Quand les canadiens de FUCK THE FACTS vous promettent une Pleine Noirceur, vous pouvez leur faire confiance, ils s’y connaissent en ténèbres depuis les années 2000. Pas vraiment étonnant dès lors de constater que leur nouvel album est certainement l’un des plus sombres du marché, et même de leur pléthorique discographie. Parce que les québécois n’ont pas vraiment traîné depuis leur émergence en 1999, et ont respecté les dogmes du Grind dont le premier commandement est d’occuper le terrain à tout prix. Alors, un maximum de formats courts, de splits, mais aussi d’albums évidemment, puisque le trio n’est pas vraiment avare en la matière, le dernier datant d’ailleurs de 2015, et il était grand temps que le trio se rappelle à notre mauvais souvenir, d’autant plus que rien n’était venu étancher notre soif de violence depuis. Pas le moindre petit split, pas l’ombre d’un EP ni même d’une démo, et les québécois n’étant pas vraiment coutumiers de ce silence, il n’en devenait que plus inquiétant. Alors, non seulement nous attendions d’eux un retour rapide, mais aussi fracassant, pour excuser cette absence étonnante, et juste avant de se glisser ce Pleine Noirceur pour assombrir une matinée trop ensoleillée, le doute n’était pas permis, mais l’hésitation prononcée. Allaient-ils encore nous surprendre de leur violence, allaient-ils atteindre le niveau de leurs meilleures réalisations ? La réponse est claire, sans détours, et évidente dès « Doubt, Fear Neglect ». Presque sept minutes pour un titre d’entame, voilà qui n’est pas très Grind, mais qui ressemble beaucoup à l’attitude frondeuse que le groupe a adoptée depuis ses débuts chaotiques. Parce que bien sûr, FUCK THE FACTS est tout sauf un groupe de Grind classique, et plus proche d’un Hardcore ténébreux et bruyant, adoptant parfois les postures excessives de BRUTAL TRUTH, qui fait d’ailleurs partie des recommandations promotionnelles pour aiguiller les exilés du Noise.
Alors, une fois de plus, une fois encore, et enfin serais-je tenté de dire, le trio canadien (Topon Das, Mathieu Vilandre, Melanie Mongeon) s’est creusé les neurones pour faire évoluer le genre, et le porter au pinacle d’une critique qui aime toujours autant les inclassables et les parias. Bien que leaders d’une scène qu’ils portent à bout de bras depuis vingt ans, les trois musiciens se remettent toujours en question, et ont cette fois-ci adopté une curieuse façon d’agencer leur travail. Avec de longs morceaux lourds, emphatiques et désespérés entrecoupés d’interventions lapidaires rappelant leurs débuts bruyants, Pleine Noirceur pourrait presque passer pour un Post BM juste teinté de quelques touches Core fugaces, et la lancinance de ce premier morceau, habilement soulignée par un chant vraiment écorché aiguille sur cette piste. Guitare qui se traîne de riff suicidaire en lick plombé, rythmique pesante et éprouvante, basse qui souligne mais ne se découvre pas trop, l’envie est là, l’allant aussi, mais on sent que le groupe s’est adapté à son époque et en propose un miroir fidèle. Heureusement pour nous, « Ailleurs » aère un peu l’introduction, mais continue d’imposer le capharnaüm à la FULL OF HELL/TOTAL FUCKING DESTRUCTION/THE KILL, noyant la franchise du Grind sous une épaisse couche de feedback et de chaos partant en vrille. Ce nouvel album annonce une nouvelle nuit, s’éloigne du Grind le plus basique pour réinventer le Hardcore cauchemardesque, et nous oblige à puiser dans nos réserves pour tenir jusqu’au bout. La séance est éprouvante, et sonne parfois comme une digression sur le BM canadien le plus lo-fi, et si le groupe s’est une fois encore débrouillé seul pour enregistrer, produire, mixer et masteriser ce nouvel LP, Mélanie s’occupant même de la pochette, il s’en tire avec des honneurs que ne pourrait leur refuser un Kurt Ballou, certainement très heureux que ses enseignements soient tombés entre d’aussi bonnes mains.
Et si la fiche promo cite sans vergogne BRUTAL TRUTH, NAPALM DEATH, CONVERGE, CEPHALIC CARNAGE, THE DILLINGER ESCAPE PLAN, autant ne pas en tenir compte, puisque la vérité est ailleurs. On pense parfois à BOTCH, à NAILS, mais on pense surtout à FUCK THE FACTS qui depuis très longtemps n’a plus besoin de comparaisons flatteuses pour exister. Et si le côté péjoratif de la chose n’entraînait pas une vulgarité inévitable, j’oserais même prétendre que le trio fait partie de cette avant-garde si décriée, mais une avant-garde qui n’a pas perdu le contact avec la réalité de la violence. Et si les trois acolytes conseillent de mettre le morceau « Pleine Noirceur » en avant pour mieux définir l’album dans sa complétude, autant les croire puisque le titre résume à lui seul les quarante minutes globales. Ambiance déprimante, hurlements à la limite d’une humanité agonisante, écrasements soudains, blasts qui déboulent sans crier croche, tout est en place pour un final d’apocalypse qui ne devrait pas tarder à nous engloutir. On pense souvent que dans la discographie pléthorique d’un groupe créatif, les premiers albums sont les plus enclins à définir la légende mais Pleine Noirceur démontre que la légende canadienne continue à s’écrire en 2020, et que ce nouveau tome n’a rien à envier aux classiques. Et c’est une certitude, qui donne des céphalées, spécialement lorsque le groupe se permet d’être insistant et hypnotique sur moins d’une minute et trente secondes (« Aube »).
Pas celle d’un communiant s’entend, mais celle qui se lève après une nuit de ténèbres, une nuit agitée (« Sans Lumiere », qui se rapproche de BRUTAL TRUTH et DISCHARGE, RIGHTEOUS PIGS et FULL OF HELL, NAILS et puis tellement d’autres), une nuit passée avec le syndrome de la jambe lourde, qui donne envie de se lever pour errer dans les couloirs de son passé (« Sans Racines »). Piochant dans le répertoire du verbe de TYPE O NEGATIVE (« Everything I Love Is Ending »), FUCK THE FACTS ose le drapé noir non gothique, traîne son Hardcore vénéneux comme des champignons entre les pieds, et souffle sur toutes les bougies que nous pourrions allumer. Pleine Noirceur est sans doute le meilleur lien invisible qui rattache le Hardcore et le Black Metal, sans être l’un, ni totalement l’autre. Les mélodies acides (« A Dying Light »), les « _cide » qui terminent en laissant un mauvais goût dans les oreilles, tout est fait pour déranger en restant créatif et pointu. Le meilleur groupe de sa génération ? Sans doute, mais les FUCK THE FACTS ne s’ancrent pas dans une génération en particulier. Et ils comblent ces cinq ans d’absence avec une violence incroyable, de celle qui renvoie presque le dernier NAPALM DEATH au rang des antiquités sans valeur.
Titres de l’album:
01. Doubt, Fear Neglect
02. Ailleurs
03. Pleine Noirceur
04. Aube
05. Sans Lumiere
06. Sans Racines
07. Everything I Love Is Ending
08. A Dying Light
09. Dropping Like Flies
10. L’abandon
11. An Ending
12. _cide
Comme d'habitude énorme ...
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