Avoir été l’instigateur d’un mouvement qui a fait trembler la scène Metal sur ses bases fragiles n’est pas un héritage facile à gérer, et KORN en sait quelque chose. Depuis ses débuts, le groupe a été adoubé par une nouvelle génération saluant son nouveau leader, et conspué par l’ancienne qui ne voyait en son avènement qu’un signe de plus annonçant l’apocalypse. Face à cet affrontement verbal, KORN a toujours adopté la même attitude je-m’en-foutiste qui consiste à ignorer les critiques pour aller de l’avant, même s’ils ont dû essuyer bien des tempêtes. Accusés de statisme et de recyclage dans la déchetterie de leurs propres souvenirs (Untitled Album, Korn III), d’opportunisme en essayant de séduire la nouvelle vague en s’associant à SKRILLEX, 12TH PLANET, EXCISION, DOWNLINK, KILL THE NOISE, NOISIA sur le toujours très décrié The Path of Totality, le groupe de Bakersfield s’en est toujours tiré en restant fidèle à ses principes sans se soucier du qu’en dira-t-on.
Et c’est pour ça qu’on les aime, du moins ceux qui savent faire la différence entre les pionniers libres et les suiveurs enchaînés.
Alors que le monde aurait dû acclamer la tournée en support du monumental The Nothing, retour en grâce salué par les critiques les plus réfractaires - le silence s’est soudainement imposé et a réduit le quintet au cloisonnement, comme leurs petits camarades de scène. Et comme tous les autres, KORN a profité de cette période d’enfermement forcé pour faire ce qu’il sait faire de mieux, composer, enregistrer et produire un nouvel album au lieu de se lamenter sur son sort. L’apanage des artistes qui combattent l’adversité de leur créativité. A ce moment-là, entre 2020 et 2021, le groupe était pour la première fois de sa vie, libre, dégagé de toute contrainte. Plus de label, pas de promotion à assurer, les ailes déployées, et l’envie d’en profiter décuplée. Chacun de ses albums étant scruté à la loupe, l’occasion était trop belle de se laisser aller à un processus de création naturelle, et d’écriture moins automatique que par le passé. Revenu à la une des magazines grâce à deux albums terriblement malins, KORN avait là une belle carte à jouer pour prouver que la publicité et l’engouement n’ont rien à voir avec leur légitimité et leur longévité. Et pour ce faire, ils ont choisi de créer des chansons simples, pour l’album le plus court de leur carrière.
Mais pas le moins intense.
A peine trente-trois minutes de musique, voilà qui est fort peu coutumier de la part d’un quintet qui n’aime rien de plus que s’épancher et prendre son temps pour expliquer son point de vue. Mais cette concision leur permet justement aujourd’hui de se recentrer sur leur passé, et d’en proposer un survol assez exhaustif.
Requiem affiche un titre pourtant ambitieux, en paradoxe de son contenu, simple comme bonjour et clair comme de l’eau de source souillée d’hydrocarbures échappés d’une épave. Il a été sobrement présenté en amont via le clip de « Start The Healing », l’un des morceaux les plus addictifs de l’ensemble avec son flow coulé de Davis et ses riffs d’arrière-plan monolithiques, puis en grandes pompes, lors d’une release party, accessible avec des vêtements noirs et un passe sanitaire. Drôle d’époque qui conjugue liberté d’expression et obligation de sureté, mais qui convient finalement bien à une œuvre qui elle aussi scinde les deux composantes, la pénombre et la lumière, le présent et le passé, occultant totalement l’avenir que KORN a mis entre parenthèses le temps de neuf morceaux.
Et si l’on se rend compte assez rapidement que Requiem n’est pas le magnum opus d’un groupe qui l’a déjà écrit au moins deux ou trois fois, on se satisfait très bien de ces chansons qui respirent, qui subissent moins les automatismes, et qui finalement, offrent un versant différent qui complète celui gravi à l’occasion de The Nothing. Un son plus aéré, une compression discrète, un Davis au sommet de sa forme qui revisite tous ses modes d’expression, et la lourde basse de Fieldy, en pause depuis pour une durée indéterminée, mais qui heureusement a laissé ses graves sur bandes pour assurer la profondeur.
Les cinq membres sont en osmose depuis longtemps maintenant, le retour de Brian est entériné et accepté, la frappe de Ray assurée et sobre comme d’habitude, mais c’est l’ambiance qui fascine sur ce nouvel album, qu’on aurait tort de prendre pour une simple pause entre deux affaires plus urgentes et importantes. Car dans son style, Requiem est quand même un grand album, justement parce qu’il ne l’est pas de ses proportions et ambitions. La seule affichée a été celle de pouvoir écrire sans pression, de choisir ses sons sans tenir compte des attentes, et de ne pas se préoccuper de l’avenir en se concentrant sur le présent. On le sent sur le roublard « Lost In The Grandeur », qui replace l’amertume d’un ALICE IN CHAINS au centre des débats, ou sur « Forgotten » qui nous ramène à l’époque de la marelle de Follow The Leader.
KORN est donc toujours un leader, mais pour une fois, n’a pas son statut en tête. En écoutant Requiem, on sent uniquement que cinq hommes qui se connaissent bien ont juste voulu prendre le temps de prendre du plaisir, et de nous en donner par extension. Il n’y a pas d’enjeu, même si quelques perles estimables se cachent dans l’huître du silence promotionnel.
Le classicisme évanescent de « Disconnect », celui plus direct de « Penance To Sorrow », tube évident au refrain si formel qu’on a l’année 1994 qui nous démange les chairs, « My Confession » qui renoue avec ce phrasé Hop et cette guitare de la fin des nineties, et cet aveu de crainte en épilogue assez bien choisi, « Worst Is On Its Way », qui nous conforte dans nos peurs les plus fondamentales : le pire nous attend toujours.
Alors, pause, simple break dans la grandeur, culte remisé au placard, KORN reste KORN et ne surprendra personne, rassurera quelques fans égarés qui retrouveront la simplicité des premiers jours, et propose ainsi un faux best-of d’originaux qui se bonifieront avec le temps.
Requiem for a dream, ou Requiem for a nightmare ? Avec KORN, les deux se mélangent comme dans n’importe quel conte horrifique de son époque.
Titres de l’album:
01. Forgotten
02. Let The Dark Do The Rest
03. Start The Healing
04. Lost In The Grandeur
05. Disconnect
06. Hopeless and Beaten
07. Penance To Sorrow
08. My Confession
09. Worst Is On Its Way
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@DPD: que METALLLICA n'apporte plus rien à la scène depuis 30 ans, je pense que ça fait plus ou moins consensus. Mais je ne vois pas ce que LORNA SHORE apporte non plus.Ceci étant dit, qu'est-ce qu'un "jeune" de la scène. Moins de 40(...)
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