Un lundi matin ensoleillé, de quoi commencer la journée du bon pied…mais non. Plutôt que de laisser la météo influer positivement sur mon humeur, j’ai choisi la tumeur, celle du Black Metal le plus incorruptible, pour éviter à tout prix de sombrer dans les affres du bonheur qui finalement, est chiant comme la mort. Et la mort justement, a un balai. C’est en tout cas ce que nous explique DEATHSBROOM de son nom et de cette superbe pochette sans équivoque, qui voit une figure d’Epinal passer les poils sur le sol pour le nettoyer de sa poussière. Etrange iconographie pour un album plutôt clair, et le premier d’un groupe réduit à l’essentiel.
DEATHSBROOM, ce sont deux musiciens polyvalents. A gauche, Conjurer, qui prend en charge le chant, la guitare et la batterie, et à droite, Seer, qui lui assume la guitare, la basse, la batterie et les synthés. Sans réelle biographie, impossible de dater cette association, mais les six pistes proposées par ce Quietus suffisent à comprendre la démarche, même si le concept est expliqué de façon très absconse sur le Bandcamp du duo.
Nous marchons en avant vers cette fin inévitable. Quietus n’offre aucune réponse, juste des questions. Des cendres de vie balayées dans le néant. L’interminable procession des âmes vers Omega
Avec un tel postulat, pas facile de savoir de quoi il retourne, mais une fois passée l’intro de « The End… », le tout prend son rythme de croisière, tout en réservant quelques surprises notables au niveau des arrangements et des évolutions.
Quietus est sec comme un coup de trique, mais loin d’être unidimensionnel. Ses chapitres sont autant de marches vers l’apocalypse, la mort passant son balai magique en arrière-plan pour libérer l’espace de ses scories, tout en faisant virevolter une poussière mortifère. D’obédience assez classique, DEATHSBROOM refuse de passer à l’aspirateur, et s’enivre d’une atmosphère ancienne pour mieux propager son message d’inéluctabilité. A ce titre, « Vessel I » propose des pistes formelles, aussi agressives que mélodiques, et le riff servant de gimmick à l’introduction nous rappelle le meilleur du BM norvégien de légende, avant que les débats ne s’emballent au-delà de toute raison.
Ni avant-gardiste ni expérimental, le duo se contente d’une relecture habile des codes anciens, et place immédiatement les débats sur le terrain de la vélocité et de la violence froide, comme si un vent à décorner les bouefs de Satan nous agitait les neurones pour ne pas les remettre en place. On aime cette bande-son de l’enfer qui secoue l’échine, ces lignes de chant éructées comme à la parade mortuaire, et cette ambiance digne d’un MAYHEM des grands jours sombres.
Dès lors, DEATHSBROOM garde le cap et sa vitesse de croisière, tout en admettant le besoin d’utiliser des licks accrocheurs pour séduire les âmes perdues. C’est donc ainsi que les morceaux fonctionnent, dans cette alternance entre répulsion et séduction, pour un mélange terriblement homogène laissant une sensation de satiété auditive rassurante.
Sans aller jusqu’à offrir à la mort un costume flambant neuf, mais sans la réduire au rôle de Cendrillon des temps modernes, Quietus aime travestir son sujet pour lui faire côtoyer des personnages étranges, anonymes de passage racontant leur histoire de façon claire et captivante (« Vessel II », carton plein niveau espaces positifs, avec en exergue ces mélodies de synthé hantées). On se laisse alors entraîner dans un monde concentrique, résumant les idées de ces trente dernières années avec une indéniable facilité. Black/Death, Black /Punk, Blackened Thrash, tout y passe, et les astuces sont bien choisies. De fait, impossible de s’ennuyer à l’écoute d’un album varié, qui joue sur de nombreux tableaux, tout en poussant les curseurs de la puissance au maximum de leur rendement.
« Vessel III » ose donc la grandiloquence, et propose même quelques idées symphoniques, sans vraiment s’y concentrer. Mais les petits bidouillages sonores en font l’un des titres les plus surprenants de cet album, sans pour autant trahir les codes utilisés depuis le départ.
Et finalement, il n’y a d’autre possibilité que de ranger DEATHSBROOM dans la catégorie généraliste d’un Black pluriel. Ni Raw ni vraiment Progressif, mais résolument évolutif, pas vraiment War mais guerrier de l’impossible, Quietus reste passionnant et implacable de son entame à son terme, et culmine sur « Vessel IV » bien au-dessus de la concurrence.
Cette petite sortie est donc plus importante qu’on aurait pu le penser, et offre le visage étrange d’un duo grimaçant, mais capable d’exprimer ses idées sans les imposer de force. On regrette même que la déclaration ne soit pas plus longue, tant une quinzaine de minutes supplémentaires auraient pu porter l’exercice plus près de l’excellence.
Le lundi, la mort passe le balai. Alors ne laissez pas vos os traîner.
Titres de l’album:
01. The End…
02. Vessel I
03. Vessel II
04. Vessel III
05. Vessel IV
06. …of The Beginning
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