Je dois avouer que Serafino Perugino remonte progressivement dans mon estime depuis quelques années. Après nous les avoir bien brisées avec ses projets intra-muros consanguins, se contentant d’hybrider le talent de musiciens reconnus pour accoucher de side-projects tous plus inutiles et boursouflés les uns que les autres, le CEO a soudain connu une crise de lucidité, et s’est finalement concentré sur ce qu’il sait faire de mieux. Ramener dans son giron les formations les plus performantes, offrant enfin un peu plus qu’une simple obole destinée aux fans les plus hardcore de musiciens aux ego chafouins. Preuve nous en est encore donnée en ce mois de décembre réfrigéré avec le premier album d’un projet international trouvant évidemment ses sources en Italie, sous l’impulsion de deux instrumentistes locaux. Aux commandes du navire RAINTIMES, nous retrouvons donc les compères Pierpaolo “Zorro” Monti (CHARMING GRACE, SHINING LINE) et Davide Barbieri (WHEELS OF FIRE, CHARMING GRACE), entourés des talents cosmopolites de Michael Shotton (VON GROOVE), Sven Larsson, Andrea Gipponi et Ivan Gonzalez. Le résultat de cette association ? Un Hard Rock de très grande classe, louchant sévèrement sur un AOR de première catégorie, pour une petite heure en compagnie de compositeurs qui connaissent leur labeur, et qui osent respecter la tradition tout en y insufflant leur légèreté de ton. J’en vois déjà qui se lèvent au fond, et qui quittent la pièce, certains de s’endormir avant la fin. Je me permettrai de les retenir avec des arguments valides, pointant le fait que la léthargie n’est pas à l’ordre du jour, puisque Raintimes, l’album, recèle aussi des instants de fièvre de Rock pur, qui méritent largement le détour. Il suffit pour ça de patienter jusqu’au troisième morceau, « Don’t Ever Give Up », que des BONFIRE en forme olympique auraient pu graver sur leur Fireworks acclamé.
Dubitatif ? Alors tentez l’expérience et tendez l’oreille sans patience, car ces musiciens sans frontières (à part celle du nom de leur label, drôle.) savent y faire pour passer en revue un catalogue impressionnant de hits, de tubes, de morceaux inoubliables, et de clins d’œil à la décennie 80, celle-là même qui fêtait les combos du cru sans se demander si la mode allait changer de vue. Mais prenez donc en compte l’avis hautement subjectif d’un des instigateurs du projet, histoire de savoir à quelle sauce vous allez être joué :
« Raintimes est un album que je voulais vraiment enregistrer en tant que référence à mon amour et mon admiration pour THE STORM. J’ai écouté leurs deux albums jusqu’à en crever. Leurs rythmes, d’une pure classe mélodique, sont le meilleur raccourci entre l’AOR et le Rock mélodique. Et le choix de Michael Shotton n’était pas seulement basé sur son talent, mais aussi parce que je voulais donner à cet album une personnalité forte et rendre la musique encore plus personnelle et originale ».
Force est de reconnaître que l’enthousiasme de Pierpaolo “Zorro” Monti est basé sur une part de vérité, et une portion d’exagération. S’il est certain que ce premier LP n’a rien à envier à ceux de THE STORM, qu’il encense d’une façon tout à fait justifiée, la musique de son propre groupe n’a pas grand-chose d’original, ce qui ne veut absolument pas dire qu’elle est dénuée d’intérêt, bien loin de là. Mais on y sent d’énormes réminiscences de plusieurs groupes établis, tel EUROPE, qui n’aurait pas craché à l’époque de The Final Countdown/Out Of This World sur une ballade lacrymale et dramatique de la trempe de « Swan », que les frères Sweet se seraient empressés de reprendre à leur compte, en dédicace spéciale au divin. Mélodie sublime, arrangements théâtraux, chœurs angéliques, et timbre de voix proche d’un Joey Tempest (à tel point que sur certains tremblements de vibrato, on pourrait penser à un featuring du suédois en solo), on s’y croirait, back to 1986, mais nous sommes bien en 2017 et c’est à RAINTIMES que nous avons affaire…
Nonobstant cette parenthèse romantique, les sentimentaux savent aussi calquer les sonorités délicieusement agressives d’un AOR tirant la bourre à un Hard Rock un peu vénère, et lorsque les décibels parlent sur fond de nappes de synthés caressés, le compte est bon, et le mot le plus long, comme en témoigne l’imperfectible « I Need Tonight », qui donnerait bien des suées aux HAYWIRE, s’ils avaient pu en leur temps, partager la scène avec les DANGER DANGER ou SLAUGHTER. Car le son de Raintimes se rapproche plus volontiers de celui des LIONVILLE et des ONE DESIRE que de Richard MARX ou SURVIVOR, et a gardé prise avec une certaine réalité du Rock qui évite à ce projet de sombrer dans la mièvrerie la plus diabétique. Pas d’excès de glucose instrumental à craindre donc, l’insuline métallique n’est pas fournie, et pas indispensable, puisqu’entre deux interventions plus fragiles, le sextette (Michael Shotton – chant, Ivan Gonzalez & Sven Larsson – guitares, Davide Barbieri – claviers et chœurs, Andrea Gipponi – basse et Pierpaolo Monti – batterie) durcit subtilement le ton pour se frotter à un Hard Rock précieux, mais furieux (« Just a Little Bit More », « Together As Friends », digne d’un TNT au sommet de sa frange), osant même parfois le coup de poker de la blue-song progressive mais envoutante et incisive (« Empty Days », six minutes de démonstration sans exagération). Il faut dire qu’avec une équipe d’un tel calibre, il eut été fort étonnant de déplorer quelques absences, ce que les interventions en solo des deux guitaristes affirment d’une flamboyance torride, taquinant même le maître Malmsteen lorsque les sextolets commencent à chauffer (« Forever Gone »).
Les italo-hispano-suédois s’en sont donc donné à cœur joie, pour signer l’un des meilleurs albums de Hard Rock mélodique/AOR de cette fin d’année, et il n’est pas étonnant que ce bon Serafino se soit empressé de les signer après avoir écouté des démos déjà très peaufinées. En parlant de production, celle de Raintimes est un véritable modèle du genre, se voulant smooth lorsque l’émotion pointe le bout de son nez, mais laissant rugir la distorsion lorsque les musiciens se sentaient déchaînés. S’il est certain que leur hargne garde des proportions tout à fait raisonnables, la fusion entre Rock teigneux et radiophonique euphorisant atteint un équilibre digne du sommet des charts d’antan, à l’image de ce « Make My Day », qui fera le vôtre de son irrésistible refrain, qu’on s’imagine bien entonner en frappant dans ses mains. De beaux lendemains, voilà ce qui attend ce premier album d’une maîtrise technique et artistique incontestable, qui s’invite au banquet des meilleures sorties du genre, et qui redore encore un peu plus le blason de Frontiers, qui doit se réjouir des échos d’ores et déjà très positifs que l’album a reçu de la presse repue. Il faut dire que les journalistes ont dû fondre en abreuvant leurs oreilles d’un « I Need Tonight », sur lequel Michael Shotton donne toute l’étendue de son talent vocal, solidement soutenu par des chœurs vainqueurs. Mais cet exemple, parmi tant d’autres, n’est qu’une goutte de probité dans un océan de sensibilité, et les arguments à opposer aux détracteurs éventuels d’une telle gageure sont si nombreux qu’il devient difficile de choisir les plus pertinents.
Un disque qui rend la vie plus belle, et les journées d’hiver moins froides. Le meilleur remède contre la sinistrose, qu’on devrait pouvoir trouver en pharmacie pour peindre notre moral en rose.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
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NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09