Vous admettrez qu’en 2017 (mais depuis longtemps finalement), jouer une musique novatrice tient d’une gageure que très peu de groupes ont la capacité de relever. A vrai dire, ils sont même de plus en plus rares, se concentrant sur une ou plusieurs obsessions rassurantes, plutôt que d’essayer d’emmener les choses plus loin, en jouant plus fort, plus nuancé, plus métissé, et surtout, plus décomplexé.
Car finalement, verser dans l’inédit n’est pas chose impossible, il suffit pour cela d’oublier. Oublier ce qu’on joue pour se concentrer sur ce qu’on ressent, sans se demander si telle ou telle approche a déjà été tentée ou pas. Et quand bien même le cas se présente, est-ce vraiment si important que ça ?
On connaît bien le principe du crossover et de la fusion, encore faut-il que ces deux concepts s’éloignent des préceptes d’origine. On peut aussi laisser son imagination divaguer sans atteindre un rivage bien défini, et finalement, dériver sans jamais atteindre son but.
Ou on peut faire ce qu’on veut sans se poser de question, et être suffisamment créatif pour oser des mélodies un peu plus organiques et désincarnées, des rythmiques concassées mais fluides, et des amalgames tout sauf faciles qui nous entraînent dans un monde parallèle.
Et c’est précisément cette option que les Hollandais de MNHM ont choisie, sans vraiment l’affirmer ou le vouloir.
MNHM, c’est un quatuor (anciennement MANNHEIM) débarqué d’Arnhem, Pays-Bas, qui sur le papier, combine les digressions spatiales du Post Rock et la complexité rythmique du Mathcore. Sauf que dans les faits, rien n’est aussi éloigné de la vérité.
Apparus sur le devant de la scène via un impressionnant premier album, Super-Empowered qui en avait perturbé plus d’un, les quatre bataves ont continué leur travail d’expérimentation pour se rapprocher d’un absolu dont ils sont les seuls à connaître les limites.
Bien que plaisantant sur leur style qui reste flou, et le brossant ironiquement comme du « Noisy Spacedoom with a hint of saxophone », ils restent d’un sérieux imperturbable pour explorer les confins de l’expression musicale aussi harmonique et harmonieuse qu’elle n’est dissonante et perturbante.
Si les mélodies qui constellent les neuf pistes de cet Of Empires Past sont somme toute assez cohérentes dans leur fil rouge (à tel point que la première moitié de l’album donne le sentiment d’un ad lib ininterrompu), le travail de déconstruction rythmique est assez fascinant, un peu comme si les morceaux n’avaient pas d’ossature fixe et flottaient dans une apesanteur musicale troublante. Mais loin de se montrer complaisants dans leur mode d’interprétation, les MNHM font preuve d’une intelligence rare pour vous emmener sur de fausses pistes de facilité tout en glissant dans vos oreilles des idées vraiment novatrices qui nécessitent une attention particulière pour être devinées.
Si l’on pense à des actes Post comme les ZEUS ! sur certaines inflexions typiques, Of Empires Past ne s’insère toutefois pas dans le paysage Post comme un caméléon sur une branche. Loin de privilégier la contemplation dans l’unicité, les MNHM varient les tons, passant de pastels à des couches sombres, et flirtent avec la violence pour se rapprocher d’une bande-originale de film non existant pour dérouler sous nos yeux le paysage admirable d’une planète inconnue, à l’atmosphère respirable mais quelque peu euthanasiante dans l’euphorie.
Ainsi, le très développé « How Things End » se laisse porter par un motif circulaire agissant comme une communication entre l’émetteur et le réceptacle (vous-même), qui ondule selon les choix harmoniques, et qui se repose sur un rythme martial emphatique digne d’un Glenn Branca débarrassé de ses obsessions occultes et absconses.
Tout semble si naturel qu’on se demande même pourquoi tout ça n’a pas été fait avant, mais il est facile de comprendre que seuls ces musiciens en étaient capables.
Cette cohabitation de violence et d’apaisement se renforce au fur et à mesure de l’avancée de l’album, atteignant parfois des sommets comme à l’occasion de « Rule Of Law » qui se rapproche même d’un Post Black vraiment cathartique et strié d’arrangements sonores. Rythmique plombée et basse malmenée, guitare qui tronçonne des riffs saignants, avant qu’une sublime pause impromptue ne laisse un saxo éthéré nous guider vers un monde ou la noirceur et la lumière aveuglante cohabitent sans se gêner l’un l’autre ou atténuer leurs effets respectifs.
Evidemment, la trame mélodique garde l’empreinte qu’elle assumait dès l’entame de l’album, mais elle est subtilement modifiée et transformée par petites touches, ce qui permet à ce deuxième album d’offrir une progression constante et délicate qui nous transporte avec attention vers d’autres horizons.
Enregistré et mixé par Rocky O'Reilly aux Start Together studios de Belfast, et masterisé par l’immanquable Brad Boatright à l’Audiosiege, Of Empires Past offre un regard en arrière qui projette en avant, évitant la nostalgie qui plombe bon nombre de réalisations du même créneau, et se veut anticipation d’un destin musical qui finalement ne pourrait appartenir qu’aux Hollandais, et à leurs fans les plus fidèles.
Production très spéciale et spatiale, espaces négatifs et positifs qui se superposent et interfèrent, et qui aboutissent parfois à d’étranges constructions instables (« Superior Grace », rythmique puissante sur litanies harmoniques en intermittence), guitare prise soudain d’un accès d’expressionisme Post Rock incontrôlable (« Enforce – Embrace », l’un des plus classiques du lot, si tant est que ce terme puisse être pertinent dans leur cas), et final brumeux aussi Ambient qu’il n’est conclusion logique d’un voyage irréel (« Coronation », strates de sons accolés qui fournissent un final en symphonie de poche), Of Empires Past n’est en fait pas le testament d’empires anciens agonisant sans testament, mais point de départ d’une aventure dont nul ne connaît encore les tenants et aboutissants, et qui flotte dans la stratosphère du Post Metal sans en adopter les mouvements les plus symptomatiques. Certes, les thèmes laissés libres et travaillés à l’instinct en sont des tics assez prononcés, mais la logique et la cohérence dont font preuve les MNHM, et ce refus de tomber dans la contemplation stérile en assumant la violence sans la laisser exploser en font des individus aux objectifs troublants, qui utilisent et détournent le Post Metal pour le mouler à leur guise.
Il est certain que la patte expérimentale et l’approche instrumentale en rebuteront certains, mais si vous ne rechignez pas à vous perdre dans un monde inconnu qui déclenchera en vous des sensations nouvelles, alors Of Empires Past est le genre de trip qu’il vous faut.
Sans carte, sans téléphone ni idées téléphonées, et sous un ciel aussi étoilé qu’orageux. Mais il faudra faire preuve d’abnégation pour accepter de partir sans savoir comment revenir.
Titres de l'album:
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