La triste année 2020 s’est achevée dans le marasme le plus complet, mais aussi dans les espoirs les plus fous. Après avoir connu des mois d’isolation et de peur, le monde s’ouvrait sur des perspectives certes peu réjouissantes, mais les peuples semblaient enfin comprendre que le monde de demain ne devait surtout pas ressembler à celui d’hier. Et alors que la plupart des acteurs artistiques épongeaient leur ardoise avec tristesse, faisant de grosses croix sur leurs projets antérieurs, 2021 s’annonçait comme l’année de la transition, avec éventuellement une reprise des activités normales et une remontée sur scène totalement logique. Aujourd’hui, alors que 2021 est déjà entamée, nous avons déjà compris que les lendemains promis ne chanteront pas plus que les hier incompris. Les festivals d’été commencent déjà à s’annuler d’eux-mêmes, malgré les cris d’alarme des promoteurs et organisateurs interpellant le pouvoir en place sur la tragédie, et les mois que l’on s’apprête à vivre sont pour l’instant placés sous le signe d’une menace permanente, celle d’un nouveau confinement achevant les petits commerçants et les intermittents du spectacle. Mais 2020, en ses derniers râles, a proposé une autre histoire, que je me propose de vous rapporter aujourd’hui.
Avec mes centaines de chroniques par an, et ma passion dévorante pour le Thrash, je peux me targuer de traiter la grosse majorité de la production, y compris les produits les plus enfouis dans l’underground. Mais il arrive de temps à autres qu’un album échappe à ma vigilance, certainement remplacé dans ma playlist par une œuvre beaucoup plus dispensable. Et il m’aura fallu attendre février 2021 pour découvrir un album exceptionnel paru le jour même de mon anniversaire, et proposé par les italiens de DOWNFALL.
Fondé en 2007 du côté d’Ancône, DOWNFALL est un quatuor au line-up assez instable, qui ne compte plus dans ses rangs que deux membres d’origine, Federico Natalini (basse/chant) et Simone Medori (batterie). A cette section rythmique solide s’ajoutent deux guitaristes, Matteo Luconi, en place depuis 2011 en tant que soliste, et Davide Francesconi, fraichement arrivé en 2019. Depuis leurs débuts, les italiens ont offert à leur public deux EP’s solides, un premier éponyme en 2011 suivi d’un lapidaire Globalized Anger en 2014, avant d’enfin oser le pas du longue-durée avec Punishment for the Infidels en 2017. Ce premier LP faisait montre d’une certaine obsession pour le SEPULTURA le plus classique des années Beneath The Remains/Arise, et montrait des qualités formelles indéniables dans la violence. Quatre ans plus tard et un nouveau membre dans l’équipe, DOWNFALL s’est plus ou moins éloigné de cette influence un peu envahissante pour plaquer son deuxième effort dans la foulée, et développer un concept classique, mais toujours efficace dans la dystopie.
Encore une fois, nous avons droit au sempiternel conflit men vs machines, et alors que l’homme s’est perdu dans la technologie, il doit maintenant se battre contre une entité industrielle qu’il a lui-même créé. Sous des airs de Terminator revu et corrigé Thrash, Passive Regression se place dans un contexte assez traditionnel, contexte facilement transcendé par une musique extraordinairement violente et concise. Si l’ombre du SEPULTURA le plus échevelé plane encore bas au-dessus de la création, d’autres références pointent le bout de leur nez, comme EXHORDER, DEMOLITION HAMMER, mais aussi MESHUGGAH, les musiciens utilisant à plein leur potentiel pour nous offrir des parties rythmiques assez dingues et empreintes de Jazz. Mais loin de l’Indus calibré, du Mathcore déséquilibré, ou du Djent trop clinique, Passive Regression propose une intensité Thrash/Death rarement atteinte, même l’année dernière qui battait pourtant des records en termes de production massive.
On trouve au menu de cet album tout ce qui fait la force de l’union sauvage entre Thrash et Death depuis les premiers albums pondus dans les années 80. En unissant la précision de Fredrik Thordendal, la fureur d’INCUBUS et la démence globale des CRIMSON SLAUGHTER (« Spiritual Extirpation »), nos amis transalpins signent l’un des manifestes les plus rageurs de cette année 2020 en prenant le contrepied de la tendance normaliste de l’école old-school. Alors que les représentants Crossover les plus traditionnels se contentent de recycler quelques riffs usés pour les remettre plus ou moins au goût du jour, les DOWNFALL jouent le jeu dangereux de l’exubérance la plus totale pour nous enflammer les tympans d’une musique sans compromis illustrant fabuleusement bien son concept.
Sans se perdre dans des errances évolutives trop ambitieuses, Passive Regression propose au contraire des chapitres courts et incroyablement percutants, parfois plus mélodiques que la moyenne et ambiancés (« By-Products » qui nous ramène à l’époque bénie du SEPULTURA de Chaos AD), mais le plus souvent lapidaires et cruels (« Dam », aux courts blasts vraiment effrayants). Musicalement irréprochable, d’une interprétation au biseau, ce second long frise donc la perfection dans un style qui ne supporte pas la demi-mesure, et libère les démons pour la concrétisation d’une vision, celle d’un monde déshumanisé dans lequel l’homme doit chèrement défendre sa peau contre l’acier des machines.
Et en s’arrêtant pile au-dessus des quarante minutes, les quatre italiens ont pris le bon chemin, celui de la concision. En effet, au jugé de son intensité, une trop longue prolongation aurait plongé le projet dans la répétition, d’autant que le groupe exprime toutes ses idées dans ce temps imparti. On reste bluffé par cette vitesse de croisière qui turbine à la Beyond the Unknown, par la hargne d’un chanteur bassiste qui hurle à s’en cramer les poumons, et par l’efficacité de l’usine à riff d’un duo de guitaristes qui n’ont pas les idées dans leur poche. Résultat, une branlée monumentale, qui replace les choses dans leur contexte. Isolés de force, les musiciens ont dû renoncer à leurs aspirations les plus vivantes pour se focaliser sur la création, et ainsi, proposer des albums de cette qualité. Le seul regret après avoir terminé l’écoute de cet album, est de ne pas pouvoir imaginer la boucherie live qu’il est susceptible de produire.
Pour 2022 peut-être ? A condition que d’ici là, le monde ne soit pas tombé du côté obscur.
Titres de l’album:
01. Signal 2.2.4
02. Deadlock
03. Forced Shelter
04. Deliverance
05. Shattered
06. Spiritual Extirpation
07. Scars of Rebirth
08. Dam
09. Progressive Decline
10. By-Products
11. FBE
12. Terminal
Belle découverte ! ça fait longtemps qu'un disque du genre ne m'a pas autant plu !
Mouuuais...
Au vu de vos avis dithyrambiques, je me suis donc penché sur ce bazar que je ne connaissais pas du tout :
Je n'y ai absolument rien trouvé de ce que vous a fait frissonner les gars.
Cela m'a fait penser à du Deathcore.
J'avais hâte que l'album se termine pour passer à autre chose...
Ca dépote ! Mais ça, je le dis souvent, j'écoute l'album et souvent, je finis par dire : next !
Donc je vais pas m'emballer et écouter l'album plus en détails avant de me prononcer.
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