Lorsqu’un groupe vous colle d’entrée une rouste de la puissance de « Carbon Shadows », on a tendance à le prendre au sérieux. Ce morceau, impitoyable, mélodique mais cruel a de faux-airs de STRAPPING YOUNG LAD déambulant dans les ruelles historiques de la Bay-Area, à la recherche d’une inspiration roots indiscutable. Mais les GROSS REALITY ont prouvé depuis longtemps qu’ils étaient une force vive de la nouvelle scène Thrash californienne. Depuis 2014 plus précisément, lorsqu’Overthrow nous était tombé dessus en mode tonne de briques.
Rien d’étonnant dès lors de constater que plus les années passent, plus le combo de Raleigh perfectionne sa méthode, reposant sur une fusion générale entre Thrash, Death et Metal extrême. Et s’il a fallu attendre six années pour enfin découvrir le successeur d’Escaping Gravity, cette patience est aujourd’hui récompensée par un carton plein, tiré à boulets rouges par des musiciens affutés, remontés, et prêts à en découdre avec les plus grandes références d’hier.
Divebomb Records, grand promoteur es-Thrash n’Death, réaffirme son soutien envers les originaires de Caroline du Nord, et place même ce troisième album en tête de gondole de son site officiel. Rien de surprenant, puisque ce disque, aussi intense qu’une séance de pilates coachée par Chuck Norris et Hulk, est la plus grande surprise Thrash de ce début d’automne. Sous couvert d’un hommage à la scène californienne des années 80/90, GROSS REALITY continue de nous décrire une réalité effrayante, à base de déforestation, de pollution, de corruption, et autres mots en « on » qui balisent un avenir que l’on sait déjà funeste.
Mais autant partir en musique, et Return To Ruin semble la bande-originale la plus adaptée à cette fin de cycle qui nous réserve quelques catastrophes dantesques. Entre Techno-Thrash joué comme des dératés et Metal plus généraliste souple et fluide, Return To Ruin parvient à faire collaborer un Devin TOWNSEND revenant à ses premières amours, et un CRIMSON SLAUGHTER qui monte facilement dans les tours. Propulsé par une rythmique qu’on devient inépuisable, ce nouveau chapitre de la saga est tout simplement ébouriffant, enthousiasmant, jouissif et insistant, tant dans ses riffs sauvages que dans ses arrangements plus fins qu’ils n’en ont l’air.
Et si les premiers titres se suivent et forment une symphonie cohérente à la gloire de la violence la plus théâtrale, le quatuor (Daniel Powell - basse/chant, Roland Arthur - guitares, Jason Wheeler - batterie et Dylan Glotzer - guitare et nouveau venu) dévie vite vers d’autres horizons pour nous mettre en pamoison, via le radicalisme mélodico-punkoïde de « Mind at Large » OVNI orgiaque cherchant son plaisir sur toutes les planètes qu’il croise.
La magie opère donc, le retour en grâce confirme toutes les promesses tacites formulées depuis les années 2010, et GROSS REALITY devient donc très légitimement l’un des leaders de sa scène, loin devant les apôtres d’une nostalgie programmée et déjà connue avant d’être citée. Abritant le catalogue de riffs le plus impressionnant de la vague américaine de ces dix/quinze dernières années, Return To Ruin transforme les ruines en paysage enchanteur, cachant certes de vilains monstres derrière ses murs, mais aussi des chevaliers prêts à prendre les armes pour protéger le peuple.
Le peuple, ce sont ces thrasheurs qui ne crachent pas sur un brin de sophistication, du moment que la puissance n’en pâtisse pas. Des thrasheurs capables d’apprécier à leur juste valeur ces cocottes de guitare sur le surprenant « Time Portals », catapultant PINK FLOYD et MUSE dans un univers à la VOÏVOD, ou au contraire sujets à des crises de priapisme aigu, déclenchées par le radicalisme germain d’un autoritaire et totalement cramé « Nightmare Hall ».
La racine du propos se trouve donc dans cette alternance d’ambiances, dans cette confrontation de climats, qui permet à cet album de souffler le très chaud et le vraiment très chaud avec une facilité confondante. On admettra pour la fine bouche que quelques plans se dupliquent entre certains titres, mais on soulignera aussi la pertinence de ces soli épileptiques, et totalement en phase avec un support rythmique sidérant de précision et de vitesse.
Entre furie incontrôlable et capacités techniques largement au-dessus de la moyenne, Return To Ruin est plus qu’une confirmation, c’est une Epiphanie de violence, le point commun entre STRAPPING YOUNG LAD, EXODUS et VEKTOR, et surtout, une poussée dans les G qui retourne le cerveau. Les quatre américains n’ont reculé devant rien pour nous décoller le toupet, et ont lâché dans le panier des négociations leurs riffs les plus béton, riffs qui se multiplient comme des petits pains sous le regard d’un Jésus arborant un sémillant t-shirt ACCUSER.
Et ce sens de l’alternance est tout bonnement admirable. Entre ces inserts débordant de cruauté et ces longues évolutions progressives, GROSS REALITY étale son talent comme un gourmand la confiture sur sa tartine, et nous offre en sortie de route l’impressionnant « Solitary Hypnosis », séance d’hypnose Techno-Thrash/Modern Metal qui bouscule nos souvenirs.
Morceau à tiroir et énorme plus-value, cette conclusion était celle dont ce troisième album avait besoin pour mettre en avant ses arguments les plus probants. En piochant dans la culture extérieure au Metal des éléments pertinents (cette guitare en son clair qui titille les années 70 et 80), GROSS REALITY propose un melting-pot étourdissant, mais parfaitement à la hauteur de son talent.
S’il est difficile de se montrer définitif sur les options de succès critique d’un disque à peine paru, je tenterai le diable en affirmant qu’il sera difficile d’ici 2024 de le surpasser, tant il est totalement à part dans la production actuelle, plus volontiers vouée aux gémonies faciles d’une nostalgie plus vraiment gracile.
Titres de l’album:
01. Carbon Shadows
02. Soul Substance
03. Prison Planet
04. Mind at Large
05. Time Portals
06. Nightmare Hall
07. Dark the Sun
08. Return to Ruin
09. Solitary Hypnosis
Thank you for an awesome review, and such kind words. Thrash it loud, and STAY GROSS!!
Alors, autant j'apprécie beaucoup Wolfheart, et cette news ne va rien y changer, autant, pour moi, l'Arabie Saoudite est l'un des pires pays au monde... Alors, je ne suis pas arabophobe, mais ce pays pue terriblement ! Je plains les Saoudiens (et surtout les Saoudiennes) qui(...)
21/11/2024, 18:01
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20