« En France, vous n’avez jamais su jouer du Rock n’Roll »
Gee, et si c’était vrai ? Après tout, entre les chantres de la cover yéyé des 60’s, les délires lysergiques du progressif chantant et fleuri des 70’s (ALICE, AME SON, et tous ces groupes en A qui confondaient transe bucolique et France électrique), les élitistes plaçant le classique et Coltrane sur le même piédestal (MAGMA), les Punks intellectuels de la fin des seventies, pétris de références, les maniérés et néoromantiques du tournant 80’s trop pédants et lettrés pour chauffer à blanc des amplis sous utilisés (MARQUIS DE SADE), et les maniaques de la citation british adaptant le Rythm n’Blues à Byron ou Chaucer (DOGS), le « vrai » Rock, celui qui tâche et qui entache n’a pas vraiment fait la loi dans la France de De Gaulle, de Pompidou, de Giscard ou Mitterrand, même si son versant Blues a connu quelques dignes représentants (Paul PERSONNE, Bill DERAIME, j’en passe et des plus fanatiques). Alors, est-ce vrai que notre beau pays n’a jamais été capable de transpirer au son d’accords simples sur fond de rythmique binaire ? Pendant longtemps, le handicap était patent, et ça n’est pas la tripotée de branleurs connaissant leur première érection live en assistant à un pauvre concert des rances INSUS qui vont me contredire. Sauf que depuis quelques années, nos musiciens semblent décomplexés, et prêts à accepter qu’en cette matière, leurs aînés n’ont rien inventé, et assez mal copié. Alors, oublié l’infériorité, et bonjour l’assurance, puisqu’après tout les exemples à pomper ne manquent pas, et que les hommages font toujours recette. Et ceux rendus par les CAROUSEL VERTIGO sont dignes d’un grand huit de la culture Marshall et Les Paul, de ces manèges qui sont une vie et qui nous mettent la tête et le cœur à l’envers, via une poignée d’hymnes citant les plus grandes références, sans avoir l’impression de piller leur répertoire.
CAROUSEL VERTIGO, c’est une rencontre fortuite, comme souvent dans le Rock épique, celle de deux hommes nés chacun de leur côté, sur un continent ayant une conception radicalement différente de l’autre, mais dont les deux cœurs battaient à l’unisson pour le même son. A gauche, le frenchy but chic Vincent Martinez (chant/guitare), et à droite, l’originaire du New-Jersey, comme Bruce S et Jon B, Jansen Press (guitare), tous deux fondus de culture Classic Rock US, au point de partager les mêmes obsessions pour le CCR, BAD COMPANY, FREE, AC/DC, AEROSMITH, GRAND FUNK, MONTROSE, mais aussi des bluesmen Johnny WINTER, Freddie KING, puisque de toutes façon, toute la musique vient de là, du Blues, comme disait notre seul rockeur célébré Johnny avant de trépasser. Alors, une fois ensemble et l’accord établi pour définir des frontières à dépasser, les deux compères se sont mis en tête de dénicher le complément de line-up parfait pour accoucher d’une première œuvre entièrement dédiée à la cause, celle qui unit des riffs bouillants à des lignes vocales de dément, histoire de taquiner le patrimoine mondial autrement qu’avec un béret et une baguette. Foin des clichés et autres constats d’incapacité d’une nation qui a toujours couru après le train sans jamais le rattraper, les quatre musiciens (outre les deux susnommés, ajoutez Olivier Brossard à la basse et Jimmy Montout à la batterie) ont donc choisi la voie la plus simple, celle qui pousse des musiciens à croire que leur place n’était pas là, mais quand, au milieu d’années 70 qui célébraient le stadium Rock tout en portant allégeance à celui des bouges et autres rades, en faisant couiner ses instruments au lieu de les surproduire pour faire les intéressants. Et de fait, après un premier album remarqué, Mighty en mai 2013 qui aurait pu se faire baptiser Almighty, les chevaliers du Rock puriste et bourré de références nous en reviennent donc avec une deuxième galette encore plus perfectionnée, au titre prédestiné, Revenge Of Rock And Roll, qui sans offrir sa revanche au Rock qui a l’habitude de souffrir, lui redonne ses lettres de noblesse comme les BLACK CROWES savaient le faire il y a trois décennies. Sauf qu’ici, toute l’histoire est survolée, résumée, synthétisée, pour la faire rentrer dans les chaumières des moins habitués et des plus réfractaires, qui se surprendront à dodeliner aux hymnes torrides de ce quatuor de passionnés.
Encore une fois, on trouve de tout sur ce LP, mais surtout le meilleur. Pas étonnant que le groupe ait été choisi et adoubé par le QUO lui-même pour honorer de sa présence ses tournées, dès lors qu’un diablement boogisé « Honey Do » paie son tribut au chaloupé des anglais, ainsi qu’au stupre bon enfant d’un BOLAN et au populisme décoiffé des SLADE et SWEET. Sans avoir peur d’être comparés, les CAROUSEL VERTIGO empruntent à droite et à gauche de quoi rembourser le crédit d’une France qui vit à stéréo depuis les débuts de frappe de Ringo, et nous balancent d’entrée un torride et enflammé « No More Hesitatin’ », qui en dit très, très long sur leur absence de remords de se croire rockeur d’antan et pas pleurnicheuse du présent. Orgue qui frissonne, guitares qui détonnent, riffs qui se complètent et rythmique qui pète, la recette est d’usage mais la préparation déjà prête pour que la sueur perle sur nos fronts de fans de tempêtes, suggérant même une sale ambiance à la Still Crazy, sans avoir l’âge canonique de ses participants. Vous n’avez pas cinquante ans ? Moi, pas loin, mais cette entrée en matière place ma naissance un peu moins loin, et me retransforme en l’ado que j’ai toujours été ce matin…Et en substance, ce Revenge Of Rock And Roll est peut-être le meilleur raccourci entre Paris et le Delta, ou Memphis, ou même Détroit, et peut-être Nashville ou New-York, pour peu que vous fermiez les yeux et que vous sentiez les cuivres vous réchauffer sous le manteau, ces mêmes trombones, saxos et trompettes qui permettaient à AEROSMITH et Bob SEGER de transcender leur Amérique blanche pour expier les fautes de pillage commises envers l’héritage noir. Black And Proud ? Peu importe la couleur de peau, lorsque celle-ci perle d’une énergie qui refuse le repos…
Alors, pas d’hésitation à avoir, on trace la route, on accélère pour ne pas être à la bourre, d’un up tempo démoniaque à l’ammoniaque (« Jackie Run Run »), on se planque quelques minutes à l’abri d’un énorme Blues-Rock que Paul et son FREE band auraient sans doute transcendé on stage, en souvenir d’un Otis Redding ou d’un Wilson Pickett en mal de nostalgie (« Hideaway », sublime de Soul déchirante). Mais trop fier, on sort de sa tanière pour faire résonner les guitares, qui en ont plus que marre de rentrer trop tard (« Hard Luck Lover », en manque de « Hard Luck Woman » du PURPLE, pour couple en association de malfaiteurs), et on cite des exemples, via les BLACK COUNTRY COMMUNION, qui auraient sans doute pu commencer un de leurs méfaits par cette envolée surgonflée et bluesifiée (« Get It On », plus Hughes que Bolan, mais le sex-appeal du second dans la voix veloutée du premier). Et puis un harmonica plus loin, on se ne soucie pas vraiment du lendemain, lorsque le Hard-Blues embrume le petit matin (« Well, Alright »), et nous entraine dans l’ivresse d’un soir de concert, lorsque l’heure du rappel à presque sonné l’appel de soli déchirés (« Don’t Take It To Heart »), avant de tirer sa révérence, peut-être, peut-être pas (« I May, I Might »), pour mieux revenir aux premiers froids pour incendier une nouvelle ville, un nouveau soir…
« En France, vous n’avez jamais su jouer du Rock n’Roll »
Gee, et si c’était des conneries ? Puisque finalement, en France, on a des idées, et surtout, des guitares et des voix éraillées. Alors, qu’est-ce qui nous empêche d’en jouer du Rock N’Roll après tout ? Les CAROUSEL VERTIGO eux ne se posent pas cette question, ils en jouent. Et vachement bien même, un peu comme si une mythique California Jam déménageait du temps et de l’espace pour s’installer à l’hippodrome de Vincennes, comme ça, juste pour le plaisir.
Oui, le plaisir man, parce que tout part de là…
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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