Le petit monde du Death technique est constamment en ébullition. Deux écoles s’affrontent, les traditionalistes d’un côté, et les innovateurs de l’autre. Les premiers lisent les partitions telles qu’elles sont écrites, complexes, fouillées, parfois inextricables. Les autres écrivent leur propre partition, et s’éloignent des gammes rebattues. C’est certes un choix dangereux, mais qui peut s’avérer bien plus enrichissant qu’une énième randonnée le long des gouffres de la démonstration. Les allemands d’INGURGITATING OBLIVION font partie de cette seconde catégorie, et ce, depuis leurs débuts. A tel point qu’on peut parfois douter de leur allégeance au genre.
Mais quelle importance ?
Norbert Müller (guitare/ingénieur du son/masterisation et logistique d’enregistrement) et Florian Engelke (guitare/composition/bols tibétains) sont loin d’être des novices. Plus de vingt ans au service d’une musique pointue, exigeante, voire élitiste - n’ayons pas peur des mots - mais surtout personnelle, innovante et terriblement créative. Après trois albums qui ont suscité bien des vocations dans le landerneau du Death Metal abscons et technique, le duo s’est donc plongé corps et âme dans la composition et l’enregistrement pour accoucher d’une montagne de plus d’une heure et treize minutes, sobrement baptisée Ontology of Nought.
Si la phase de préparation est encore une chasse gardée, la phase d’exécution a quant à elle été partagée avec des éléments extérieurs, que nos deux amis citent avec honneur. Ainsi, Lille Gruber (batterie, DEFEATED SANITY), Ava Bonam (chant), Chris Zoukas (basse, MENTALLY DEFILED, SACRAL RAGE, VIOLENT DEFINITION), Céline Voccia (piano), Daniel Agi (production, flûtes), Jan Ferdinand (vibraphone, guitare) et Tom Fountainhead Geldschläger (guitare solo) sont venus enrichir un son déjà très dense, pour apporter un peu d’oxygène à cette plongée en apnée dans le marasme psychologique aux allures de labyrinthe sans sortie.
En cette occasion, Ontology of Nought rompt avec toute mesure, et se lâche au long de cinq compositions épiques, dramatiques, chaotiques et parfois cacophoniques. Décomposées en plusieurs mouvements, à l’image d’un Classique désacralisé, ces cinq longues suites aux intitulés en gigogne passent par tous les climats, toutes les ambiances, alternant entre la douceur d’une Fusion jazzy harmonieuse et la brutalité d’une Avant-Garde à la DODECAHEDRON ou DEATHSPELL OMEGA.
Le décor est donc planté, et je me dois de vous mettre en garde. Si vous choisissez de franchir ces gigantesques portes, aucun retour en arrière ne sera possible. Il vous faudra suivre la route jusqu’au bout, sans reprendre votre souffle ni marquer de halte.
Je ne cache pas avoir été salement impressionné par l’univers dessiné par les allemands. Pourtant rompu à l’exercice de l’expérimental et du biscornu, j’ai perdu mes repères, et cette sensation s’est avérée enivrante. Il m’a fallu attendre le marathon « To Weave the Tapestry of Nought » pour vraiment m’immerger dans les eaux troubles de l’œuvre, mais ce long morceau envoutant a agi comme un catalyseur d’émotions, oscillant entre la quiétude et la contemplation et le chaos le plus atroce. Séparé en plusieurs parties assemblées par un concept global, ces presque vingt minutes d’expiation technique sont un achèvement à part entière, alors même que ce quatrième longue-durée en contient cinq fois plus. Ce qui est plus que brillant.
Epoustouflant.
Les berlinois empruntent donc dans divers poches les éléments de leur imagination. Si l’option principale reste en terrain extrême - et même à l’extrême de l’extrême - quelques inflexions témoignent du passé Krautrock du pays, et d’autres de sa domination Thrash des années 80. Mais globalement, les ingrédients sont si bien mélangés et assimilés qu’on appréhende le goût comme étant unique. Et méchamment relevé.
Toutefois, je n’ai pas envie de tout vous révéler. La surprise étant l’un des éléments les plus importants dans ce genre d’entreprise, il vous conviendra de découvrir les merveilles brutales par vous-même. « The Blossoms of Your Tomorrow Shall Unfold in My Heart » qui annihile vos sens pendant dix minutes se réserve quand même un dernier espace positif avant de s’évanouir dans les airs, et incarne la facette la plus dure d’un travail en solo accompli et versatile.
Mais mon cœur a vacillé à l’écoute du monstrueux et immonde « The Barren Earth Oozes Blood, and Shakes and Moans, to Drink Her Children's Gore », structure mouvante aux fondations meubles, qui une fois encore vient titiller le chronomètre pendant près de vingt minutes. Cet épilogue dantesque et gargantuesque est à la hauteur des enjeux, et mêle une fois encore le Death technique, le Black Metal indicible, la Fusion équilibriste et la cacophonie maîtrisée.
Doté d’un son qui carbonise la concurrence, constellé de soli que le grand Chuck n’aurait pas reniés, parsemé de petites trouvailles de génie du mal, Ontology of Nought est un colosse aux pieds de titane, qui écrase tout sur son passage. Il est même possible de voir en lui la quintessence même du style, qui connaîtra un avant et un après. Sans vouloir jouer les oracles amateurs bien sûr.
Titres de l’album:
01. Uncreation's Whirring Loom You Play with Crippled Fingers
02. To Weave the Tapestry of Nought
03. The Blossoms of Your Tomorrow Shall Unfold in My Heart
04. ...Lest I Should Perish with Travel, Effete and Weary, as My Knees Refuse to Bear Me Thither
05. The Barren Earth Oozes Blood, and Shakes and Moans, to Drink Her Children's Gore
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