Comment construit-on une légende ? La réponse est dans la question. En fait, on ne la construit pas, elle nait de sa propre source, n’importe où, n’importe comment, et dure tant que des gens continuent à y croire.
Certaines naissent sur un champ de bataille, sur un lit d’hôpital, dans l’espace ou dans notre mémoire, biaisée par la passion souvent et au fil des années, s’enrichit d’anecdotes, vraies ou pas, mais tout le monde s’en fout. Car le plus important, c’est qu’elle galvanise, qu’elle soit porteuse d’espoir, ou au contraire, de désolation ou de résignation.
Je ne suis jamais allé en Floride, je ne connais l’état qu’au travers de reportages, et de ces fameuses oranges qui ne pourrissent soit disant jamais. Mais en Floride comme ailleurs, la vie, la mort, c’est un peu la même chose. Et puis, comme ces foutues oranges, nous pourrissons tous un jour ou l’autre.
Lentement.
En tout cas, c’est ce qu’une des légendes locales racontait il y a trente ans. Ou presque…
Allez, le raccourci est facile. 1989, 2017, et puis un album éponyme. Tiens, ça aussi ça ne doit rien au hasard, on ne donne pas son nom propre à un disque sans avoir des intentions claires derrière la tête. Celles d’affirmer que l’on n’a jamais été autre chose que soi-même, aujourd’hui comme hier, demain comme jamais.
Alors quand on s’appelle OBITUARY, et qu’on décide d’enfoncer le clou histoire de le faire rentrer dans le bois du cercueil, c’est qu’on sait pertinemment qu’on ne deviendra jamais rien d’autre…qu’une légende.
Pas belle, pas enjolivée, pas décorée avec des lettrines et des angelots de six pouces de haut, non, juste un nom qui évoque une musique, un son, une attitude.
Death Metal. To the end.
Ils avaient annoncé leur retour avec une compile il y a quelques temps, un truc un peu anecdotique qui ne m’avait pas vraiment mis la puce à l’oreille, mais qui m’avait grave démangé les souvenirs. Du live, mais surtout, deux morceaux, plus ou moins heureux dans la composition, dont un m’avait plus frappé que l’autre.
Et ça tombe super bien en fait, puisque c’est le seul des deux qu’on retrouve ici, « Ten Thousand Ways To Die ».
Mais la composition, comme l’affirme Trevor Peres, n’est pas un processus facile, plutôt un accouchement dans la douleur, comme si les années passées empêchait toute péridurale pour que la souffrance se fasse encore plus ressentir.
« Comparé à Inked In Blood, niveau composition, c’est un peu la même chose, cette façon de commencer à écrire et de structurer. Ça a toujours été la même chose, depuis le début. Mais c’est de plus en plus difficile de se pointer avec quelque chose de frais et de nouveau. Un truc accrocheur et fait pour durer. Et ça, c’est de plus en plus compliqué à obtenir ».
Et il a raison le guitariste, puisque Obituary n’est ni frais, ni nouveau. Encore moins que d’habitude serais-je tenté de dire. Et produit/enregistré et mixé par Joe Cincotta, ça donne un résultat encore plus proche des origines que n’importe quel truc qu’ils ont pu sortir depuis.
On le sait, les derniers albums sont une sorte d’escalier vers les enfers. Personnels et collectifs, avec un renouveau un peu foireux sur Xecutioner’s Return, un pénible effort de recentrement sur Darkest Days, et une ombre salvatrice baignant Inked In Blood.
Mais Obituary continue sur la pente ascendante, et perfectionne le retour en arrière. Car OBITUARY, groupe de présent et d’avenir, ne fait que regarder en arrière pour tenter de se replonger dans sa propre légende, et retrouver l’essence morbide de ses deux, trois premiers méfaits en décomposition.
Et pourtant, toujours plus frais que la majeure partie de la production du cru.
Magie, occultisme ?
Non, travail qui porte ses fruits, et pas des oranges…
J’aurais beau jeu de comparer ce dixième album studio à la triplette de base des Floridiens. Même son, même approche, même respiration putride, et je vais donc le faire. Car cet anniversaire légal est en fait un retour aux sources qui suggère un panaché superbe des trois premiers délits mortuaires de la bande à John Tardy. D’ailleurs, lui-même s’en est rendu compte, et hurle comme jamais. Module dans les médiums, exagère les graves, abuse des hurlements de fin de vers, et grogne à l’envers, étouffé par des chœurs morbides.
Les riffs sont souvent groovy, mais toujours noirs comme des yeux qui fixent le plafond de bois de quatre planches souterraines, et la rythmique n’a pas changé d’un pouce.
D’ailleurs, elle semble rajeunir sur des morceaux aussi barbares que les introductifs « Brave » et « Sentence Days », qui visiblement se font une joie macabre à renifler les émanations Floridiennes de la fin des années 80. Deux charges frontales, dont la première est sans pitié, animée d’un Thrash radical et rude, qui cavale comme un porteur de cercueil qui vient de le faire tomber.
C’est trapu, couillu, et ça place la barre de la qualité beaucoup plus haute qu’on aurait pu le penser. Mais OBITUARY, c’est aussi ça, et pas seulement des lancinances qui foutent les miquettes, bien qu’on retrouve évidemment ce côté lourd et malsain sur une bonne partie du disque.
Alors, le parallèle que tout le monde attend, on le tente ou pas ? Obituary vs Slowly We Rot ? Il y a un peu de ça, même si seul le temps dira si les deux œuvres se rejoignent quelque part, mais la comparaison n’est pas si osée que ça finalement.
On parlera plus d’un survol du sacro-saint triptyque Slowly/Cause/The End, avec même une bordée de soli mélodiques entre deux éructations tardyiennes, et évidemment ces sempiternelles révérences à l’entité FROST sur « Turned To Stone », l’aspect le plus craspec et lourdaud du quintette. C’est glauque, et pourtant ça chaloupe grave sur les guitares comme si OBITUARY ne pouvait pas s’empêcher d’être catchy même quand il dérange et obsède de son emphase.
Et en évacuant le cas déjà connu de « Ten Thousand Ways To Die », ça nous laisse avec dix autres morceaux dont trois que nous avons déjà abordés.
« End It Now » et ses coups rythmiques impitoyables sur les cervicales, sa double grosse caisse qui brise les os, et son avancée progressive qui lâche une fois encore des licks irrésistibles et déhanchés. « Betrayed » et sa syncope sur laquelle John se démène comme un beau diable dans sa morgue, haranguant les cadavres pour les exhorter à fêter son retour.
« It Lives » et son intro qui souffle le moisi comme « Slowly We Rot » ou « ‘Til Death » le faisaient déjà à l’époque. « Straight To Hell » et ses cassures qui font plier l’échine avant de la briser sur un riff digne de Tom Warrior, ou « No Hope » et son mid dominé de la frappe de Donald et des heurts de basse de Terry Butler, un autre gardien de la flamme.
Et finalement, tout ça sent bon, parce que ça sent très mauvais, comme un cadavre qui perd ses chairs dans un caniveau de Tampa…L’image vous rappelle quelque chose ? Bien sûr que oui, vous étiez peut-être déjà là vous aussi, comme moi, à regarder ce corps fondre dans les immondices d’une ville qui n’était alors pas forcément prête à affronter une mort aussi longue et douloureuse. Mais la mort est comme OBITUARY, elle est lente, elle prend son temps, mais finit toujours par vous rattraper.
Un jour, ou l’autre, ou une nuit.
Obituary est ce qu’OBITUARY a sorti de plus convaincant depuis très longtemps. Il est la notice nécrologique d’un groupe bien vivant qui assume son passé tout en continuant d’avancer, comme une fin inéluctable qu’on espère la plus Tard(y)ve possible.
Peut-être pas forcément un chef d’œuvre complet, un peu manqué parfois, un peu facile de temps à autres, mais un constat de bonne santé de cinq praticiens qui connaissent leur boulot.
Du Death à l’ancienne, mais plutôt, du Death à la OBITUARY, puisqu’ils sont les seuls à le jouer comme ça.
D’ailleurs, ça se voit jusque sur cette fantastique pochette. Un nom, un logo, un fond noir le tout signé de la patte d’Andreas Marschall, et rien d’autre.
Car c’est ainsi que les plus grandes légendes se construisent. Sur leur simple nom. Et des faits évidemment. Une musique, un ressenti.
Le soleil de Floride et les gaz putrides qui s’échappent du cadavre d’un Death Metal qui n’en finira jamais de se perpétrer à travers ses propres créateurs.
Titres de l'album:
J'ai réussi à dégoter le numéro 2 (improbablement sur Vinted...).Si une bonne âme veut se désister ou a un bon plan pour le #1... ... ...
16/04/2025, 10:47
Soit dit en passant ceux qui étaient a Anthrax au Zénith il y a quelques mois ont dû prendre un sacrée branlée ! Un groupe doté d'une pêche d'enfer et qui a mis la salle a genoux direct sans temps mort. Tuerie que bien des jeunes peuvent re(...)
15/04/2025, 18:28
Moi j'aime bien les masques ^^. Ils tombent lorsque la personne se révèle ne pas être en connaissance d'éléments de contexte et se permet d'émettre des généralités sans savoir ni approfondir le genre décrié(...)
15/04/2025, 17:29
Il faut évidemment attendre l'album complet, mais le titre a été composé par Jim Durkin avant sa mort. Ceci étant dit; j'espère que l'album en question sera d'un autre niveau, parce que le cahier des charges de tous les reproches que j(...)
15/04/2025, 16:56
@Gargan, non malheureusement, je n'ai pas pu y aller. Je m'en mords encore les doigts...
15/04/2025, 16:51
On peut avoir tourné la page, écouter des nouveaux trucs, mais se faire un kiff en réécoutant ou en allant voir les anciennes légendes d'un style selon moi. L'un empêche pas l'autre. Alors oui c'est des papis (encore que Slayer sur sc&e(...)
15/04/2025, 08:56
Imagine un concert avec Maiden Slayer Megadeath et Metallica, imagine à quel point se serait de la merde.
15/04/2025, 08:17
Et va te faire foutre avec ton histoire de masque à la con, comme si je cachais quelque chose.
15/04/2025, 07:56
J'en ai juste marre des nostalgiques à la con qui sont incapables de tourner la page. Tu aurait une reformation avec tout les membres de ton groupe que tu aimais ado en fauteuil roulant que tu aurais un public pour dépenser 500 balle le ticket. Oui c'est à charge..
15/04/2025, 07:52
Les masques tombent. Je vois. Ton post n'a donc aucune crédibilité vu que c'est à charge. On se demande donc bien quel est son intérêt ici. Un mystère de plus. Comme si moi j'allais poster sous un groupe ou sous un style dont je me balec. Br(...)
15/04/2025, 06:37
Tu as des mecs qui déboursent une fortune pour aller voir les vieillards de Black Sabbath jouer péniblement, à un moment il faut tourner la page désoler, pareil pour Maiden et compagnie.
15/04/2025, 05:15
Oh mais si ça ne tenait qu'à moi tout ce qui est heavy ou thrash speed et compagnie c'est poubelle. On a poussé le metal plus en avant, ces reculs nostalgique d'adulescent c'est pas pour moi.
15/04/2025, 05:06
On reconnaît quelques intonations de Rinehart mais a l'instar de Doty, qu'on a pu entendre sur des réenregistrements, ça sonne pas terrible. Bon attendons tranquillement l'album.Par contre pas d'accord avec les posts précéde(...)
14/04/2025, 17:28
Je rejoins en partie Arioch91...le chant? Et la production? Ca manque d'âme je trouve, en tout cas si je compare à "Darkness Descends" ( oui, c'est le seul album que je connais d'eux....)....
14/04/2025, 14:35
Un petit message hors sujet mais bon, je regrette en effet la disparition du Fall of Summer...
14/04/2025, 14:30
Bon ça me parle déjà plus que leurs dernières sorties, on retrouve un peu d'adhérence dans les guitares, à voir !
14/04/2025, 07:29
La différence de style n'est pas surprenante, ils n'ont jamais refait le même album. Mais ça rend mou, fatigué, sans inspiration... et décevant après une si longue attente. Espérons que le reste soit meilleur.
13/04/2025, 12:10