L’homme est une invention dont l’archéologie de notre pensée montre aisément la date récente. Et peut-être la fin prochaine.
Cette citation de Michel Foucault prend tout son sens dans le contexte actuel. En tant qu’espèce, nous sommes encore jeunes au regard de l’histoire. Mais en même temps, cette jeunesse ne nous empêche pas de passer pour une civilisation en perdition, qui s’est détruite elle-même de ne pas avoir réfléchi à sa propre survie. Ou plutôt si : mais de l’avoir envisagée sous un angle économique et égoïste, nous croyant éternels comme le monde qui nous entoure. Il est bien connu que l’homme ne réfléchit qu’à moyen/court terme, incapable qu’il est d’anticiper les conséquences de ses actes sur plusieurs siècles. Le temps est donc une donnée mal maîtrisée, qui nous amène aujourd’hui au bord d’un gouffre que nous avons creusé. Ce qui fait de nous notre pire ennemi. Quel paradoxe cruel…
Le questionnement écologique est devenu une composante essentielle de la réflexion moderne. S’il est évident que notre mode de vie ne peut rester le même et refuser des changements cruciaux, notre attitude montre que nous n’avons cure de ces impératifs. Du moins, nos dirigeants et nos industriels. Pour une idée en faveur d’une écologie responsable, les lobbies nous pondent une dizaine d’actes d’une inconscience rare, pensant qu’on peut étirer les échéances à l’infini. Mais le réchauffement n’en finit plus d’exploser les degrés, les catastrophes naturelles s’empilent comme des couches de mille-feuilles, et le compte à rebours de l’horloge de l’apocalypse s’affole. Il est donc relativement normal que les artistes se penchent sur la question, non pour apporter des solutions, mais pour souligner les travers. Ce que fait avec beaucoup d’emphase le duo BERLIAL.
Son nom même est une sorte de combinaison entre nos obsessions sécuritaires et notre nature profonde, la plus mauvaise. De Beria, ancien responsable du KGB et Belial, bras droit de Lucifer, est né BERLIAL, sous l’impulsion de HellSod (guitare/basse/chant/programmation) et CzH (chant/claviers/textes). Après un premier album au titre très évocateur (Enfants de Putains), le duo a recentré son propos et nous offre avec Nourishing the Disaster to Come un constat sans appel : la fin est pour bientôt, et c’est très bien comme ça. Cette logique implacable s’accompagne d’une nouvelle digression sur un Black Metal de tradition, déformé par le prisme créatif de deux musiciens avides d’expression brute. Nourrir le désastre à venir est une conclusion assez logique qui prend en compte notre absence de réaction face à l’inéluctable, comme si les dés étaient jetés depuis longtemps. Mais musicalement, l’affaire est beaucoup plus complexe : les deux hommes se livrant à un petit jeu de références assez impressionnant, refusant de fait le statu quo.
En un peu moins de cinquante minutes, BERLIAL mélange les courants et les références, ajoute de nombreux paragraphes narrés pour assurer une cohérence, et ose une adaptation musicale d’un film pour l’esprit, ou même mieux : un documentaire à charge accablant. Le côté grandiloquent de l’affaire est évidemment en phase avec son thème, et un titre aussi gargantuesque que « We Deserve to Fall Again » impressionne de son amplitude. Mixant tous les sous-courants d’un sous-genre exigeant, les deux musiciens prennent le pari de traduire un glissement inexorable via une bordée de riffs agressifs et de pulsations rythmiques percutantes. Et comme on l’entend dans le lointain sur ces samples placés judicieusement : ça sent la merde.
Aussi emphatique qu’il n’est réaliste, ce deuxième album est tout bonnement sidérant de créativité. La marge de progression du groupe est encore conséquente, et pourtant la perfection est à portée de main. A la manière d’un HYPNO5E passé du côté obscur de la force, Nourishing the Disaster to Come sonne comme un Acid Mist Tomorrow en mode négatif, je suis ton père, main coupée et regard biaisé. L’aveuglement dont nous faisons preuve est ici pourfendu par le bon sens et l’absence de de complaisance, et c’est pour mieux souligner ces éléments que l’instrumental ose les inserts Heavy, Black n’Roll, Blackgaze et autres détours plus ou moins clairs.
La question qui s’impose est donc la suivante : ce deuxième long n’est-il qu’une impasse, ou un portail vers une autre réalité ?
Les deux probablement, si l’on en croit l’imagination développée par les deux créateurs.
Il est évident que nous n’éviterons pas la chute mortelle. L’inconnue est donc de savoir à quelle vitesse nous allons glisser dans le ravin de l’humanité et devenir des amas de tôle froissée et de Metal fondu. « Ivresse de la Finitude » donne un aperçu de la douleur à venir, mais sans se départir de cet instinct mélodique qui rappelle le meilleur de la scène suédoise, mais aussi le Heavy subtilement gothique des années 2000. Totalement en phase avec son époque, BERLIAL refuse les barrières, les fait tomber avec énergie, et pose un album qui contourne toutes les obligations contractuelles. Il n’est donc pas rare que des coupures grandiloquentes succèdent à un couplet très âpre, ou qu’une harmonie céleste ne vienne interrompre une charge virale.
Des claviers omniprésents, des blasts qui s‘incrustent dans le néant, une voix qui tient le rôle de narrateur de l’obscur, et vogue la galère sur les eaux troubles de l’histoire. Très classique lorsqu’il le faut (« Nourishing the Disaster to Come », discours hurlé qui tient lieu de fin de non-recevoir), combinant les incrustations parlées et les avancées musicales (« Le Néant pour Eternité », ce qui nous attend de pied ferme), BERLIAL signe un manifeste d’objectivité qui fait mal à l’âme, mais qui a le mérite de ne pas travestir la réalité.
La fin prochaine ? Encore plus que nous le pensons, et de là, jaillissent deux options : faire comme si, ou accepter le sort. Mais le résultat sera le même. Et le nôtre n’est guère enviable.
Titres de l’album:
01. The Last Dance
02. Nouveau Monde
03. We Deserve to Fall Again
04. Ivresse de la Finitude
05. Nourishing the Disaster to Come
06. Le Néant pour Eternité
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15/04/2025, 08:17
Et va te faire foutre avec ton histoire de masque à la con, comme si je cachais quelque chose.
15/04/2025, 07:56
J'en ai juste marre des nostalgiques à la con qui sont incapables de tourner la page. Tu aurait une reformation avec tout les membres de ton groupe que tu aimais ado en fauteuil roulant que tu aurais un public pour dépenser 500 balle le ticket. Oui c'est à charge..
15/04/2025, 07:52
Les masques tombent. Je vois. Ton post n'a donc aucune crédibilité vu que c'est à charge. On se demande donc bien quel est son intérêt ici. Un mystère de plus. Comme si moi j'allais poster sous un groupe ou sous un style dont je me balec. Br(...)
15/04/2025, 06:37
Tu as des mecs qui déboursent une fortune pour aller voir les vieillards de Black Sabbath jouer péniblement, à un moment il faut tourner la page désoler, pareil pour Maiden et compagnie.
15/04/2025, 05:15
Oh mais si ça ne tenait qu'à moi tout ce qui est heavy ou thrash speed et compagnie c'est poubelle. On a poussé le metal plus en avant, ces reculs nostalgique d'adulescent c'est pas pour moi.
15/04/2025, 05:06
On reconnaît quelques intonations de Rinehart mais a l'instar de Doty, qu'on a pu entendre sur des réenregistrements, ça sonne pas terrible. Bon attendons tranquillement l'album.Par contre pas d'accord avec les posts précéde(...)
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Je rejoins en partie Arioch91...le chant? Et la production? Ca manque d'âme je trouve, en tout cas si je compare à "Darkness Descends" ( oui, c'est le seul album que je connais d'eux....)....
14/04/2025, 14:35
Un petit message hors sujet mais bon, je regrette en effet la disparition du Fall of Summer...
14/04/2025, 14:30
Bon ça me parle déjà plus que leurs dernières sorties, on retrouve un peu d'adhérence dans les guitares, à voir !
14/04/2025, 07:29