Etrange de chroniquer le premier album d’un groupe fondé en…1989. C’est pourtant ce qui m’arrive en ce moment même, puisque je m’apprête à vous entretenir du premier méfait des brésiliens de LEPROSY. Un nom qui sent bon le Chuck Schuldiner des familles, et qui entretient des liens assez ténus avec le Death, mais pas forcément celui de DEATH. Non, un Death plus Thrash, tel que pratiqué par les standards DEMOLITION HAMMER, INCUBUS ou SEPULTURA.
Félicitons donc ce quatuor pour sa persévérance, même si son histoire a été mise entre parenthèses entre 1995 et 2019. Les six premières années d’activité se sont résumées à deux démos, avant le comeback de 2019, qui lui-même n’avait généré jusqu’à présent qu’une poignée de singles, regroupés en 2024 sous la forme d’un album en bonne et due forme. Merci donc messieurs, et passons aux choses sérieuses :
Vos chansons.
LEPROSY est un acteur capable de la scène brésilienne, et l’un de ses plus anciens représentants. Son Death/Thrash est formel, de bonne facture, calibré, peaufiné, mais assez sauvage pour intéresser les plus cruels. Remus Silva (basse), Lord Biula (batterie), Rinaldo Macedo (guitare) & Allan Paulino (guitare/chant), tous membres d’origine ont enfin pris le temps et saisi la bonne occasion. Reborn in Yourself est donc une revanche sur le destin, et la possibilité de s’exprimer sur une durée plus conséquente, et bénéficier des outils de promotion modernes.
Un conseil avant d’aller plus loin : ne vous attendez pas à la révélation sur le chemin de Damas. Si le groupe se montre d’une solidité à toute épreuve, s’il manie les codes de l’hybridation avec beaucoup de panache, il n’en reste pas moins classique dans son agression. En modulant sa bestialité d’une bonne dose de mélodie à l’américaine, LEPROSY se présente sous un jour assez flatteur, ce que révèlent assez rapidement des titres comme « God of Clay » ou « The End of Times ». Loin du bourrin chafouin, Reborn in Yourself est donc d’un caractère abrupt, mais d’une approche assez facile. Les syncopes sont pleines, les accroches populaires, le chant rocailleux un poil monocorde, et le souvenir facile. Mais les brésiliens ne se reposent pas non plus totalement sur les lauriers de leur ancienneté, et jouent le jeu de la nouvelle génération qui admire l’ancienne.
La leur donc.
Un brin de nostalgie, une production large d’épaules, une musculature musicale plus fine qu’il n’y parait, pour un premier album qui suinte de rage, mais qui l’exprime avec intelligence. Avec quelques inserts plus finement tranchés et plus proches d’un Thrash traditionnel et graveleux (« Merry Christmas to All », ironie quand tu nous tiens), ou au contraire de gros morceaux sans gras ni nerfs (« Killer Sickness », l’impression d’être suivi par la mauvaise personne, la mauvaise nuit à la mauvaise heure), Reborn in Yourself se montre donc compétitif, suffisamment en tout cas pour vous inciter à visiter la playlist YouTube du groupe.
Méritant. C’est le mot qui vient à l’esprit quand on écoute cet album. Solide. Professionnel. Investi. Honnête. D’autres mots pourraient être employés, mais la chose est bien résumée. Avec une belle collection de riffs, des accélérations vraiment fortes et une persuasion de tous les instants, LEPROSY revisite son histoire avec brio, et beaucoup de puissance. On regrettera sans doute l’absence de chœurs, et une certaine facilité dans le mid tempo, mais globalement, l’impression est bonne, et plus ou moins durable.
La fin de l’album a un peu plus de mal à convaincre, entre la lourdeur peu inspirée de « Headless Mule », et le binaire précipité de « So Rest in Peace ». Ce qui est d’ailleurs dommage puisque le dernier morceau, « Harmonic Melancholy of Sadness » est plus une outro qu’un titre à part entière. La dernière sensation est donc assez mitigée, ce qui remet en cause la bonne opinion initiale.
En définitive, LEPROSY peine légèrement à convaincre du bien-fondé de son acharnement. On reste sur sa faim, un tiers du métrage (et le plus important) étant en dessous des normes de qualité attendues. Peut-être que si le quatuor insiste, et parvient à enregistrer un second album, ces quelques erreurs seront corrigées. Ceci étant dit, ils avaient déjà largement eu le temps de ne pas en faire.
Alors, encouragements, mais attention. Ne pas trop se reposer sur une petite réputation, et en donner à son hardant au public.
Titres de l’album:
01. Reborn in Yourself
02. Insurrection
03. God of Clay
04. The End of Times
05. Merry Christmas to All
06. Killer Sickness
07. Headless Mule
08. So Rest in Peace
09. Harmonic Melancholy of Sadness
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