L’été sera chaud, si l’on en croit les températures plus que clémentes du mois de juin, et la sueur risque de perler dans les t-shirts et ruisseler dans les maillots. Mais pas uniquement à cause de la météo. Certes, ce soleil persistant donnant lieu à des scènes de liesse sur les plages et autres zones de bronzage ou de rafraîchissement sera la cause de bien des émois, mais une autre source de chaleur entretiendra les faciès délicatement halés, soudainement transformés en plaies vivantes au troisième degré. La raison de cette fournaise très mauvaise pour la santé ? Le deuxième album des anglais de CONJURER, qui refusent de se parjurer avec ce Páthos, qui joue effectivement la carte de la flamme vitale soumise aux frimas d’une sensibilité exacerbée.
Rien ne saurait être moins adapté à cette saison que Páthos. Quatre ans après leur initial Mire, qui les avait fait remarquer de l’underground, les quatre originaires de Rugby, dans le Warwickshire (Dan Nightingale - guitare/chant, Brady Deeprose - guitare/chant, Conor Marshall - basse et Noah See - batterie, et dernier arrivé) continuent donc d’explorer les tréfonds les plus sombres de l’âme humaine, à grands coups de rythmique en chien de fusil et de riffs dissonants. Mire était un sacré coup de chauffe, j’en conviens, et tous ceux ayant découvert cet album à temps savaient qu’il fallait s’attendre à une secousse sismique avec sa suite. La seule inconnue étant l’intensité de la dite secousse, qui se devait de faire trembler non seulement la perfide Albion, mais aussi toute l’Europe.
Et après avoir encaissé les coups de boutoir de Páthos, nous avons tous compris que la bête revenait pour une entreprise de démolition massive, entre ogives nucléaires et tremblements de terre d’amplitude non mesurable sur l’échelle de Richter.
Entre PRIMITIVE MAN et SUMAC, entre Doom, Sludge, Noise, Post-Hardcore et tendances maladives la lame de rasoir aiguisée à la main, CONJURER retranscrit en sons les traumas de ses contemporains, concernés par cette fin du monde écologique, mais aussi ce dernier baroud d’horreur pour survivre quelques jours de plus. En découle un album aux sonorités évidemment sombres, aux intentions réalistes, et au contenu lourd, pesant, emphatique, cauchemardesque, et déviant des théories Doom pour épouser les contours d’un Death/Sludge nauséeux comme un prêtre devant administrer un bon millier d’extrêmes onctions.
La réalité que dépeint ce pathos générique et commun à tous est blafarde, terrifiante, oppressante et truffée de paranoïa. Dan Nightingale et Brady Deeprose sont allé fouiller au plus profond de leur haine de l’humanité les riffs les plus abrasifs, les plus discordants pour composer une symphonie de l’agonie que seul le Sludge peut traduire avec acuité, tout en restant musical, appréhensible par tous, et négociable sans renier ses intentions. « It Dwells » en ouverture, pose les bases d’une guitare Folk qui n’est pas sans rappeler les SWANS les plus récents, avant de dévier sur un univers rythmique chaotique, en écho de cris poussés à l’agonie. En quelques secondes, le quatuor anglais révèle sa recette, entre Death, Doom et Sludgecore, et prévient implicitement l’auditeur : ici, la souffrance règne en maîtresse, et aucun interstice n’est laissé ouvert. L’air est vicié, les harangues vocales écorchées, et la bande instrumentale écrasante de renoncement. En gros, le paysage est aussi laid que désolé, mais c’est le seul qu’il nous reste à admirer.
Enchainement de huit longs morceaux qui tergiversent entre les genres mais qui offrent un tout homogène et logique, Páthos se veut Proto-Post-Sludge, avec quelques touches de Black éparses, et une volonté Hardcore de ne pas travestir les faits. Si le son énorme met admirablement bien en avant la section rythmique, il affûte aussi les deux guitares qui se traînent le long de motifs déprimants, dépressifs et coulants comme des cordes au nœud correspondant. Cette laideur dans la gravité est la force de CONJURER, qui pourrait presque glisser vers un Drone musical lors d’épisodes presque Ambient, mais qui garde heureusement prise avec la réalité avec ces mélodies en garde-fou qui rappellent les moments les plus troubles de NEUROSIS et ISIS.
« All You Will Remember », petite merveille d’alternance, décrit les ambitions du groupe qui aujourd’hui souhaite faire partie des leaders. Ce sera chose faite très bientôt, et encore plus surement avec un troisième album de cet acabit. Car comment ne pas fondre pour le dantesque « Those Years, Condemned », épisode gargantuesque d’une saga sans limites, et quête individuelle pour le malheur collectif, où les baladins joyeux se transforment en oracles d’infortune ?
On ne saurait toujours pas définir avec précision la trajectoire des anglais, à cause de morceaux comme « Suffer Alone », entre Mathcore et Crust. On ne saurait toujours pas les ranger dans une petite case à cause de transitions maladives comme « In Your Wake » qui nous réveille d’un sombre cauchemar pour nous plonger dans un autre. Alors, autant accepter l’imprévisibilité d’un groupe qui joue avec les limites, qui utilise les effets à bon escient, et qui passe d’une soufflée du désert à un après-midi bucolique près d’une rivière. « Cracks In The Pyre », et son entame sublime de clarté et de pureté, laisse présager d’une fin de journée explosive, mais prend le temps d’être séduisant dans sa menace. Et en tant que conclusion d’un album presque parfait, se pose en épilogue impeccable.
Alors, certes, ce Páthos est le nôtre, nous n’avons rien fait pour l’éviter. Et à partir de maintenant, interdiction de se plaindre. C’est en tout cas le message que semble faire passer CONJURER au travers d’une œuvre unique et puissante, à recommander aux millénaristes qui en ont assez d’attendre une fin courue d’avance.
Titres de l’album :
01. It Dwells
02. Rot
03. All You Will Remember
04. Basilisk
05. Those Years, Condemned
06. Suffer Alone
07. In Your Wake
08. Cracks In The Pyre
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