NUMIDIAN KILLING MACHINE. Voici un nom intéressant, qui nous souffle une bouffée d’air frais, et qui traite d’un sujet dont on n’a pas forcément l’habitude d’entendre parler dans notre petit monde fermé du Metal. Mais revenons aux bases (et à Wikipedia) pour bien comprendre les tenants et aboutissants.
La Numidie, ou royaume de Numidie, est un royaume berbère, situé dans un territoire localisé principalement sur l'Algérie (Nord) ; mais également une petite partie de la Tunisie (Est et Sud), de la Libye (Nord-Ouest) et marginalement sur le Maroc (Nord-Est) au Maghreb. Ses fondateurs sont les Numides, un peuple berbère, qui créent un État puissant à la civilisation originale en Afrique du Nord4, généralement considéré comme le premier État algérien de l’Histoire. Le royaume était bordé à l'ouest par le royaume de Maurétanie, à l'est par le territoire de Carthage puis l'Afrique proconsulaire romaine, au nord par la mer Méditerranée et au sud par le désert du Sahara.
Ce royaume fondé en 202 avant Jésus-Christ et dissout en 46 de la même époque est ici présenté par un groupe originaire d’Alger dont le premier album est disponible depuis deux jours. Fondé par le bassiste L.I.V.V, qui a commencé à auditionner en 2017, NUMIDIAN KILLING MACHINE a mis quelques années avant de se stabiliser pour pouvoir enfin offrir à ses fans un album digne de ce nom.
Complété en 2023 par l’arrivée du batteur S.Blaster et du guitariste Fares B, NUMIDIAN KILLING MACHINE s’appuie aussi sur le talent naturel de Lamine A, qui soutient L.I.V.V depuis 2019. C’est donc un visage renouvelé que nous présente le groupe, qui risque fort de trouver un écho certain dans le cœur des amateurs de Speed méchant et de Thrash subtilement noirci. Et sous une pochette superbe dominée par une guerrière numidienne qu’on imagine née dans un futur dystopien se cache une œuvre sinon fondamentale, du moins originale, qui oppose la musicalité à la violence la plus crue.
Il est difficile de définir avec acuité le style proposé par les algériens. Entre Heavy vraiment dur, Speed allusif, Thrash efficace et Black de surface, le quatuor joue avec les frontières et les limites, pour nous proposer une poignée de chansons moins prévisibles qu’un nouvel exercice de style nostalgique. Et entre le Death mélodique des années 90, le Thrash moderne mais ancré dans son histoire, et un poil de groove accentué par une approche radicalement Heavy, Psychotronic Breakdown peut rappeler certains musiciens de l’école japonaise, la seule capable de transcender les genres pour se montrer théâtrale, et si certaines influences se font sentir sur certains titres, l’ensemble est suffisamment frais pour intéresser tout le monde.
Avec une optique résolument progressive, des accès de technique avancée, NUMIDIAN KILLING MACHINE délivre un concept fascinant. Si l’histoire reste à la discrétion de chacun, la portée artistique de l’œuvre est indéniable. Strié de soli fabuleux, de breaks aventureux, et soutenu par une rythmique infatigable, Psychotronic Breakdown sort la tête de la meute actuelle et se fait remarquer par ses qualités naturelles. Ces qualités se concentrent sur un niveau individuel enviable, et sur une capacité à agencer les idées de façon logique et étudiée sans sacrifier la violence du propos.
Ce crossover global permet donc de fédérer tous les publics de l’extrême qui sait rester raisonnable sans se montrer trop poli. La voix écorchée d’un chanteur qui aurait parfaitement sa place dans un groupe de Black Metal traditionnel, le festival offert par des guitaristes qui multiplient les plans, et cette atmosphère surchauffée à la CARCASS (« Dev-Illusion ») permettent de tirer le débat vers le haut. S’il est certain qu’en analysant avec plus de profondeur ce premier album, on ne manquera pas de noter des idées empruntées à droite à gauche, on ne peut au contraire que s’accorder sur le caractère farouchement indépendant d’un groupe déjà largement au point sur un premier album.
La maîtrise, la pugnacité, la volonté de sublimer un classicisme de surface transforment NUMIDIAN KILLING MACHINE en une machine de guerre infernale. La progression de la narration nous permet de visiter les moindres recoins de ce royaume perdu, avec en exergue une splendide étape épique portée par « Marching to Cirta », titre évolutif de toute beauté.
Capables du plus agressif et déployé (« Blood and Iron – The Reborn Kreation »), comme du compact sauvage (« Psychotronik Breakdown », dommage pour la grosse caisse, mais tant mieux pour le Thrash bestial), NUMIDIAN KILLING MACHINE cite le Thrash allemand, le Heavy sud-américain, le Death américain et le Power européen, pour proposer un melting-pot fascinant. Et comme en sus, la musique est renforcée par un propos intéressant, le bilan n’en est que plus positif.
Je vous conseille donc de vous immerger dans cette histoire peu commune, narrée avec un panache incroyable par un jeune groupe déjà très décidé. Car si la musique pouvait se transformer en guerrier par la force même de son essence, alors Psychotronic Breakdown serait le genre d’adversaire qu’on redouterait d’affronter par-dessus tout.
Titres de l’album:
01. ⵜⵣⴰⵍⵉⵜⵜ ⵏ ⵍⴳⵓⵉⵔⵔⴰ ⵓⵔⵉⵜⵎⵉⵔⴰⵏ
02. Blood and Iron – The Reborn Kreation
03. Gateway to Inner K-os
04. Hell E-ktronik Messiah
05. Dev-Illusion
06. Numidian Prophecy
07. Marching to Cirta
08. ⵀⴰⴳⵣⴰⵏⵜ ⵏ ⵓⴻⵣⵣⴰⵍ
09. Psychotronik Breakdown
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