Il suffit parfois de presque rien, peut-être dix années de moins pour que l’on puisse dire « je t’aime ». Ou parfois, le conseil éclairé d’un ami Facebook, estomaqué par la qualité d’une réalisation pour que l’on daigne y prêter attention, connaissant les goûts de ladite personne en matière de chefs d’œuvres insoupçonnés. Et ce qui au départ semblait n’être qu’une indication de plus sur un groupe méritant la lumière de la connaissance publique se transforme en épiphanie musicale eut égard aux qualités intrinsèques de l’ensemble en question. Et d’une première écoute en attention modulée d’esprit critique, à une énième relecture vaine en tracement d’éventuels points faibles, la vérité surgit, et la confiance se renforce. Car oui, ce premier album est de cette caste très fermée des défricheurs d’idées, utilisant des codes antimoniques pour parvenir à ses fins et nous entrainer dans un voyage aux confins de la création, là où la mélodie la plus pure peut cohabiter avec le bruit le plus dur, et où la technique la plus éprouvée peut servir les intérêts d’accroches qui restent gravées dans l’inconscient, jusqu’à l’admission finale. Et cette admission en forme d’assertion me pousse aujourd’hui à accepter la valeur incroyable d’un groupe bien de chez nous, qui de son premier coup d’épée assène une blessure mortelle à la monotonie et la linéarité, sans pourtant s’éloigner de certains plans de route déjà bien connus de références mondiales à la réputation immaculée. Dans les faits, COR SERPENTII ne sort pas exactement de nulle part, mais est né sur les cendres d’autres assemblages, puisque ses membres proviennent de l’underground extrême national. INSAIN notamment, mais aussi ORAKLE grâce à la présence de Frédéric Gervais au chant, secondé par ces figures reconnaissables dont celle du guitariste Nicolas Becuwe, créatif versatile exprimant ses vues et concepts au travers d’œuvres Death évidemment, mais aussi Ambient, classiques et progressives. Benoit Jean (SENTENCE, SAVAGE ANNIHILATION, mais aussi INSAIN ou INQUINATUS) se chargeant quant à lui de la basse, le trio pouvait enfin poser les bases d’un style unique, empruntant tout autant au Death qu’au Thrash le plus technique, enrobant le tout dans une atmosphère aussi cosmique que brûlante, avec de fréquents dérapages BM rapprochant le tout d’une version plus qu’intelligente d’une symphonie de l’extrême…
On connaît déjà ce genre d’attitude, et l’avant-gardisme excessif dans ce genre d’aventure est aussi à craindre qu’une énième relecture de canons Thrash Death aux ficelles usées jusqu’à la corde. Pourtant, celle utilisée par les COR SERPENTII pour y pendre toute forme de prévisibilité est solide, et ce Phenomankind n’est rien de moins que l’union sacrée et consacrée des univers antagonistes d’EMPEROR, de VOÏVOD, de la vague Néo-Death suédoise des nineties, mais aussi des miraculeux SUP, et beaucoup d’autres explorateurs de l’interdit qui se sont dit un jour qu’à cœur vaillant, rien n’était impossible. Partant de ce postulat, tout devenait possible pour les parisiens, dès le mot « incongru » biffé de leur dictionnaire personnel. Et autant dire que les trois musiciens ne se sont nullement bridés pour en arriver à un résultat pareil, qui de fait échappe à toute autre classification que celle d’un Metal extrême de classe internationale. En adoptant le radicalisme d’un Black progressif transposé dans un langage Death mélodique, Nicolas, Benoît et Frédéric repoussent les limites des éventualités, et évoquent diverses sensations épidermiques, de celles que les pilotes de chasse éprouvent une fois enfermés dans un simulateur, et qui les oblige à ressentir les pressions les plus extrêmes. Plus qu’un trip en 5G, Phenomankind est une sorte d’attraction de parc de l’ultime, qui vous propulse de tous les côtés sans vous laisser le temps de respirer, et qui parvient toujours à enchaîner une chicane mortelle avec une descente vertigineuse, sans exagérer les côtés éprouvants pour ne pas vous donner la nausée. Ou plutôt, une exploration du cosmos créatif de l’esprit humain, nous électrisant de synapse en synapse pour nous apporter des connaissances non nouvelles, mais soumises à un éclairage différent, plus adulte, mais pas moins violent pour autant. Et dès l’entame en coup de poing de « Retrieval », la messe en culot majeur est dite. COR SERPENTII s’impose de son talent et de sa grâce naturelle, sans recourir à des subterfuges fumeux ou autres astuces pernicieuses. Ici, c’est la dextérité instrumentale qui prime, et le brio artistique qui s’impose, dans un monde ou la barbarie rythmique le dispute à l’âpreté mélodique, dans un ballet enivrant de vitesse et de précision. Semblant à chaque instant vouloir synthétiser les idées les plus absolues de MORBID ANGEL, SUFFOCATION ou de GOROD, et les velléités les plus organiques de VOÏVOD ou DEATHSPELL OMEGA, les trois musiciens s’embarquent dans une recherche perpétuelle du plan qui déstabilise, sans remettre en cause l’osmose générale, cimentée par les plans hallucinants de virtuosité de Nicolas, guitariste au jeu aussi bluffant que ses capacités de composition.
Et si le concept global présente une cohésion en forme de monolithe Kubrickien, chaque chapitre renforce la majesté de l’édifice en apportant sa propre pierre à la grandiloquence de l’ensemble. Dans un style se rapprochant d’un opéra cosmique pour espèces plus évoluées ayant déjà entrevu des possibilités échappant à la compréhension humaine, ce premier album se pose en jalon, et définit les critères d’exigences à venir qui vont obliger les groupes contemporains à se sortir les doigts des poches pour tenter de proposer quelque chose de plus fondamental. Se basant sur des fantasmagories héritées de l’univers cybernetico-poétique de Phillip K. Dick, Frédéric Gervais s’impose en interprète, et module sa voix, passant d’une aisance incroyable du chant clair aux growls d’enfer, et offrant au tout le cadeau d’une production millimétrée peaufinée au Studio Henosis (ORAKLE, GLORIOR BELLI, ACYL, MOONREICH, ELYOSE...), permettant à des compositions aussi ambivalentes que complexes de la trempe du terrifiant « A Closer Signal » de s’imposer à mi-chemin des dérives de STRAPPING YOUNG LAD et des obsessions d’OPETH. Mais en faisant preuve d’une subjectivité assumée, c’est véritablement « Theomachia » qui s’extrait de cette première partie d’album, poussant la complexité et la férocité dans leurs derniers retranchements, transposant la puissance intelligente d’un ATHEIST dans le Canada des VOÏVOD pour nous faire perdre pied avec la réalité et nous obliger à nous immerger dans un univers parallèle, ou la technique instrumentale a remplacé le langage oral et ou le culot est désormais une qualité indispensable à toute forme d’expression.
Mais quelle difficulté pour retranscrire l’effet produit par un tel album sur la psyché et l’organisme, tant chacune de ses idées semble propulser les COR SERPENTII à des années-lumière de toute concurrence directe. Ainsi, l’onirique « Waves Of Wrath » de fondre dans une même envie les accélérations mystiques du CYNIC le plus méditatif, et les accès de violence théâtrale des CHTHONIC, pour provoquer un nouveau big-bang révolutionnant l’ordre mondial. En faisant preuve d’une infinie finesse dans l’exécution, sans le sacrifier à la brutalité globale permanente (les moments d’apaisement sont si rares qu’on ne les remarque pas), COR SERPENTII prouve que le labyrinthe mélodique des UZEB à tout à fait sa place dans un scénario élaboré par les IMPERIAL TRIUMPHANT, et signe le premier space-opera pour fans d’extrême n’ayant que très peu envie de s’accrocher à la routine d’une violence prévisible. Phenomankind, ou le manifeste sans ambages de surhommes au service d’une musique surhumaine, fustigeant la normalité sans sombrer dans l’élitisme nietzschéen de l’arrogance crasse.
Titres de l'album :
1.Retrieval
2.A Closer Signal
3.The Serpent's Stratagem
4.Sand Storm
5.Theomachia
6.Rise Of The Blind
7.Waves Of Wrath
8.Reversed Evolution
9.Phenomankind
10.Ubik
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