Lorsque j’ai découvert le premier album de SACRED OATH, A Crystal Vision en 1987, il y a deux choses que je n’aurais pas imaginées : la première, que le groupe serait encore vivant et productif trois décennies plus tard (musique atypique, micro-label, etc…), et la seconde, qu’il faudrait attendre presque vingt ans pour découvrir une suite à ce premier chapitre. Ce sont pourtant dix-huit ans qui ont séparé A Crystal Vision de son immédiat successeur A Crystal Revision, y faisant une directe allusion. Et ce qui aurait pu n’être qu’un one-shot avant braderie totale a en fait été le signal du départ de la seconde et valide partie de carrière du groupe de Danbury, Connecticut, qui depuis 2005 enchaîne les longue-durée avec une belle constance. C’est ainsi qu’en 2021, nous fêtons non seulement les trente-sept ans de carrière du groupe, mais aussi son neuvième album studio, avec ce Return of the Dragon, autoproduit, et intervenant quatre ans après le dernier témoignage discographique Twelve Bells.
Brendan Kelleher (basse), Kenny Evans (batterie), Bill Smith (guitare), Damiano Christian (guitare) et Rob Thorne (guitare/chant) s’en reviennent donc avec un line-up complété d’un troisième guitariste, à l’image des groupes de Rock sudiste ou d’IRON MAIDEN, et autant dire que cet ajout n’est pas qu’un gimmick, loin s’en faut. Le quintet sonne plus agressif, les riffs sont démultipliés, l’agression est permanente, mais SACRED OATH n’a rien sacrifié de son originalité sur l’autel de la puissance. Leur musique est toujours aussi difficile à décrire, entre Heavy épique et puissant et Thrash light mais mordant, le tout assaisonné d’une bonne dose de vinaigrette Power, de quoi rendre fous les amateurs de musique franche des eighties, mais aussi de quoi assoiffer les amateurs d’originalité. A l’image de nombreux combos issus des années 80, dont HEIR APPARENT ou MANILLA ROAD, SACRED OATH a choisi de ne jamais choisir et de laisser parler son instinct, ce qui a toujours donné lieu à des créations uniques, ne laissant personne indifférent, attitude ne leur permettant évidemment pas d’accrocher les masses, mais de se constituer un following fidèle et curieux. Et ce neuvième longue-durée est encore une réussite en soi, avec un panel de chansons variées, culottées, mélodiques, furieuses ou progressives.
Look fardé, image distordue, maquillage bizarre et de faux airs de KILLING JOKE, voilà pour le look, la partie la moins importante de l’affaire. Musicalement, le groupe n’a pas beaucoup changé depuis sa relance des années 2000, et louvoie toujours entre les genres avec un bonheur certain. Ce que l’on remarque immédiatement sur Return of the Dragon, c’est que le dit dragon doit affronter un déluge de plomb émanant des trois guitares qui s’en donnent à cœur joie dans des gerbes de riffs à faire fondre l’acier le plus trempé. La pauvre bête doit souffler de tous les côtés pour ne pas finir brulée immédiatement, et un morceau de l’ampleur de « Empires Fall » a largement de quoi transformer la bête cornue en un pauvre tas de cendres. L’énergie est donc toujours aussi intense, l’inspiration toujours aussi noble, entre QUEENSRYCHE et ANNIHILATOR, avec ces clins d‘œil à la génération des CRIMSON GLORY, tout en conservant une optique terriblement personnelle. Et c’est via « Cthulhu Wakes » que le quintet nous accueille dans sa nouvelle aventure, pour le moins tumultueuse et jonchée de turpitudes et autres défis à relever.
Les deux membres fondateurs que sont Rob Thorne et Kenny Evans assurent toujours le rôle de pivot et de lien avec le passé, et en enrôlant le jeune Damiano Christian il y a quatre ans, alors qu’il n’en avait que dix-huit a été un sacré pari, brillamment relevé par ce nouvel album. On sent la niaque revenue, on sent l’envie d’en découdre, et les compositions prennent des allures de feux d’artifices interrompus, illuminant un ciel classic Heavy pour lui donner de faux airs de tempête Thrash, avec en appui pour les plus sensibles des mélodies en éclairs immédiatement mémorisables (« Hammer of an Angry God »). Parfois populaire, mais jamais compromis, toujours passionné et créatif, le groupe américain nous propose donc une sorte de résumé amplifié de ses années de reformation post-2000, et parvient parfois à égaler la magie du sacro-saint A Crystal Vision. Il est encore trop tôt pour affirmer si Return of the Dragon a de quoi rivaliser avec ce classique underground mais les musiciens et compositeurs ont mis toutes les armes de leur côté, allant jusqu’à essayer de séduire les accros au Heavy ricain le plus abordable (« The Next Pharaoh », aux syncopes diaboliques).
Tous les morceaux ont quelque chose de personnel à proposer, et la basse de Brendan Kelleher prend un malin plaisir à s’incruster dans le déluge de guitare pour nous offrir un joli parapluie rythmique. Entre franchise immédiate et up-tempo jumpy but thrashy (« Last Ride of the Wicked Dead »), et longue suites sombres et évolutives à la SAVATAGE (« Return of the Dragon »), SACRED OATH passe en revue toutes les composantes du Heavy US des années 80, remis au goût d’un jour plus grave et puissant. Sans se trahir, mais en s’adaptant à son époque et ses exigences, le quintet nous livre une belle performance, un peu mystique sur les bords, enivrante et envoutante, avec toujours cette science des arrangements vocaux.
L’album offre un bel équilibre entre l’émotion et la passion, avec des charges plus virulentes allant jusqu’à évoquer une percussion fortuite entre PANTERA et DREAM THEATER (« At the Gates »), et si parfois, l’attitude sonne un peu formelle, et l’approche traditionnelle (« Into the Drink »), SACRED OATH s’en extirpe rapidement de sa créativité et de son unicité. Ainsi, le final « Root of All Evil » et sa sublime intro acoustique nous offre l’épilogue rêvé, un peu onirique au départ, puis soudainement cauchemardesque, de ses riffs purement Thrash et de sa rythmique en rouleau compresseur alternatif. Toujours aussi imaginatif et attaché à ses racines, SACRED OATH reste donc fidèle à sa réputation de perpétuel outsider ne faisant rien comme tout le monde, et signe un neuvième album impeccable, quoique réservé une fois encore à une fanbase de connaisseurs. Mais rien ne vous empêche de découvrir ce groupe magique via Return of the Dragon, qui constitue une porte d’entrée fiable sur leur univers.
Titres de l’album:
01. Cthulhu Wakes
02. Last Ride of the Wicked Dead
03. Return of the Dragon
04. At the Gates
05. Empires Fall
06. Hammer of an Angry God
07. The Next Pharaoh
08. Primeval
09. Into the Drink
10. Root of All Evil
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30