée, cela n’empêche pas le quatuor de nous soigner avec quelques idées bien senties (« Swim to the Light », le tube de l’album, pas très suédois, mais terriblement prenant). La guitare sonne comme aux plus grandes heures du Desert Rock ou d’un Pub Rock gras et feignant, la rythmique s’adapte mais n’en fait jamais plus qu’elle ne doit, et le chant, lent et traînant nous branche sur la gégène d’une station college-rock diffusant des pamphlets antisportifs, anti-Pop-pom girls, anticonformistes, et anti un peu tout-ce-que-vous-coulez/voulez.
Nerd Icon est en fait une transposition des humeurs d’un cerveau embrumé par la réalité, et qui cherche une échappatoire dans la technologie, la solitude, le retour à l’enfance, et les rires stupides et nerveux. Nous sommes donc loin du légendaire Revenge of the Nerds, et plus proche de ceux d’aujourd’hui, totalement inhibés, enfoncés dans la réalité virtuelle comme un éléphant dans des sables mouvants, ce que raconte très bien le lourd et oppressant « From the Grave ».
Henrik PALM le souligne avec beaucoup de sincérité, « Back to Abnormal ». La normalité est aussi pénible qu’un samedi soir dans un bar ou qu’une soirée chiante, et la guitare acoustique est encore le moyen le plus fiable de créer une ambiance cosy, même lorsqu’on est coincé dans sa piaule à binge watcher une série quelconque. Cette mélodie pastorale tranche justement avec le reste de l’album, animé d’un esprit dandy et dadaïste, et ouvre légèrement la fenêtre pour laisser entrer un peu d’air.
Une fois infusé dans votre âme, Nerd Icon y fait sa place, et ne se dissout pas. C’est un disque étonnant, difficile d’approche, parfois confus dans sa direction, mais toujours touchant et même collant. On y sent une admiration pour la Pop des sixties, pour le Glam torve des seventies, et plus simplement, une fascination pour le Rock le plus affranchi et libre.
Après tout, quel mal y-a-t-il à rester seul chez soi, les violets fermés, quand on constate ce qui se passe dans ce monde de barrés ?
Titres de l’album:
01. Instrumental Funeral
02. Subway Morgue
03. Lunch Hour (of the Wolf)
04. Talismanic Love
05. Swim to the Light
06. From the Grave
07. Back to Abnormal
08. Many Days
Oui les subventions il suffit d'un pas qu'ils perçoivent de travers (ce qui n'est pas forcément le cas dans une scène) et t'es hors système. C'est un immense problème, peu importe ou l'on se situe économiquement, dans le syst(...)
01/05/2025, 23:51
Je suis sur le dernier de mon côté, Malignant Worthlessness, sorti cette année. Du tout bon, même si il n'y a plus l'effet découverte "c'est qui ces tarés !?"
01/05/2025, 22:41
Tout le monde voyait bien ces difficultés dans l’activité de la salle depuis la pandémie, et j’étais au courant par plusieurs biais des soucis d’un autre ordre. Les lecteurs de Metalnews savent bien que je suis un habitué des lieux depuis vingt(...)
01/05/2025, 21:22
Je sais bien que je tourne en rond mais le principale problème c'est le manque de renouvellement du public, autant j'ai maudit ces courant type metalcore/deathcore, ils apportaient un nouveau public. Je suis trentenaire et parfois je me sens jeune dans un concert black/death meta(...)
01/05/2025, 19:06
Le nouveau line-up est top ! Mais le morceau ne me fait pas grimper au rideau... Finalement j'aime Suicidal quand c'est plus Metal que Punk, avec les solis magiques de Rocky George. Bref, je suis un nostalgique, et même si je serai intéressé pour revoir le groupe sur(...)
01/05/2025, 17:54
Qui écoute encore cet album en 2025? Groupe que je découvre que maintenant... Quel album ! Tourne en boucle
01/05/2025, 16:57
Bah c'est très moderne en effet et malheureusement, je ne sais pas si le public de ce style en core est très assidu aux festivals. Au-delà du fait que le niveau de popularité des groupes soit un ton en dessous par rapport au passé glorieux du festival. Mais(...)
01/05/2025, 09:15
Il y a vraiment un problème de la place de la culture dans notre société...
01/05/2025, 09:11
C'est clair que ça fait mal au cul de voir la prog' du festival depuis quelques années... faut pas s'étonner hélas que le public se fasse de moins en moins nombreux, alors qu'avant le Covid l'affiche avait chaque année de la gueule !
29/04/2025, 13:37
Première écoute décevante, la seconde plus convaincante. Malgré tout un peu déçu après le très bon World Gone Mad
29/04/2025, 08:26
Et pitié plus jamais de thrash//bllack/death à la con, choisit ton camp camarade !.
29/04/2025, 02:27