Vous connaissez tous cette expression, mordre la poussière. Mais savez-vous qu’elle date du dix-septième siècle et qu’elle concernait les combats de lutte qui se déroulaient dans le sable ou…la poussière ? Si tel n’est pas le cas, peu importe, puisque cette expression est passée depuis longtemps dans le langage courant, et désigne une sale envie d’en découdre et de mettre un adversaire à terre, pour laisser la poussière témoigner de la violence de l’altercation. Mordre la poussière, quelle étrange façon d’associer la violence et un nuage de fumée s’élevant du sol…Et comment fait-on ensuite pour connaître les tenants et aboutissants de l’algarade fatale ? Simple, il suffit de…demander à la poussière pour qu’elle raconte son histoire. Les français de DEMANDE A LA POUSSIERE ont bien compris ce principe, et interrogent les côtés les plus sombres de l’humanité pour obtenir les réponses à leurs questions, des questions évidemment basées sur la souffrance, la solitude, l’amertume, des questions focalisées sur les aspects les plus sombres de l’existence, pour bien coller à une éthique musicale qu’ils ont fait leur il y a quelques années. Fondé par des membres de THE GREAT OLD ONES, SPECTRALE, OMRADE et WÜRM, DEMANDE A LA POUSSIERE est l’archétype du groupe difficile - voire impossible - à classer, qui se repaît des sons les plus graves, des mélodies les plus létales, et des à-coups rythmiques les plus fatals. Et trois ans après son initial et éponyme début, le concept revient, sans avoir édulcoré son propos, bien au contraire.
Promu par l'Agence Singularités, DEMANDE A LA POUSSIERE se présente donc à nous en cette sombre année 2021 pour faire un état des lieux de l’extrême en France et en Europe. On retrouve au line-up les figures connues, avec Edgard Chevallier à la guitare, Neil Leveugle à la basse, Vincent Baglin à la batterie et bien évidemment Krys Fruit-denhez au chant, et la dichotomie offerte par ce titre en oxymore est assez claire en soi : Quiétude Hostile est donc tout sauf une quiétude, mais montre les dents, les veines saillantes et bleues, et pose sur la table des négociations des arguments bruitistes de taille.
En huit morceaux et cinquante minutes de musique, le groupe reprend les choses dans les ténèbres où elles étaient restées il y a trois ans, et pousse le vice jusqu’à accentuer ses côtés les plus emphatiques et agressifs. Entre Post Black, Black, Sludge et Doom, le quatuor repousse les limites, laissant le fantasque Krys Fruit-denhez hurler à pleins poumons comme un conteur néfaste revenu d’un séminaire d’écriture en Norvège, tout en acceptant qu’une rythmique volatile et volubile marque le tempo. On se sent comme chez soi dans cette home délabrée aux bois décatis, humant l’air d’un temps qui n’est guère plus euphorisant que « l’avant ». Il faut en avoir dans l’estomac pour encaisser les coups successifs portés par le groupe, mais la douleur en vaut la peine, et la lucidité fétide offerte par ces huit pistes nous permet de voir le monde tel qu’il est : hideux, sombre, laissant parfois passer de fins rais de lumière pour mieux nous tromper sur son caractère nihiliste et définitif.
Et sous cette pochette étrange, aux tons gris et au flou inquiétants, se cache donc un autre manifeste de violence, une violence hostile évidemment, mais aussi une violence sourde et insidieuse, qui se fraie un chemin chaque jour sous nos ongles et notre peau pour contaminer notre esprit perverti. Entre Sludge vraiment nauséeux et Black Metal personnel, le groupe joue encore une fois avec les codes, et signe une œuvre ambitieuse, qui peut parfois rappeler un mélange contre-nature entre REGARDE LES HOMMES TOMBER et NEUROSIS (« Perdu », qui justifie son titre de sa redondance cyclique oppressante). Mais la musique de DEMANDE A LA POUSSIERE est décidément trop personnelle pour supporter des comparaisons faciles. Elle est personnelle par son approche en teinte pleine, refusant les faux-semblants et les raccourcis faciles. On peut la trouver plus répétitive que réellement hypnotique, mais le décalage entre l’amertume de l’instrumental et le fiel des lignes vocales et l’un de ses aspects intéressants. Pour autant, le terme Post Black Metal me semble trop vulgaire pour en définir certains des contours. Et si les mots de Krys ne toucheront qu’une poignée de fans lettrés et affamés de juxtapositions provocantes, d’autres se concentreront sur le bruit sourd produit par les trois autres musiciens et qui portent le projet jusqu’à la frontière du tolérable.
Surtout ne pas interpréter,
Ne pas s’apercevoir que d’autres fomentent d’ineffables futurs tracas,
Par de là les sortilèges et les incantations.
N’y trouver que rage et
Torpeur Immobile
Les yeux ouverts sur un esprit divaguant,
Bouche close n’ayant plus la force de parler,
Mais que fomentent réellement les DEMANDE A LA POUSSIERE, et surtout, fomentent-ils quelque chose ? Mis à part un style qu’ils perfectionnent à chaque sortie (« Bois de Justice » approche de la perfection malsaine avec son riff concentrique et son chant soudainement susurré), un style qui oppose la colère noire et la résignation d’un constat inévitable (« Léger Goût de Souffre » et ses références à la scène Black française des années 2000) : celui d’un monde à l’agonie qui empile les cadavres comme les âmes les espoirs perdus.
Je n’hésiterai pas à dire que la musique de Quiétude Hostile est souvent ignoble dans le fond et les intentions. La lourdeur est suffocante, et le propos aussi lapidaire qu’une condamnation à mort de l’humanité entière. Et sans vouloir lever le voile de mystère qui nimbe cet album, j’affirmerai que sa conclusion « Expiravit » fait partie des actes de méchanceté vils les plus répugnants que j’ai pu connaître ces dernières années. Avec sa longue intro inquiétante et perverse, sa reprise dans les graves éprouvante, ses constantes cassures, cet épilogue définit avec acuité les instincts les plus malsains d’un groupe qui ne vous veut que du mal. Et ce final au saxo est d’une perversion délicieuse.
La souffrance heureuse. Le trauma cathartique. Utilisez toutes les oxymores que vous voudrez, aucune n’atteindra le niveau de vice de cette Quiétude Hostile.
Titres de l’album:
01. Léger Goût de Souffre
02. Morphème
03. Eréthisme
04. Quiétude Hostile
05. Perdu
06. Bois de Justice
07. l’Oubli du Contrasté
08. Expiravit
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