Toute la musique que j’aime, elle vient de là, elle vient du Blues.
Oui, c’est un peu facile comme accroche, mais en même temps, qui irait dire le contraire ? Après tout, l’héritage d’Hendrix, de Page, Clapton, Beck, des YARDBIRDS, de ZZ TOP a été capitalisé, utilisé, pillé, pour que le Rock et le Blues s’unissent dans un déluge de distorsion et deviennent ce Hard Rock que l’on aime tant, et si certains artistes n’hésitent pas à le rapprocher de ses racines, il n’y a aucun mal à ça : on se ressource comme on peut. L’arrière-garde reste évidemment dans les clubs pour entretenir la flamme, mais ce sont souvent les jeunes qui montent au créneau pour rappeler aux ados et adultes que la musique n’a pas d’âge, et que la passion ne dépend pas d’une date de naissance. C’est en tout cas ce que nous prouvent les TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN depuis leur émergence en 2009 du côté de Nashville, la Mecque de la Country. Ces gamins-là ont en effet quelque chose de Tennessee, mais pas l’auteur, la ville, qui respire encore les effluves de cow-boys du crépuscule et de légendes à propos d’amour gâchés par la prison ou la séparation. En quelques années, ces petits malins se sont forgé une réputation immaculée de rockeurs incorruptibles, et c’est au travers de trois albums bien tassés que leur aura s’est mise à briller plus que de raison, entamant son ascension avec un Wild Child qui en disait long sur leur attitude. Pas d’esbroufe, juste le plaisir de jouer une musique simple, de partager avec le public un amour pour ce Rock bluesy qui trouve toute son ampleur dans les petites salles et les rades, et qui reconnaît l’héritage des Tom Petty, Springsteen, Stevie Ray Vaughan et autres défenseurs d’un certain idéal musical américain.
Mais moins d’un an après leur dernière et miraculeuse livraison, Truth and Lies, les trois lascars (Tyler Bryant - guitare, chant, Caleb Crosby - batterie, et Graham Whitford - guitare) privés de leur bassiste Noah Denney parti voir ailleurs si l’herbe est plus savoureuse, ont profité d’une période d’isolement forcé pour cause de pandémie, et ont enregistré une suite qui se devait digne des premiers efforts, et ont donc concocté Pressure dans leur coin, jouant ironiquement sur le titre pour justement admettre qu’ils n’en avaient aucune sur les épaules pour capter ces chansons dans un climat de confinement propice à la création. Nous aurions pu nous attendre à une saillie plus introspective, mais c’eut été mal connaître Tyler Bryant, qui ne conçoit le Rock que sous son aspect le plus ludique et euphorique. En résultent treize nouvelles compositions, toujours courtes et immédiates, qui renouent avec l’urgence d’un Rock joué Hard et avec les tripes, truffé de refrains poppy, mais refusant toujours la compromission d’un Pop-Rock trop facile. Pressure ressemble donc à ces bœufs qu’on tape dans le tard de la nuit, lorsque les reprises de classiques deviennent des originaux dans le secret d’une salle de répète éloignée de tout. Comme tout bon album de Rock qui se respecte, il est blindé de guitares qui rugissent, qui émeuvent, qui caressent ou griffent et évidemment, l’instrumental est velouté de la voix floutée de Tyler, qui n’hésite jamais à jouer l’émotion sous la carapace de la virilité en cuir. Alors, nous pouvons apprécier la sensibilité d’un sublime « Like The Old Me », qui s’autorise quelques arrangements de cordes, et qui sonne comme un regard en arrière vers une jeunesse à la « Summer of 69 » de Bryan Adams. C’est beau, et surtout, c’est authentique, chose rare ces temps-ci.
Mais ces instants d’accalmie sont rares sur ce quatrième LP qui joue constamment la carte de l’énergie débridée et de la jeunesse éternelle. Après tout, le Rock accuse de plus en plus de décennies d’existence, et doit constamment prouver qu’il est encore adolescent, ce qui n’est pas tâche facile. Alors, il compte sur la jeune génération pour le présenter sous un jour flatteur, cette génération qui le joue comme s’il était né avant-hier, et qui lâche les chiens de la rage sur « Pressure », animé des riffs les plus agressifs du marché. On peut ressentir le souffle des amplis Marshall, on peut sentir la membrane du micro vibrer sous les harangues, et même humer la sueur qui perle au front des musiciens. Solo simple mais efficace, bends diaboliques, investissement dans l’expression, le mode opératoire est toujours le même, et fonctionne à plein régime. TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN ne compte rien révolutionner, ni faire passer les STONES pour de vieux cons, juste pouvoir se compter dans les rangs d’un Rock crédible et rosse, un peu louche et juvénile sur les bords, mais de plus en plus mature au fur et à mesure des années qui passent. Beaucoup pensaient que le groupe ne pourrait pas faire mieux que l’incandescent Truth and Lies, surtout en moins d’un an, et pourtant il a réussi, justement parce qu’il a oublié la pression en route. On sent que cet album a été enregistré sans autre contrainte qu’occuper le temps libre, et son mélange habile du BON JOVI le plus crédible et du Tom Petty le plus valide nous enivre les tympans comme un bourbon de douze ans d’âge.
« Hitchhiker » continue sur sa lancée, et cherche à percer les ondes des radios du sud, mais « Crazy Days » cherche lui clairement à piocher du côté des SOUL ASYLUM pour se rapprocher d’un Pop-Rock populaire, mais pas putassier. Le mariage des voix masculine et féminine marche comme aux grandes heures de la Country, lorsque June et Johnny chantaient en concert, mais la basse mutine de « Backbone » se replonge dans les meilleurs moments des nineties, lorsque le Rock se mettait à toutes les sauces, et se permettait même de séduire un public de profanes. Une fois encore, tout est bon, tout tient debout, mais tout sonne naturel et crédible. Que le groupe tienne à son étiquette de sauveur du Rock ou qu’il admette des fêlures (« Loner », recette ENUFF Z’NUFF et BON JOVI, encore), ou qu’il accepte un son plus moderne et profond (« Fever »), le résultat est le même : le Rock vit et respire à nouveau.
Je ne sais pas jusqu’où ira cette aventure, mais je la souhaite la plus longue possible. Parce qu’elle est belle, rebelle, et les mecs méritent vraiment le meilleur. Lorsqu’on écoute « Fuel », on en tremble de plaisir, et lorsqu’on fond sur « Coastin’ », c’est sans regret, parce que le Blues a toujours été là pour nous. Et pour le Rock. Merci à Nashville d’avoir partagé son secret le plus enviable, et merci aux TYLER BRYANT & THE SHAKEDOWN pour cette petite dose d’espoir en musique. En ces temps perdus, ça fait un bien fou.
Titres de l’album:
01. Pressure
02. Hitchhiker
03. Crazy Days (feat. Rebecca Lovell)
04. Backbone
05. Holdin’ My Breath (feat. Charlie Starr)
06. Like The Old Me
07. Automatic
08. Wildside
09. Misery
10. Fuel
11. Loner
12. Fever
13. Coastin’
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