Je dissertais hier à l’occasion d’une chronique sur la propension du Black Metal à oublier ses racines pour mieux se concentrer sur ses prolongements cryptiques, déplorant de fait l’amnésie touchant les musiciens du cru. J’avais quelque part raison dans mes hypothèses et conclusions, et pourtant, aujourd’hui, je vais aller à l’encontre de mes propres projections.
Pour quelle raison ce retournement de veste reste-il dans un domaine de pertinence qui ne me pousse pas à la contradiction ? Simple, le nouvel album des originaires de Chicago, CRACKED VESSEL. Je pourrais arguer d’une appartenance lointaine à la famille BM pour justifier de mon regard de biais, mais il est pourtant indéniable que ces manipulateurs de bruits font bien partie du cénacle noir, ce que leurs premiers albums prouvent sans discussion possible.
Mais ce petit dernier, No Path, qui semble se poser en impasse de style démontre bien que l’ouverture sera définitivement le salut d’un genre condamné à tourner en rond s’il ne cherche pas la pelle pour se dégager de sa tombe.
Une pochette plein bleu qui se démarque des impératifs graphiques d’usage, une musique qui pourtant se veut sombre mais optimiste d’un certain point de vue, et finalement, une orientation inclassable qui m’empêche de les rattacher pleinement à un courant précis, si ce n’est celui suffisamment vague du Post Black…Mais plus précisément, il n’est pas incongru d’affirmer que les CRACKED VESSEL sont parvenus avec ce premier longue durée à assimiler les préceptes du Black le plus abrasif aux postulats Post-Hardcore les plus décisifs. On connaît déjà le principe qui a abouti quelque part à la genèse du Post Black, mais l’approche de ces musiciens est sensiblement différente, puisque les deux composantes cohabitent dans un ballet étourdissant, donnant souvent l’impression d’être cloisonné dans un duplex habité conjointement par un combo de Post Hardcore New-yorkais et un ensemble BM Norvégien.
Le parallèle vous semble osé ? Pourtant il décrit à merveille l’ambiance de claustrophobie qui émane de No Path, qui en effet, ne semble offrir qu’une fin de non-recevoir à un périple pas encore entamé.
On savait depuis Path I que la vision du Post Black étalée sous nos oreilles par les natifs de l’Illinois était clairement différente de celle de leurs homologues, dont celle de DEAFHEAVEN, mais ce premier LP vient à point nommé prouver leur singularité et leur excentrisme musical.
Constitué de huit longues plaintes aussi abrasives que contemplatives parfois, ce disque est une énigme insoluble, qu’il ne faut surtout pas analyser, mais ressentir. En utilisant les rythmiques puissantes du Black soutenant des riffs Hardcore, et traitant le tout d’une désinvolture Punk, les CRACKED VESSEL sont parvenus à concrétiser un sale traumatisme musical qui doit autant à la scène heurtée de New-York des années 90, qu’à la mouvance arty No Wave de la même ville des 80’s, le tout dilué dans une ambiance nihiliste émanant des côtes Norvégiennes du début des années 2000.
Le mélange vous semble intéressant ?
Il l’est, et le résultat n’en est que plus troublant et déstabilisant.
Fonctionnellement, le Post des CRACKED VESSEL fonctionne presque comme une trame instrumentale sur laquelle viennent se poser quelques lyrics épars. L’enchevêtrement de riffs est complexe, et si certains sont clairement rattachable au BM le plus ouvertement Core, d’autres au contraire osent un Punk direct et cru (« No Family »), tandis que sur certains intermèdes courts, la folie qui émane de la confrontation globale aboutit à une sorte de fusion entre un BM très cru et aride et un Post Hardcore débridé et terrible (« City Of Hunched Shoulders », qui agit comme une course poursuite dans les rues de Chicago entre un PAINKILLER complètement perdu et un DARKTHRONE aux pneus lisses).
En gros, une liberté de création sans limites, qui n’a cure des affiliations, et qui fonce sans raison, mais avec un but. Déstabiliser l’auditeur pour lui faire perdre ses repères, et lui faire abandonner toute volonté de classification restrictive et usurpée.
Feedback, stridences, itérations, titres brefs et violents ou longues errances progressives (« No Life », l’ouverture qui débute par une note unique de basse soudainement déchirée d’une lame de riffs rouillés), tentatives mélodiques incongrues qui dressent un parallèle contraire entre des harmonies de guitare presque nostalgiques et un chant complètement ravagé (« No Body »), basse roublarde et hypnotique roulant sur un tapis de riffs si concentriques qu’on peine à en trouver la logique (« Bastard Children of Rust »), percussion des mondes de CONVERGE et DEAFHEAVEN dans un fracas assourdissant et aveuglant (« Winter's Unsheathed Sword »), No Path est finalement une œuvre qui va à l’encontre même de son titre en proposant une multitude de pistes à suivre.
Pas vraiment le genre d’album qu’on écoute d’une oreille distraite, pas vraiment le genre d’album qui vous met à l’aise et laisse votre esprit vagabonder, mais plutôt une visite guidée des bas-fonds de Chicago en vélo, prêt à dérailler au moindre nid de poule.
Et plus simplement la réconciliation imposée du Black Metal et du Post Hardcore dans une fusion de gerbes de flammes, un équilibre instable qui ne choisit d’utiliser que les éléments les plus dérangeants des deux courants.
Unique en soi, et libérateur autant qu’irritant. Mais une expérience hors du commun, qui pourrait bien réunir en un même élan les deux factions.
Un genre de pas de trois entre les SONIC YOUTH, UNSANE et NAILS dans une impasse, pour savoir qui est le plus dérangé du lot.
Mais sans réponse évidemment.
Titres de l'album:
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