Dimanche après-midi, temps gris, ciel plombé et pluie à demi battante, le genre de climat feutré un peu tristounet propice à une certaine forme de nostalgie…
On se réfugie dans les souvenirs, ceux de l’enfance parfois, de l’adolescence la plupart du temps, ou d’un âge adulte aussi loin qu’il n’est proche des yeux…et des oreilles.
On le sait, les nineties on soit disant « ruiné » les mécènes Metal qui s’en mettaient plus dans les poches que dans nos rêves soit dit en passant. Pourtant, de cette décade rongée jusqu’à l’os par l’Euro dance et les boys band, on retiendra évidemment le « Grunge », ce faux style en faux ami qui nous a pourtant apporté le meilleur (NIRVANA, ALICE IN CHAINS, PAW, MILK), mais aussi ce Rock alternatif qui envahissait les college radios au point de forger dans l’acier de nouveaux héros, plus dépenaillés, mais plus portés sur les chansons que l’attitude.
C’est un peu cet enseignement à postériori que les Américains de BIG JESUS souhaitent nous rappeler avec leur premier album qui fleure bon les campus US de 95/96. Ces années où les guitares évasives avaient remplacé les carillons de R.E.M sur les ondes des logements étudiants, ou les SMASHING PUMPKINS nous balançaient trois albums impeccables sous la houlette rigide du tyran Corgan, et où le chant éthéré de Chino n’allait pas tarder à contaminer la planète teen de ses dialogues abscons avec le ciel.
DEFTONES, SMASHING, mais aussi les INSPIRAL CARPETS, les SONIC YOUTH toujours, MY BLOODY VALENTINE encore un peu en écho des 80’s, et puis d’autres, les SHIHAD, les AFGHAN WHIGS, en gros, des trucs à traquer en dehors de notre terrain de chasse Metal si privilégié, mais si étriqué à l’époque, encore trop figé sur les gros riffs éculés et autres psalmodies cryptiques démoniaques.
Il est difficile de croire qu’on puisse encore tomber sur ce genre d’album en 2016, et pourtant, ces originaires d’Atlanta ont réussi le pari de nous ramener vingt ans et plus en arrière, lorsqu’en allumant la radio on risquait encore de tomber sur un « Cherub Rock » ou un «Would ».
Oneiric. Enlevez le « e » et vous obtenez la clé de ce premier LP, constitué en fait de quatre morceaux du EP précédent, One, et de nouveaux titres tout aussi efficaces et délicats. Onirique donc, de la volonté même de CJ Ridings et Thomas Gonzalez (guitares), Spencer Ussery (chant, basse) et Joe Sweat (batterie), qui sont parvenus à convaincre le talent naturel de Matt Hyde (DEFTONES, SLAYER, MONSTER MAGNET et bien d’autres aussi réputés) afin qu’il produise leur disque, en ayant le sentiment de flotter en rêve coutumier. Le rêve, la réalité, la vie, le reste, sont donc les obsessions d’Oneiric qui semble planer d’une autre époque avec ses lourdes guitares plaquées sur des mid tempi cotonneux en écho un peu sourd, mais qui savent aussi se souvenir des riffs les plus dangereux d’une décennie qui avait décidément beaucoup de mal à faire la part des choses entre le songe et la réalité, entre la brutalité et la douceur, entre la mélodie et la fureur.
A l’écoute de ces dix chansons, toutes aussi soignées les unes que les autres, on se prend à ressentir l’herbe des jardins de la fac sous ses pieds, un soir de mai, en pleines révisions. On se souvient d’avoir adoré ces nouveaux venus sans avoir honte de toujours rester accro à ses racines, et de trouver que cette jonction entre « Rock alternatif » et « nouveau Metal » était bien agréable finalement.
On écoute ces dix titres, et on replonge dans Gish, dans Adrenaline, dans Killjoy dans une moindre mesure, et on reprend celle qui superpose dans un même click des guitares apaisées mais colériques à la fois, et surtout, une voix semblant émerger des nuages (incroyable travail pur de Spencer Ussery qui parfois prend des intonations spectrales et féminines envoutantes), qu’on suit comme celle du joueur de flute guidant les rats hors de la ville.
En privilégiant un format court et presque Pop, les BIG JESUS et leur nom en boutade ont fait le bon choix. Pas de perte de densité ni de dynamisme, et surtout, une suite logique que rien ne vient interrompre, et surtout pas la monotonie, malgré le climat cotonneux ambiant.
Car la violence n’est jamais loin, même évoquée en pointillés de guitares ondulantes (« Shrimp »), et même à l’opposé au premier plan, crevant l’écran d’un Punk lapidaire catapulté hors des draps par un up tempo rebondissant (« Shards »).
D’ailleurs, le groupe assume ses tendances agressives dès l’entame « SP », et difficile à ce moment-là de ne pas repenser très précisément aux débuts des SMASHING PUMPKINS, tant le riff rappelle l’attaque de James Iha et le chant celui très évaporé et asexué de Billy Corgan. Mais loin d’être un plagiat, ce morceau et son optique résultent plutôt d’années passées à digérer des influences qu’on finit par régurgiter naturellement au moment de concevoir sa propre musique…
On essaie souvent de ne pas trop se frotter aux quatre minutes trop traînantes pour ne pas laisser de traces sur l’oreiller en bougeant sa tête d’un sommeil paradoxal trop agité (« Always », qui pense très fort aux sœurs Deal et même à Chino Moreno), mais on tente quand même de prolonger les images en durcissant le ton pour quelques secondes supplémentaires délicieusement décalées et arythmiques (« Oneirica », un peu STONE TEMPLE PILOT de Core sur les bords du lit, et JANE’S ADDICTION sous la couette).
Des empreintes de NIRVANA plein les poignées de porte pour aller dans la salle de bain, déjà occupée par les DEFTONES (« Fader », plus Around The Fur que nature), et finalement un final en paupières à demi closes qui ose le riff à la FEAR FACTORY pour mieux fracasser le radio réveil sur le poster des SILVERSUN PICKUPS (« Heaviest Heart », sept minutes de libre arbitre qui ramène doucement au quotidien…)
Je ne le cacherai pas, écouter un tel disque à notre époque est un pur bonheur, qui pourrait bien réconcilier quelques fans égarés avec les derniers albums des DEFTONES, un peu boudés. Il est en effet possible de s’y retrouver en écoutant les vagues ondulantes des BIG JESUS qui n’ont pas la mémoire courte et se souviennent de leur nineties avec affection.
Un rêve prenant, qui cite dans le texte les souvenirs d’antan, et qui surfe sur une nostalgie tranquille. Oneiric est un album qui en mélange bien d’autres dans les carnets de notes de notre entrée dans l’âge adulte, et qui offre une performance remarquable, dans tous les sens du terme. Un peu Shoegaze, un peu alternatif, sans le côté péjoratif, parfois Metal, mais toujours violent, calme et musical.
Et la journée se termine dans le gris... Mais il est bon parfois de fixer son regard sur un ciel noir pour affronter sa peur de vieillir, tout en sachant qu’on restera toujours jeune quelque part en écoutant une telle musique qui transforme nos jours de pluie en si belles nuits.
Titres de l'album:
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