Un homme, un label, trois groupes.
Non ça n’est pas le titre d’un concept gore à la mode développé en parallèle à certaines vidéos immondes du Darknet, mais bien le postulat de départ de LEIÞA, qui cache de son nom celui de Noise, musicien allemand omnipotent qui depuis quelques années nous abreuve de ses réflexions violentes. Le mystérieux Noise tient donc à garder l’anonymat, pour mieux se dévoiler dans ses divers projets musicaux, alternant les productions de KANONENFIEBER, NON EST DEUS et évidemment LEIÞA. Les trois groupes sont donc distribués par la structure Noisebringer Records, jeune label débutant qui est uniquement consacré aux exactions de ce musicien étrange aux photos absconses.
Etrange, mais bourré de talent. Musical bien sûr, mais pas uniquement. Les textes de Noise sont viscéraux, et abordent avec beaucoup de violence la thématique fragile de la dépression que le monde du Black Metal aime tant. Les mots sont donc choisis pour ceux qui les comprendront, et pour les autres, la musique se suffit à elle-même pour rendre le projet digne d’intérêt.
Entre BM classique, DSBM light et Black orchestral, Reue (remords, repentir) prône donc une certaine pluralité, et loin des one-man-bands qui décantent leurs infusions néfastes de manière clinique et industrielle, LEIÞA propose une plongée cauchemardesque dans les traumas d’une âme meurtrie par la solitude et la dépression, en mode spleen aggravé par un esprit nihiliste et renonciateur.
Brutalité toujours sous contrôle, mélodies distillées avec parcimonie, pour un flashback nineties savoureux et crédible. En échappant aux standards de production moderne, Noise s’embarque pour un voyage au bout de sa propre nuit, comme si Céline redécouvrait les travers de son époque pour une écriture moins poétique.
Entre DISSECTION, CRADLE OF FILTH, et autres repentants majeurs de la scène Black mélodique, LEIÞA se fraie un chemin vers les sommets, et utilise sa pathologie pour transfigurer ses influences. Entre incartades harmoniques délicieuses et fragiles et blasts ininterrompus, « 01.09.2015 » est une date à retenir, dont seul l’auteur connaît le sens, et représente sans conteste la meilleure ouverture de ces deux dernières années en matière de BM traditionnel et abordable.
Presque progressif dans le déroulé, ce deuxième album (qui fait suite au déjà exceptionnel Sisyphus paru il y a deux ans) ose la complexité, l’évolution, pour broder sur un thème avant de s’échapper vers un ailleurs lié par un fil d’Ariane à son cheminement initial. Pour faire simple, Noise fait du complexe avec du net, et ne se perd pas dans le dédale de son imagination. Ainsi, « Fremdkörper » (Corps étranger) nous propose un survol de toutes les tendances BM de ces dix dernières années, le tout souligné d’un chant âpre et âcre, qui laisse un goût de fiel dans les tympans, et marque la mémoire à jamais. On peut tout à fait se reconnaître dans cette thérapie individuelle s’adressant à un collectif public, et le propos de Reue est justement d’offrir à l’auditeur une histoire similaire à la sienne.
Tout au long des trente-neuf minutes de cet album, Noise s’essaie à tous les exercices de style, nous offre des cordes fragiles sur l’intro de « Reue » avant de partir en vrille dans une spirale de violence, conférant de fait à sa musique une âme, probablement la sienne, et du corps. Nous sommes donc loin du simple jet de bile BM habituel ou trop avant-gardiste, et un humanisme indéniable transpire de ces morceaux aussi personnels qu’universels dans leur résonnance.
On pourrait presque dire que la pochette de Reue en dit déjà très long. Cette silhouette squelettique à l’attitude désespérée est à l’image d’une musique qui sombre dans les affres de la déprime la plus sincère, et offre un écrin magnifique à un disque complet. Si les structures sont souvent similaires et en héritage d’un DSBM sobre et même parfois lumineux, les chansons n’en possèdent pas moins leur propre patine, et forment une fois assemblées une thérapie d’importance pour tous ceux que la vie a marqués à jamais.
On appréciera cette permanente opposition entre des mélodies traînante et des accès de fureur intense, qui parfois se mettent en arrière-plan pour susciter des émotions plus pures (« Schlaf »).
A la manière d’une conversation entre un homme et ses traumas ou entre un musicien et sa douleur créative, Reue touche, et n'utilise la véhémence du Black Metal que pour servir son propos. On pourrait même parler de Metal extrême au sens le plus large, puisqu’il est difficile de rattacher cette œuvre à un contexte trop précis. Néanmoins, les nombreux aplatissements suivis de bourrasques de batterie appartiennent définitivement au monde souterrain du Black, et ce second longue-durée s’y affale comme un patient dans un vieux canapé fatigué.
LEIÞA aka Noise est donc un projet très attachant, et la preuve qu’un musicien peut se montrer très prolifique sans perdre de vue les impératifs de qualité.
Titres de l’album :
01. 01.09.2015
02. Fremdkörper
03. Reue
04. Tier
05. Abgang
06. Schlaf
07. Rauch
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