Quand on regarde la pochette de ce premier album, on se dit que nom n’aurait jamais pu être plus mal choisi. Ces quatre musiciennes au regard dur et à l’attitude ferme n’ont rien de jolies peluches douces qu’on prend dans ses bras pour se rassurer, et admettent plutôt l’héritage complexe des musiciennes Rock de ces quarante dernières années. A l’image de DRAIN qui mettait en avant des physiques avantageux pour mieux dissimuler une force de caractère énorme et un niveau technique solide, les américaines de PLUSH ne font pas grand mystère de leur beauté individuelle, fondue dans un collectif qui semble soudé, et qui est pourtant sous la coupe solide d’une seule musicienne, Moriah Formica. Sur cette fameuse pochette, c’est elle, la petite brune sur la droite, bardée de noir et de clous, les yeux semblant transpercer votre âme. Et croyez-moi quand je vous affirme que Moriah sait exactement ce qu’elle veut, même si le leitmotiv de son groupe est sans doute le plus simple que le Rock ait connu :
The mission of PLUSH is to bring the heart of rock back to the mainstream with a new fresh spin on the sounds you already love. PLUSH hopes to inspire young women everywhere to follow their dreams, regardless of whatever challenges may lie in the way
Courir après ses rêves pour mieux les rattraper. Un vœu pieux pour beaucoup de jeunes filles dont les espoirs sont foulés au pied d’une société patriarcale qui n’aime rien tant que mettre « la femme » au pas, et si possible, la cantonner à des tâches subalternes ou la garder derrière les fourneaux. Heureusement pour nous, depuis la nuit des temps, des femmes ont refusé ce destin peu enviable, pour enfourcher les motos de la liberté. Mais au-delà du symbole fort renvoyé par ce groupe constitué de jeunes femmes n’ayant pas encore l’âge légal pour boire, ou tout juste, PLUSH incarne cette nouvelle garde Heavy américaine qui refuse les facilités de l’Alternatif, mais qui n’hésite pas à imposer au monde ses refrains fédérateurs et son attitude rebelle.
Après tout, on ne braille pas dans le micro un tonitruant « we are the champions » si on n’a pas les épaules pour supporter les trophées. Et sur ce premier album éponyme produit et mixé par Johnny K aux Groovemaster Recording Studios de Chicago dans l‘Illinois, PLUSH assume sa mission de vulgarisation du Hard-Rock pour séduire le grand-public, en signant pas moins de treize hits à brûler n’importe quelle scène des Etats-Unis ou d’Europe. Douées, les musiciennes le sont, mais elles préfèrent la concision collective à l’exploit individuel, et si la voix extraordinaire de puissance de Moriah se taille la part du lion, la section rythmique soutenue par la basse d’Ashley Suppa et la batterie de Brooke Colucci est d’un appui considérable, tenant compte de l’énergie développée par les guitares de Moriah et Bella Perron.
En somme, les PLUSH pourraient se concevoir comme des anti-RUNAWAYS, des musiciennes qui ont choisi leur voix et leur voie, et qui n’obéissent à personne. Pourtant, si leur musique ne propose rien de vraiment révolutionnaire, on sent que la détermination risque de les emmener loin, ce qu’on constate assez facilement en écoutant le très persuasif « Hate », qui ne fait pas semblant de détester ce qu’il déteste.
Livré dans un sobre digipack deux panneaux, Plush, l’album, se devait d’être éponyme, puisqu’il constitue une déclaration d’intention claire de la part du groupe qu’il incarne. Un groupe qui survole l’histoire Hard n’Heavy US de ces quatre dernières décennies, qui propose des riffs très nineties et une vision MTV de la violence musicale, mais qui évite tous les poncifs grâce encore une fois à la présence et au charisme musicale de sa frontwoman. Pour suivre Moriah sur les réseaux sociaux depuis un bail, je peux vous affirmer qu’elle ne fait pas semblant d’être ce qu’elle est. Moriah vit la musique, la transpire, la compose, et la joue comme si sa vie en dépendait, et les chansons qu’elle nous offre sur ce premier jet sont autant de tranches de sa vie. Ou de la vôtre.
On peut trouver ça convenu, on peut penser ça classique, mais on ne peut nier la sincérité d’un quatuor soudé. « Athena » loue la déesse et chasse sur les terres de DRAIN, MY RUIN, tout en admettant l’importance du Hard californien de l’âge d’or. « Found a Way » joue les syncopes, mais garde la mélodie sous le coude, l’un des facteurs cruciaux de l’entreprise qui trouve toujours le juste équilibre entre la puissance et l’harmonie. La combinaison des voix sur les chœurs les plus évidents, ces refrains qui s’envolent presque Grunge, cette candeur soutenue par un professionnalisme acquis à la force du poignet font de Plush un acte de naissance tatoué du sceau de la pouponnière Hard la plus exigeante sur ses quotas.
« I Don’t Care », « Sober » s’opposent et se complètent, l’un faisant un gros doigt d’honneur aux principes qui ne sont pas siens, l’autre acceptant ces moments de faiblesse et de tendresse dont chaque être humain a besoin. Et si l’ensemble du groupe convainc, il est inutile de cacher que c’est le talent de Moriah qui éclate au grand jour, la guitariste/chanteuse se livrant vocalement comme personne, cachant derrière ses mots des émotions qu’elle garde secrètes.
Elle préfère la solitude sur fond de lucidité amère via « Better Off Alone », défie l’ennemi sur « Bring me Down », mais garde la tête haute et la guitare acérée comme une lame. Et si l’album marque parfois le pas de quelques similitudes malheureuses, le contenu a de quoi rassasier les fans d’une musique simple et sincère, qui se pare parfois d’acoustique (« Don’t Say That » un tube imparable), ou qui au contraire embrasse le sempiternel binaire comme un crédo pieux (« Walk Away »).
PLUSH incarne un peu de cette jeunesse qui n’a cure des opinions bridant les rêves et fixant les limites. Et si on y croit, on finit toujours par y arriver. Quels que soient les obstacles.
Titres de l’album:
01. Athena
02. Champion
03. Hate
04. Found a Way
05. I Don’t Care
06. Sober
07. Better Off Alone
08. Sorry
09. Why Do I Even Try
10. Bring Me Down
11. Don't Say That
12. Will Not Win
13. Walk Away
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