« Avoir un physique de déménageur ». Tout le monde ou presque connaît cette expression destinée à décrire un individu plutôt bien bâti. Mais plus rares sont les gens capables d’utiliser l’expression « faire une musique de déménageurs ». Et pour cause, puisqu’elle est purement australienne, et typiquement Hardcore. Blackened Hardcore pour être plus précis, ce qui situe d’emblée les débats sur le terrain de la violence musicale la plus sombre. Mais dans quel contexte utiliser cet adage, qui finalement, reste assez vague en termes d’acuité artistique ? Simple, en parlant par exemple du premier longue-durée des australiens de REMOVALIST, qui sans partir en tournée avec une remorque U-Haul savent transbahuter leur brutalité de déserts en cités, histoire de convertir au passage quelques chalands éventuels atteint d’une bougeotte Core que rien ne semble calmer. Il faut dire que ce quintette (TH HW WP HC VA, vous n’en saurez pas plus que ces initiales et moi non plus) pratiquent un style plutôt charpenté et solidement planté, du genre à résister aux tempêtes de sable et autres invasions d’insectes en plein été. Et l’été austral, faites-moi confiance, c’est du genre à bien tanner la peau des âmes inconscientes. Inutile pour autant de vous tartiner la tronche de crème protectrice, puisque même les indices les plus élevés ne sauront vous protéger contre les brulures de cet éponyme début, qui vous ratatine la couenne en moins de temps qu’il ne vous en faut pour hurler « fait chaud ici ! ». Alors, tentés par une grosse dose d’U.V made in Australia ? C’est parti, mais méfiez-vous, avec ça bonjour les traces de langouste sur les épaules…
Celles des REMOVALIST sont plutôt carrées, ce qui leur permet de mouliner comme des tarés, au son d’un Crust dit « à la suédoise », agrémenté de véhémence typiquement anglo-saxonne, qui agrémente un carnage en mode D-beat/Crust méchamment dense, à faire passer les NAILS, URSUT, PRIMITIVE MAN et autres références ultimes pour de gentils dragueurs de plage touristique. Ici, la bestialité est tangible, les hurlements horribles, l’agression permanente, et la lourdeur oppressante. Car en bon combo de Blackened Core qui se respecte, le quintette de Melbourne perpétue la tradition du métissage, et pioche dans le Math, le Crust, le Sludge et le D-beat de quoi dynamiser son Hardcore et dynamiter les corps. Après avoir publié une démo initiale en mars 2013, ces musiciens se sont fait les dents sur un split (avec CAGED GRAVE, novembre 2014), puis les biceps sur un EP perso (Verses, janvier 2015), avant de s’entraîner live et en répète pendant trois ans histoire de préparer leur grand soir. Ce grand soir est finalement arrivé un beau jour de janvier de cette année, et Removalist a bénéficié d’un traitement sonore tout à fait adapté, en se laissant capter sur bande par Mike Deslandes (membre de YLVA, mais aussi producteur de COERCE, SOFT WHITE MACHINE et COLOSSVS), qui a accompli le travail idoine pour faire sonner ces morceaux aussi agressifs que possible. Il faut dire qu’on retrouve en sus au niveau mastering l’increvable Brad Boatright (eux, mais aussi ça, les autres, et puis pas mal de têtes connues aussi), ce qui nous donne au final un son à décorner les camions de déménagement, sans les faire passer sous un pont aux dimensions trop restreintes. Pour autant, et malgré une fine équipe aux compétences prouvées et approuvées, ne comptez pas vous mettre entre les feuilles un album manufacturé pour sonner comme ceux des autres petits protégés. Car les REMOVALIST ont une forte identité, qui les rapprocherait d’ailleurs de l’école russe du style, qu’ils confrontent aux enseignements US les plus âpres. Un résultat au-dessus de tout soupçon, pour un disque qui joue la variation dans le fracassage de béton, et qui ne néglige pas l’apport d’une mélodie chétive pour mettre en relief sa puissance primitive.
En laissant la musique hurler d’elle-même, elle nous raconterait certainement de quelle vicieuse façon ses concepteurs l’ont torturée pour la faire rentrer dans une case confinée, histoire de ne pas diluer sa force dans d’interminables tergiversations. Mais avant de pouvoir l’incruster dans la catégorie désirée, ces monstres l’ont travestie, déguisée, déformée, pour lui faire adopter les courbes d’un Darkcore salement assombri et esseulé (« Indomitable Will », limite Doomcore quand même, et de quoi filer des cauchemars à Phil Anselmo et ses Illegals), l’ont ratiboisée pour l’empêcher de dépasser d’un cadre très balisé (« Ex-Person », moins de deux minutes d’un Grind habilement grimé en Crust malmené), l’ont obligée à prêter allégeance aux doubles Dieux CONVERGE/NAILS (« Temporary Resident »), accélérée pour pouvoir se montrer aussi compétitifs que heurtés (« Mosquito - Reflection » ou comment accumuler les changements de tempo et de thème pour perdre les derniers qui suivaient au tableau), pour finalement la rendre schizophrène et persuadée d’être un double des ISIS, des INFEST, des EYEHATEGOD, des DISCHARGE et des NAPALM DEATH (« Hollow », un final qui brûle ce qui reste de rideau, et qui ne revient même pas pour saluer les badauds). Ouf. Tout ça va très vite, est purement complexe et terriblement clair à la fois, mais a le mérite de repousser les limites d’un style qui commençaient à approcher des siennes, et à tourner en rond comme une pauvre chienne cherchant son os déjà trop rongé. Et bien que les australiens n’en soient pas à leur coup d’essai, ils soignent un LP presque parfait, qui place la brutalité, l’intelligence, la sournoiserie et la violence au même niveau, et qui nous laisse au tapis, comme après un déménagement du cinquième étage sans ascenseur, et sans l’aide d’amis. Mais le principal atout de ce genre de réalisation est de pouvoir vous faire comprendre ses ambitions, mais aussi le sens de cette fameuse phrase, « faire une musique de déménageurs ». Car les REMOVALIST vous prouvent que pour aller d’un point A à un point B avec tous vos meubles, pas besoin de cinq heures. Vingt-huit petites minutes suffisent. Et ça fait un peu peur.
Titres de l'album:
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30