Je connaissais déjà les PEACE, LOVE & PITBULLS, j’étais coutumier des slogans baillés béatement par la génération Woodstock, mais j’avoue que jusqu’à aujourd’hui, j’ignorais le concept du Peace, Love & Heavy Metal, qui dans les faits, est un petit miracle en soi. Et un miracle multiple s’il vous plaît, puisque non seulement ce groupe parvient à unir dans une même inspiration la puissance du Hard Rock et la souplesse fleurie de la Pop la plus chérie, mais il arrive en plus à donner le sourire au plus dépressif des huissiers de justice. Une sorte d’alternative fatale à la morosité ambiante, et surtout, une demi-heure bien plus efficace que n’importe quelle prescription d’antidépresseur massue. Et comme par hasard, ce combo au sang chaud nous en vient une fois de plus du nord de l’Europe, et assoit un peu plus la réputation d’une zone géographique à l’hégémonie artistique de plus en plus indiscutable. Mais puisqu’il faut bien en dire un peu plus pour vous allécher, quelle est donc la formule appliquée par les finlandais de DESTINY OCEAN ? Simple, une grosse dose de fun, une science de la composition exacte, et surtout, une pluralité de ton qui le confine à l’hétéroclisme absolu, puisque ces quatre fêtards devant l’éternel n’hésitent pas à piquer un peu partout de quoi meubler leur buffet. On trouve donc sur cet album des allusions directes au Hard Rock nordique le plus frais, des clins d’œil appuyés à la scène Rock la plus légère des seventies, des confettis, des ballons de baudruches, des tronches de cake fabuleuses, et puis un peu de Power Punk, des mélodies à s’en étouffer, et des refrains à reprendre en cœur dans la cour de récréation, entre les sandwich aux figues et la tranche de melon. Vous avez encore mis dans le mille Emile, ce Peace, Love & Heavy Metal est une sorte d’épiphanie Rock à lui seul, se permettant le luxe d’aligner pas moins de dix hit singles à rendre dingue n’importe quel Desmond Child de la création.
Fondé selon leur page Facebook en 2005, ce quatuor de dézingués du bulbe rachido-harmonique (Young Diamond - guitare/chant, Nikke - basse, Vilu Moukari - batterie/chœurs et Onni - guitare) n’a selon les sources que j’ai pu consulter sorti qu’un seul LP, celui que vous allez immédiatement écouter une fois cette chronique terminée. Et sans se montrer trop précis dans leur démarche, les finlandais admettent viser l’universalité, et donc chercher à fédérer les masses de leurs chansons efficaces aux motifs immédiatement mémorisables. Mais loin d’un produit putassier, ce longue-durée est une véritable mine d’or de tubes qui doivent autant aux seventies qu’à la scène Néo-Punk des années 90, tout en s’attifant d’un costume Hard-Rock taillé sur mesure. Et si l’ambiance est volontairement festive, ne vous attendez pas pour autant à une vaste blague de potaches en mal de coussins péteur, puisque tous les titres de cette livraison feraient le bonheur de bien des légendes encore en activité, qui ont oublié depuis longtemps comme satisfaire leurs fans avec une simplicité doublée d’un flair indéniable pour les gimmicks adolescents. Plus concrètement, vous pouvez tenter de visualiser auditivement une sorte de croisement géant entre les chapeautés et frangés de SLADE et SWEET, les bargeots de l’espace de THE DARKNESS, les maniérés précieux de QUEEN, les sales gosses anglais de THE STRUTS, les libidineux perruqués de STEEL PANTHER, les estivants tatoués de BLINK 182, et le lone man un peu crade ANDREW W.K, le tout sous couvert d’une Pop déchaînée payant son tribut aux grands des années 60 tout en louchant sur la décennie suivante. Un bal pas forcément masqué, puisque nos malandrins évoluent à découvert, mais surtout, un truc qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un Greatest Hits de la musique populaire mondiale de ces trente dernières années, avec le minimum d’humilité nécessaire pour ne pas passer pour des flagorneurs.
Alors, comme je l’ai dit, la combinaison est simple. Des couplets qui installent le décor, des refrains qui l’explosent, quelques soli pour combler les vides, et surtout, des prestations individuelles notables qui rendent l’effort collectif encore plus efficace. Et entre un chanteur qui n’hésite pas à surjouer, un guitariste qui riffe léger mais qui saccade lourd, et une section rythmique en caméléon qui s’adapte aux formes en accordéon, le tableau d’honneur est presque complet, et permet même d’excuser deux ou trois emprunts un peu trop évidents. Ainsi, d’une chanson à l’autre, on passe d’une franche rigolade à une party qui ne laisse personne en rade, flirtant parfois avec les DEF LEPPARD pour mieux draguer les DARKNESS (« Destiny Ocean »), tout en admettant que les STONES et QUEEN restent quand même deux des meilleurs groupes du monde (« Peace, Love & Heavy Metal »). Bien sûr, le côté excessif de la chose n’échappera pas aux plus attentifs, et la parodie n’est jamais loin, spécialement au niveau des lyrics qui n’hésitent pas à abuser des poncifs pour appuyer sur l’aspect populaire de l’entreprise. Mais il n’y a aucun mal à vouloir séduire le plus grand dénominateur commun, surtout lorsqu’on le fait avec autant d’exubérance, et comme les DESTINY OCEAN n’hésitent jamais à en faire des tonnes, tapant dans le dos de Bowie pour mieux tripoter le boa de Marc Bolan, on se prend au jeu sans faire le difficile, d’autant plus qu’en trente-cinq minutes, les finlandais ne prennent pas le risque de lasser. Simple, ils ne veulent pas nous avoir à l’usure, mais bien à nous mettre dans leur poche sur l’instant, et dès « Electric Dynamite », tout est en place, les percussions à la « I Want Candy » de BOW WOW WOW, la guitare qui n’hésite pas à strier le son clair pour adoucir la distorsion, le falsetto de chanteur d’opérette Metal, et la magie opère, sans que l’on ne puisse rien y faire. Et là est tout le génie de ce quatuor qui assume complètement son statut de fun band, en prenant garde de soigner non seulement son look et son crédo, mais aussi ses morceaux qui ne lâchent jamais la pression.
Presque un exercice de style dans la théorie, surtout lorsque le Rock se pare d’atours un peu Glam et de lipstick Pop-Punk sur l’irrésistible « She’s A Lady », qui nous rappelle au bon souvenir des DEF LEPPARD mais aussi des LAST OF THE TEENAGE IDOLS. « Bad Cops », joue le sempiternel duo bon flic/méchant flic, et nous interroge d’une cowbell imparable, piquant à THE STRUTS leurs méthodes pour obtenir des aveux Rock, tandis que le délirant « My Mom » laisse une fois de plus Young Diamond s’amuser avec sa voix de tête avant de nous exploser la nôtre d’une absence de retenue digne des BACKYARD BABIES. Et ça déroule comme à la parade, avec toujours en exergue ces chœurs diaboliques qui vous font la nique sur fond d’harmonies exotiques (« Masquerade »), sans aucune baisse de régime ni trou de mémoire, sautillant sur les mines anti-déprime de « Rock me » pour mieux atterrir sur le trampoline de « McLovin », groovy et overspeedé. Certes, « Girl on Girl », malgré son lick aussi collant qu’un chewing-gum dans les cheveux de la vilaine Cindy est à peu près aussi fin qu’un poisson d’avril Punk accroché dans le dos, mais qu’importe la philosophie pourvu qu’on ait la vie, et c’est finalement le seul leitmotiv à retenir de toute cette entreprise. Peace, Love & Heavy Metal, aussi jouissif et instinctif soit-il ne sera pas l’album du siècle, ni celui de l’année, mais c’est celui que vous sortirez lorsque vous aurez envie de partir en virée avec quelques potes et des bières bon marché. Un majeur bien tendu à la face du bon goût et de l’élitisme, mais un hommage à l’hédonisme, et un lien intergénérationnel solide pour party boys pas timides.
Titres de l’album :
01. Electric Dynamite
02. She’s a Lady
03. Bad Cops
04. My Mom
05. Masquerade
06. Peace, Love & Heavy Metal
07. Destiny Ocean
08. Rock Me
09. McLovin
10. Girl on Girl
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