Ça n’a pas l’air de trop rigoler aux Etats-Unis depuis quelques temps, on se demande bien pourquoi…Si l’ère Obama avait été porteuse d’espoirs en tout genre (dont certains méchamment déçus quand même), l’ère Trump semble favorable à l’émergence de voix nouvelles, antagonistes, et s’affrontant dans une joute verbale sans concessions, chacun campant sur ses positions démocrates ou républicaines. Du coup, tout ça représente une sacrée source d’inspiration pour les artistes de tous horizons, qui s’en donnent à cœur joie pour soutenir (quelques-uns) ou fustiger (beaucoup) cette nouvelle administration qui finalement, incarne à merveille l’Amérique moderne de sa décomplexion et de son libéralisme belligérant outrancier. Donald, le nouveau héros d’un continent en perdition ? Aussi grotesque soit cette affirmation, elle semble juste par instants, spécialement lorsque l’oreille se tend et entend les sons émis par des gangs pas vraiment rassurés de voir leur pays dominé par un perruqué orangé. Tiens, prenez les SCAVENGERS par exemple. Au jugé des émanations toxiques de leur premier LP, on sent qu’ils ne sont pas vraiment satisfaits de la situation, et qu’ils l’expriment de la plus directe des façons. Comment ? Par l’entremise d’un énorme Crust très sombre et violent, qui multiplie les allusions à la scène 90’s, qui pourtant ne subissait pas tel affront.
Pas vraiment constitué de bleu-bites, le gang s’est formé autour d’anciens musiciens du cru, jouant auparavant ou maintenant dans des combos plus ou moins obscurs comme RECON, LARIAT, NY IN 64, YOU AND I, FIRST BLOOD, ce qui dira certainement quelque chose aux plus underground d’entre vous. D’inspiration urbaine, le quatuor (John – basse/chant, Dave – guitare/chant, Tom – batterie et Byron – guitare) se ressource à la fontaine de jouvence irascible des nineties, lorsque le Hardcore se métallisait de plus en plus, et devenait de plus en plus grognon. On pense irrémédiablement à des références comme HIS HERO IS GONE, UNBROKEN, INTEGRITY, ou TRAGEDY à l’écoute de cet introductif Progress to Oblivion, qui dès son entame, place la barre ses espoirs très bas, et le volume très haut, chatouillant de fait le spectre d’un Crustcore vraiment conséquent et nauséeux, constat qu’aucune composition ne viendra contredire.
Capté, mixé et masterisé par Scot Moriarty des fous du Grind du New-Jersey ORGAN DEALER, ce premier LP/EP est d’une consistance incroyable, et d’une férocité enviable, et semble s’évertuer à concrétiser en « musique » les odeurs néfastes des égouts d’Albany, New-York. Dès lors, impossible de ne pas se pincer les narines en ouvrant grand ses tympans pour en capter les émanations les plus nauséabondes, retranscrites à grands coups de riffs assassins, de rythmiques en coup du lapin, et de dissonances de bon matin, pour un réveil tout sauf sympathique, mais cruellement lucide. Autant jouer franc jeu, ce qui vous attend par ici n’est pas très joyeux, mais parvient à unir la lourdeur oppressante des GODFLESH et la vilénie instrumentale des NAILS, dans un élan de méchanceté musicale qui ne semble tolérer aucune limite, encore moins une quelconque fin heureuse. Le malheur, carburant des musiciens les plus véhéments ? C’est ce que semblent hurler ces morceaux maladifs, portés par des vocaux abrasifs, et des plans qui s’entrechoquent à vitesse impressionnante, nous laissant l’âme chancelante…
Gras, lourd, gros, sourd, le Metal à tendance Core des SCAVENGERS n’est pas beau, encore moins séduisant, mais il est efficace. Il privilégie bien sûr la violence et la démence, et ne bride aucunement ses instincts les plus bas, se mettant donc à hauteur d’une humanité dont l’empathie marque le pas. En vingt-et-une minutes et pas plus, les new-yorkais nous en enfoncent deux ou trois dans la gorge, et imaginent une époque encore plus tragique qu’elle ne l’est déjà, sans pour autant remettre en cause les fondements d’un Crust ricain vraiment pesant. Aussi métallique qu’il n’est Hardcore, leur mélange de la mort fait passer la nouvelle religion des PRIMITIVE MAN pour un gentil culte de frappés du bulbe, et transcendent les DISCHARGE pour les faire entrer dans l’urne spirituelle des FISSURE. Pas très agréable comme sensation, mais de la concision, et surtout, une propension à mettre l’emphase sur les aspects les moins sensibles, pour les rendre encore plus mortels. Ainsi, chez les américains, quand on est Heavy, on l’est pour la vie, et quand on est Crust, on s’emporte et on agonise. Vélocité vs lenteur, tel est l’affrontement permanent de ces sept compositions vraiment maladives, qui ridiculisent les tentatives les plus suicidaires des FETISH 69, sans pour autant sonner chargé ou exagéré. Non, tout est juste, et parfois violemment entraînant (« Proxy War » et ses accès de raffut touffu), tout en se montrant sous un jour vraiment déprimant, lors d’un final qui n’a rien à envier aux cauchemars les plus traumatiques de Justin Broadrick et Shane Embury (« October 1, 1997 »).
Feedback assourdissant et coups de percussions assommants, pour une valse sans hésitation entre tempi et oraisons (« Artifacts », visite organisée sans guide dans le tunnel sale à l’intérieur du tunnel crade, pour une ballade qui pue la souffrance par tous les porcs), lucidité instrumentale qui met mal à l’aise et taquine le Sludge le plus poisseux pour garder les doigts liquoreux (« Game Over », et on est bien conscient d’avoir perdu la partie), en somme, toutes les caractéristiques d’une société qui dérive et ne fait rien pour corriger le tir avant qu’il ne soit trop tard. Mais je soupçonne les SCAVENGERS d’être trop réalistes pour attendre encore quoi que ce soit de positif d’une existence qui les fatigue, mais qui leur inspire leurs couplets de martyrs. Et lorsque le Crust atteint ce niveau d’intensité et de nocivité, le plaisir est réel et complètement masochiste. Un portrait au vitriol d’un vingt-et-unième siècle qui pourrait bien être le dernier, et une virée sous les décombres d’une planète qui a finalement enterré son espèce pas si préférée. Un genre de conflit nucléaire en musique, sans abri antiatomique, qui vous irradie de son plutonium Crust avant de vous souffler de sa puissance Sludge.
Titres de l'album:
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30