La vague old-school actuelle existe depuis si longtemps qu’on parvient à dégager de nouveaux ténors, ceux qui avec le temps ont pris la place dans le cœur des jeunes de METALLICA, SLAYER, EXODUS, SODOM ou KREATOR. Nous, anciens, savons quelle importance ont eu ces références sur la nouvelle tendance Thrash, mais les plus jeunes qui ont la plupart du temps connu le style grâce à ces pupilles de la baston les ont écouté bien après, une fois que certains musiciens ayant commencé leur carrière à la fin des années 90/début 2000 s’y soient directement reliés, et finalement, la logique est respectée, et le cours de l’histoire aussi. A chaque époque ses héros, et ceux des ados/jeunes adultes actuels ne sont pas forcément les mêmes que les nôtres, mais les deux ou trois générations s’accordent parfois sur un talent ayant émergé sur le tard, dont celui indéniable de Joel Grind, l’un des plus ardents défenseurs de la cause. Joel, c’est un peu le passionné absolu, le mec qui a grandi avec la Bay Area du Big4 mais aussi l’Allemagne de DESTRUCTION et LIVING DEATH. Le mec à la connaissance encyclopédique et à l’investissement total, celui qu’on consulte pour dénicher les perles rares, et celui qu’on écoute quand il raconte les légendes. Celles des stars, mais aussi la sienne, qui est aujourd’hui un fait. Car en sus d’être un musicien discipliné aux capacités instrumentales certaines, l’homme est un producteur recherché qui connaît le son, et la façon de l’obtenir. La meilleure preuve ? La discographie de son projet, TOXIC HOLOCAUST, l’EXODUS des temps modernes, le METALLICA radical des amateurs de Speed Thrash infernal. Vingt ans déjà que ce concept a émergé du cerveau fécond du musicien, et ces deux décennies se fêtent aujourd’hui, de la façon la plus logique qui soit. Conçu comme un one-man-band, TH se retrouve aujourd’hui en tête à tête avec son créateur, qui a décidé de revenir à ses racines et au son de ses débuts. Et ce son inimitable fait merveille sur ce Primal Future : 2019, qui aurait tout aussi bien pu s’appeler Primal Past : 1999 tant on retrouve tout ce qui a fait le charme de ce groupe depuis sa découverte.
Car TOXIC HOLOCAUST n’a jamais été purement Thrash. Il s’est toujours ouvert à d’autres influences, tout comme les pionniers du style n’ont pas construit le mausolée en une seule journée. On trouve des traces de ce Metal mordant qu’on appelait encore Power il y a longtemps, des inflexions Punk, les prémices de l’Anarcho Core, des tendances Speed, mais aussi des clins d’œil plus qu’évidents à BATHORY, DISCHARGE, METALLICA, RAZOR, VENOM, EXCITER, en gros, tout ce qui nous a converti à la cause il y a bien longtemps. En soldant les comptes de son passé, Joel a eu la bonne attitude. Celle de s’en remettre à une pochette magnifique et délicieusement vintage de Steve Crisp, mais aussi de repartir de zéro, lui qui n’avait rien publié sous ce nom depuis 2013, et Chemistry of Consciousness. Alors plutôt que de chercher à continuer le travail entrepris à plusieurs il y a six ans, Joel a consciemment préféré remonter encore plus son horloge musicale et se souvenir de son impulsion d’origine en nous proposant une variation sur le thème de ses premières démos, et de Evil Never Dies, le LP qui avait tout fait péter en 2003. Il s’est évidemment chargé de la production, du mixage et du mastering, mettant à profit ses années passées derrière la console pour d’autres groupes, et nous offre avec ce sixième album studio un condensé de son savoir-faire lourdement copié et pompé, mais jamais égalé. Avec des emprunts plus qu’évidents aux plus grands chevaliers Thrash, mais aussi des astuces piquées aux débauchés Punk, Grind se fait plaisir et nous fait plaisir, semblant chercher la méthode Quorthon dans les cartons laissés après la mort du regretté Lemmy, tout en adoptant une posture bravache Hardcore qui lui sied à merveille. Et ce retour aux sources de son propre parcours nous pose la mise en abyme suivante : pouvons-nous apprécier de façon égale une musique récente qui n’est en fait qu’une allusion soulignée à celle que nous avons toujours écoutée ? Mais dans le cas de Joel, la réponse est limpide : oui. De fait, sans rien proposer de neuf, ce sixième LP fait presque table rase du passé collectif pour se recentrer sur celui individuel. Et on retrouve la rage d’un musicien complètement habité par son obsession, d’une sincérité désarmante, et d’un talent incroyable. Et « Chemical Warlords » de nous prouver de son riff à la Kill’Em All que l’attente ne fut pas vaine, et que la cure de jouvence a fait du bien à l’originaire de Portland, qui pour l’occasion à sorti ses guitares les plus tranchantes et son chant le plus rauque.
Mais loin d’être le monument de vitesse qui semble obséder tous les acteurs actuels de la scène, Primal Future : 2019 joue aussi la lourdeur, l’oppression, louchant du côté Punk là où le Hardcore risque de tomber. On sent de vieux effluves des CRO-MAGS, des ENGLISH DOGS, de DRI aussi, en gros, de tout le mouvement Crossover qui a éclaté aux Etats-Unis au début des années 80. Lorsque le tempo ralentit, les riffs s’épaississent et le climat s’assombrit, sans trop nous peser sur les épaules. Ainsi, le miraculeux « New World Beyond » suggère tout autant les magnifiques LEEWAY que la scène Post Punk/Anarcho Core anglaise, avec cette attitude teigneuse symptomatique de la Californie de 83/84 et du New-York de la même époque. Loin d’avoir bâclé sa copie pour la rendre plus vite et plus facilement, Joel a vraiment travaillé ses compos, qui malgré une durée étendue, ne jouent jamais avec nos nerfs. Production sèche comme un coup de trique pour aller à l’essentiel, puisque justement l’essentiel, la musique, se passe d’artifices. L’homme cède parfois sous les coups de boutoir des réminiscences, et ose le jeu égal avec DISCHARGE, via le lapidaire « Deafened By The Roar » teigneux comme une beigne Crust prise sur le coin de la gueule. Ce qui ne l’empêche nullement de revenir aux fondamentaux du Speed Black avec « Time’s Edge », mais toujours avec ces accents Hardcore qui allègent un peu le propos, sans le démétalliser. Sans tomber dans le piège de la redite ou de la paraphrase, Joel cite son propre groupe sur les passages les plus plombés, et « Primal Future » de nous ramener à l’orée du nouveau siècle, mais aussi aux débuts des années 80, lorsque VENOM, l’idole, continuait de répandre son fiel dans les veines de BATHORY, HELLHAMMER et tous les initiateurs du mal musical. C’est plus evil que n’importe quel album de BM récent, mais ça garde cette fraîcheur qui n’appartient qu’à l’américain. Alors, on s’éclate parfois façon blind test pour savoir où a été piqué tel ou tel riff (et avec « Iron Cage » il y a de quoi s’amuser un bon moment), mais on apprécie surtout la diversité dans la brutalité, dans un élan qui réunit avec euphorie les tendances Metal et Hardcore.
Emblématique d’un Crossover qui a tout compris aux leçons du temps, Primal Future : 2019 est un trip immersif, mais surtout, un travail remarquable. Sans aller jusqu’à parier sur la palme de « meilleur album », il nous permet de réaliser que les nouveaux messies n’ont pas trahi la parole des anciens Dieux, et qu’ils méritent eux aussi leur place au panthéon de l’histoire. Et comme Joel le souhaitait, la boucle est bouclée…Joyeux anniversaire mister Grind !
Titres de l'album :
1. Chemical Warlords
2. Black Out The Code
3. New World Beyond
4. Deafened By The Roar
5.Time’s Edge
6. Primal Future
7. Iron Cage
8. Controlled By Fear
9. Aftermath
10. Cybernetic War
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