Niveau débats existentiels et métaphysiques, nous avons eu l’œuf et la poule, la lumière du frigo, la raison de l’existence de Bernard-Henri Levy, et surtout, la problématique de la revendication de la création du Death Metal. Deux écoles s’affrontent depuis les années 80, ceux qui pensent dur comme fer que le MANTAS, futur DEATH de Chuck Schuldiner, doit en revendiquer la paternité, et ceux qui affirment que le POSSESSED de Jeff Becerra et Larry Lalonde avait déjà tout dit dès la première démo justement intitulée Death Metal en 1984. Certains petits malins vont jusqu’à penser que le HELLHAMMER de Satanic Rites était là avant tout le monde, mais nul n’est capable d’apporter une réponse précise à cette interrogation qui nous turlupine comme un derviche tourneur sous acides. Seven Churches ou Scream Bloody Gore en tant que signal de départ de cette vague de cruauté musicale qui aujourd’hui encore fascine des milliers de tarés de par le monde ? En étant pointilleux, on pourrait arguer du fait que Seven Churches, à cheval entre Death et Thrash, n’était justement pas complètement Death, malgré le morceau du même nom. C’est un argument comme un autre, mais pour qui se souvient des sensations ressenties la première fois qu’il a posé ce satané et satanique vinyle sur sa platine, il n’y a pas matière à tergiverser. Oui, c’est bien POSSESSED qui a popularisé la première forme la plus larvée de Death, d’une importance telle qu’elle a justement influencé le jeune Chuck dans sa recherche de traumas sonores poussés. Bref, restons-en là, mais le propos est d’importance au moment d’aborder l’un des comebacks les plus inattendus du Metal extrême, celui de POSSESSED que nous avions laissé sur le flanc, à la fin des eighties, et en mauvaise posture. Car le destin a bien failli avoir raison d’une des voix les plus symptomatiques qui soit, en s’acharnant sur le corps de ce pauvre Jeff, dont les photos en chaise roulante en avaient ému plus d’un…
Le nom de POSSESSED dans les nineties ne voulait plus dire grand-chose. Malgré une présence qui ne s’est pas démentie au cours du temps (une accumulation de démos, de compilations, de splits, qui permit au groupe de subsister dans les colonnes), l’attente d’un matériel frais se voyait systématiquement opposée une fin de non-recevoir, et c’est donc avec un bonheur sadique non feint que nous avons accueilli ce troisième album qui ne vit jamais le jour en temps et en heure. Mais du temps, il en a justement fallu à Jeff pour se refaire une santé, et surtout, pour trouver les bons comparses capables de remplacer le line-up historique de sa bête. Après tout, le dernier réel témoignage musical du concept remonte à plus de trente ans, et ce The Eyes of Horror qui s’était montré à la hauteur de la légende. Mais il faut remonter un an plus tôt pour trouver trace du dernier longue-durée des californiens, avec Beyond The Gates qui avait légèrement surpris les maniaques de bestialité tapageuse, montrant alors le visage d’un groupe plus mûr et plus affuté techniquement, qui proposait alors une musique toujours aussi violente, mais moins viscérale et plus organisée. Et en 2019, la question se pose alors de savoir quel faciès POSSESSED nous offre avec ce Revelations Of Oblivion proposé par Nuclear Blast, celui grimaçant de la bête cornue avide de sang de Seven Churches, ou celui plus sournois mais pas moins effrayant de Beyond The Gates ? Comme on pouvait s’y attendre, la réponse se situe en convergence, puisque ce troisième LP se veut synthèse des deux premiers, avec une tendance remise au goût du jour, mais qui respecte les orientations d’origine. Avec des compositions entièrement signées des quatre mains de Jeff Becerra et du guitariste/complice Daniel Gonzalez (NAILSHITTER, GRUESOME), Revelations Of Oblivion se veut sombre, glauque, mais aussi progressif et technique, ce qui nous assure une écoute aussi surprenante que rassurante, les deux hommes ayant collé aux principes de base du Death/Thrash naissant, en rapprochant la limite des exactions les plus bruyantes des deux genres à l’époque où ils commençaient à terroriser la planète.
Entourés d’instrumentistes aguerris qui n’ont pas attendu d’être convoqués pour se faire la main (Claudeous Creamer - guitare (DRAGONLORD, SERPENT, GIRTH), Robert Cardenas - basse (COFFIN TEXTS, MASTERS OF METAL, AGENT STEEL, MALICE, ENGRAVE), et Emilio Marquez - batterie (BRAINSTORM, SADISTIC INTENT, ENGRAVE, BRUJERIA)), le POSSESSED nouveau cru n’a pas à rougir de la comparaison avec la nouvelle génération, ni avec celle de sa propre légende. Bien qu’évidemment ce nouvel album n’a pas l’aura de Seven Churches, ni l’ambiance moite et glauque de Beyond The Gates, il ne déçoit pas, et présente douze nouveaux titres qui passent largement la rampe et les tests de qualité. D’abord, parce qu’on retrouve ce chant unique, vicieux, graveleux, hargneux, qui bouffe les syllabes tout en crachant chaque mot d’une pulsion morbide. Ensuite, parce qu’on retrouve par intermittence ces riffs exhumés des entrailles de l’enfer, et qui parfois, malgré une adaptation contemporaine, parviennent même à exhaler la méchanceté suintante de ceux qui dégueulaient de « Satan’s Curse » ou « The Exorcist ». C’est particulièrement frappant sur « Abandoned », qui malgré une double grosse caisse en mitraillette parvient à ressusciter l’esprit des attaques en staccato de Larry Lalonde, et ces petits licks bien vilains et possédés. Mais en décidant de proposer autre chose qu’une simple relecture de ses dogmes passés, POSSESSED affirme ses prises de position et « No More Room In Hell » de débouler comme un mort-vivant expulsé de sa tombe par une rage de bouffer les vivants par le cerveau. La production, puissante et profonde n’a bien sûr pas l’âme noire et maléfique du premier album, et se rapproche plutôt de celle de The Eyes of Horror dans sa clarté, ce qui n’empêche nullement un brûlot au goût délicatement amer comme « Dominion » de se faire une place au soleil de la haine.
Beaucoup plus ambitieux que n’importe lequel des travaux antérieurs, Revelations Of Oblivion est aussi moins surprenant, moins prenant sans doute, un peu plus calibré, mais toujours à même de nous faire comprendre l’importance de ce groupe que l’on a tant aimé. Les riffs sont certes souvent plus formels et passe-partout (le début de « Damned » en témoigne, tant on a le sentiment d’écouter WARBRINGER), mais dès que le chant unique de Jeff rentre dans la danse, la sensation est intacte, et le plaisir décuplé. Certains chapitres, un peu trop longs sans doute, mais porteurs d’une ambiance de moiteur (« Omen », qui aurait pourtant gagné à être raccourci d’une minute, mais dont les arrangements grandiloquents évitent la redite) bloquent parfois la montre, alors que d’autres, encore plus venimeux, jouent la pluralité et la fusion des époques (« Demon », qui passe par toutes les phases possibles), accélérant le cours du temps comme pour le rattraper. Il est évidemment inutile de chercher à savoir si oui ou non ce troisième LP est digne de la mystique développée par Seven Churches, puisque tel n’est pas le cas, mais pour un petit miracle que pas grand-chose n’annonçait, Revelations Of Oblivion est un effort solide de bout en bout, qui ne réconciliera pas les deux écoles de pensée, mais qui leur offrira une trêve autour d’un chaudron de Death Thrash fumant et bouillonnant. Et comme cette décharge de violence est emballée dans un artwork de rêve signé Zbigniew Bielak (ABSU, DEICIDE, GHOST, GORGUTS, PARADISE LOST), inutile de tourner autour du pot.
Titres de l’album :
1. Chant Of Oblivion
2. No More Room In Hell
3. Dominion
4. Damned
5. Demon
6. Abandoned
7. Shadowcult
8. Omen
9. Ritual
10. The Word
11. Graven
12. Temple of Samael
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