Les hasards du calendrier font parfois bien les choses. Ainsi, ce nouvel album de JURASSIC JADE sort en même temps que le baroud d’honneur de HOLY MOSES, ce qui est assez cocasse quand on connaît les liens attachant les deux groupes. Des liens indirects évidemment, reposant sur une approche similaire et une attitude frondeuse face aux codes d’un genre qui a dû avec le temps s’adapter à l’audace de certains musiciens. Et ne croyez pas que je compare JURASSIC JADE à HOLY MOSES pour le plaisir de pointer du doigt la présence d’une chanteuse au micro. Car même si ce détail à son importance, c’est surtout la façon d’envisager l’agression qui permet de les mettre dans chaque plateau de la même balance.
JURASSIC JADE, pour les néophytes est l’un des plus anciens groupes japonais en activité, et à l’image de certains de ses confrères, le quatuor peut s’appuyer sur la présence de trois membres d’origine pour continuer à porter la flamme. Né en 1985 à Tokyo, après avoir battu pavillon REBEL POWER pendant deux ans, ce groupe mené de voix de fer par Hizumi n’a jamais raccroché les crampons, même s’il a connu quelques périodes de flottement, notamment au début des années 2000. Adulé par les fans d’un Thrash atypique à la nippone, dans une veine situé entre les artères de DOOM et OUTRAGE, JURASSIC JADE a lâché des œuvres toujours intéressantes à défaut d’être systématiquement essentielles, et revient donc trois ans après le lapidaire et excellent Id mettre le feu à notre imagination.
Et en découvrant les secrets de Nyx Filia, il est impossible de ne pas penser à cette Invisible Queen lâché par Sabina en tant que testament il y a quelques semaines. Et si les japonais n’atteignent pas encore l’intensité dégagée par les allemands, leurs efforts sont similaires, et nous extirpent d’une facilité old-school un peu trop utilisée ces dernières années.
Rien n’a changé depuis notre dernière rencontre, le line-up est le même (Haya - batterie, Nob - guitare et Hizumi - chant, tous présents depuis 1985, et Watanabe - basse depuis 2018) et l’envie aussi. Toujours aussi à cheval sur leurs propres principes, les trois leaders et force créative imposent leur entre-deux, situé en convergence de l’originalité et de l’efficacité. Pas encore trop technique, mais résolument progressif, leur Thrash est toujours aussi savoureux, et truffé de petites pirouettes techniques qui enjolivent des structures simples. Mais pas tant que ça.
Ainsi, en tombant sur le radical « 私だけにきこえる », le fan se réjouira de cette intro aérée et claquée, qui mène sur un thème que MACHINE HEAD aurait pu triturer sur ses deux premiers albums. Beaucoup de groove donc, une certaine patience dans l’élaboration, mais aussi une colère explosive qui permet aux titres de tout gicler à cent lieues à la ronde. On reprochera au groupe les mêmes choses qu’on pointait déjà il y a des années, à savoir le recours quasiment systématique à un contretemps qui peut à la longue se montrer lassant, mais on louera aussi les mêmes qualités, le culot, la recherche du détail incongru, et cet à-propos dans les cassures brutales qui font rebondir des plans de base.
Une fois encore, JURASSIC JADE clone son propre ADN non pour monter un parc d’aventure, mais bien pour actualiser sa propre formule élaborée dans les années 80. Le tracklisting est solide, l’interprétation sans failles, et une fois encore, la voix de sorcière possédée par des esprits anciens d’Hizumi fait des merveilles, et permet au groupe de tutoyer les cimes autrefois escaladées par nos amis de VOÏVOD (« 君が死んだあとで »).
Du sur mesure donc, qui traverse les époques avec une facilité déconcertante, pour encore tenir la comparaison en 2023 avec la jeune génération. Alors que cette dernière s’embourbe la plupart du temps dans les hommages faciles, les vieux font de la résistance, et donnent une leçon haut la main à tous ces musiciens qui pensent qu’une relecture des dogmes de la Bay-Area suffit à s’assurer une place au soleil.
Et plus Nyx Filia avance, plus il se place automatiquement au niveau des meilleures sorties des japonais. Son atmosphère est travaillée, ses arrangements fouillés, ses digressions solides, et son sens de l’innovation toujours aussi crédible. Et cet album tombe à point nommé pour rappeler l’importance de la scène Thrash japonaise, une scène iconoclaste, unique en son genre, et loin des adaptations Heavy timides des années 80.
Entre Indus larvé, Techno assumé et psychédélique déformé, JURASSIC JADE rejette les convenances, et sort l’un des meilleurs disques de sa longue carrière. Peu sont les ensembles capables d’orchestrer une telle folie après presque quarante ans de carrière, et l’exploit des quatre japonais se doit d’être souligné à la hauteur de son mérite.
Constamment remis sur les rails grâce à des plans acrobatiques ou osés, Nyx Filia rebondit de dissonances en discordance, pour mieux nous caresser les sens à rebrousse-poil. « 朝5時に戦争が始まる » s’enfonce même dans les traumas les plus atonaux du Thrash de tradition, alors que « まだうたえない » provoque le Funk pour imposer une Fusion toujours visionnaire et audacieuse.
La tradition dans la modernité. Sans se vendre, sans se découvrir, sans renoncer à ses principes, JURASSIC JADE s’impose sur la durée, avec toujours autant de confiance et de fermeté. Une belle prouesse pour un groupe né en plein Thrash boom américain, mais qui n’a jamais renoncé à son identité.
Titres de l’album:
01. A Small World
02. 暗い部屋の黒い猫 (Black Cats in the Dark Room)
03. Cave Sorrow
04. Rain in Black
05. 私だけにきこえる
06. 君が死んだあとで
07. 女神の憂鬱 (Goddess in Blue Island)
08. 朝5時に戦争が始まる
09. まだうたえない
10. No Cherry Blossom
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