J’ai toujours plaisir à retrouver de vrais méchants. Pas des vilains de pacotille, des monte-en-l’air vulgaires, des aiglefins d’infortune, non, de vraies brutes, qui ne conçoivent le monde que comme un gigantesque libre-service ou le libre arbitre n’a pas sa place. Des gens qui se servent dans les poches de l’humanité pour la ruiner de ses dernières pièces d’espoir. A ce petit jeu du pickpocket implacable, les français d’AUTOKRATOR jouent un jeu dangereux, constamment sur le point de se faire rattraper par les forces de l’ordre du bon goût, en poussant toujours plus loin le bouchon de l’agression chaotique. Mais que voulez-vous, lorsqu’on vit comme un hors la loi, le seul crédo est de la défier.
Trois ans après avoir traité du cas de Hammer of the Heretics, et six après avoir disserté sur le potentiel anxiogène de The Obedience to Authority, je me replonge dans les traumas et névroses pour aborder la problématique de ce Persecution, qui en effet à de faux airs d’inquisition des fidèles et autres gnostiques. Ici, le Malleus Maleficarum est une bible musicale dont on ne se sépare jamais, et dès le chaos propagé par « De Gloria Martyrum Et Confessorum », l’acte d’attrition est obligatoire, et les péchés non pardonnés, mais encouragés et célébrés.
Loïc Fontaine (guitare/basse), David Bailey (chant) et Kevin Paradis (batterie) remontent donc des enfers pour nous conter le quotidien d’un monde en flammes qu’ils connaissent par cœur. Pas de réelle évolution, juste une logique sadique dans la continuité, et ce Death/Black aux intonations Industrielles qui transforme en friche délabrée tout paysage de campagne. La violence continue est toujours l’obsession du trio, qui à chaque album prête allégeance au malin de ses rythmiques en chien de fusil et de ses litanies vocales parfaitement ignobles, à rendre une régurgitation de cuite de John Bonham tendre et romantique.
Enregistré, mixé et masterisé par Loïc Fontaine au Krucyator Studio, Persecution insiste de ses trente courtes minutes sur l’inéluctabilité de la déshumanisation globale. Sans réelle différence avec le moindre de leur méfait antérieur, ce quatrième chapitre de la saga froide et robotique nous propose toutefois une emphase mise sur la bestialité clinique, et un morceau comme « DCLXVI » pourrait servir de métronome pour les travaux public en prise avec un chantier gigantesque et problématique. Le jeu incroyable et la frappe ininterrompue des mains et des pieds de Kevin Paradis sert donc de base à la grandiloquence chérie par Loïc Fontaine, qui parfois se rapproche d’une version faustienne de PORTAL et NAILS, tout en se montrant allusif aux travaux les moins complaisants de THE CNK, sans ce côté théâtral art-déco un peu gênant.
Ici, l’art se veut brut et gigantesque de proportions, comme une digression sur les travaux d’Albert Speer (toute connotation politique évidemment reniée). Et si Persecution était fait de béton et de marbre, ses couloirs seraient interminables, en dédales droits rigides et implacables, ses hauteurs de plafond vertigineuses, et ses impasses mortelles. La guitare, inamovible dans ses motifs, se concentre évidemment sur les tonalités les plus graves, à l’image des morceaux les plus stricts et lourds de FULL OF HELL, tandis que la voix et ses mots flous agit comme une troisième ligne rythmique, ou une couche d’incantations qui ne donne pas envie d’en savoir plus sur les réelles motivations.
« Antechristus », le ventre de l’album, lourd comme une entrée de chars d’assaut dans une ville en flammes pèse sur le moral, mais étrangement, galvanise et donne envie de tout détruire pour reconstruire sur des bases saines. Entre Death vraiment cryptique et épais et Industriel souligné par cette grosse caisse régulière comme la mort et ces saccades précises comme le destin, AUTOKRATOR joue avec sa propre légende, et défie les plus grands bruitistes de notre époque. D’une intensité rare à ce niveau de jeu, d’une violence parfois insoutenable dans les charges les plus virulentes, ce quatrième chapitre de la saga sans cœur se détache de sa brièveté, comme un coup porté sur le vif qui laisse des ecchymoses et des bleus indélébiles.
Mais quelques côtes fêlées et autres rotules endommagées n’ont jamais empêché personne de se relever, et les six morceaux de cette symphonie d’outrance vous laissent encore assez de force pour en affronter le jugement. Ainsi, la dernière partie de « Antechristus », basée sur un décrescendo de vitesse succédant à un passage central à vif de blasts donne la nausée des sens, et anesthésie tout jugement objectif.
Il est tout à fait possible de se montrer hermétique à cette démonstration de haine viscérale et froide comme un hiver aux congères tranchantes. Mais entre l’entrée en matière martiale et symphonique de « Caesar Nerva Traianus », qui rappelle les couronnements les plus discutables des tyrans d’hier, et le final sentencieux de « Apocalypsis », qui nous rappelle que la fin est déjà écrite depuis des millénaires, le constat est implacable, et indiscutable. Si AUTOKRATOR n’a rien changé à sa recette malsaine, son professionnalisme impressionne de plus en plus, et sa maîtrise de l’horreur est de plus en plus effrayante.
Il n’est évidemment pas utile de préciser si Persecution se place dignement dans la discographie du groupe. Il est une étape supplémentaire, et une suite logique, même si on se demande à chaque fois comment le groupe pourra aller plus loin et dessiner des panoramas encore plus désolés et arides. Rendez-vous dans deux ou trois ans pur savoir, si toutefois, la nature nous a laissé un délai supplémentaire pas forcément mérité.
Titres de l’album:
01. De Gloria Martyrum Et Confessorum
02. The Great Persecution
03. DCLXVI
04. Antechristus
05. Caesar Nerva Traianus
06. Apocalypsis
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