Au hasard des sorties, pour la plupart assez confidentielles, on tombe parfois sur autre chose, un univers différent, parce qu’on souhaite s’écarter des sentiers battus pour ne pas reparler encore de Thrash old-school, de Black expérimental, de Death putride ou d’AOR prévisible. Non que ces sous-genres ne bénéficient pas de mon soutien, bien au contraire, mais il arrive parfois qu’on souhaite un peu plus que du prévisible enthousiasmant, au risque de perdre un temps fou à débusquer la perle nacrée dans un océan d’huîtres faisandées. Et en traînant ma souris dans l’underground des plateformes de diffusion, j’ai justement fait une rencontre assez intéressante, celle d’un quintet qui certes ne bouleversera pas l’ordre mondial, mais qui bousculera assez les convenances pour se faire remarquer. Pensant au départ avoir trouvé une nouvelle signature anglaise, je me suis vite rendu compte que les musiciens du jour ne venaient pas de la perfide Albion, mais bien d’outre-Atlantique. C’est donc de Manchester, New-Hampshire que viennent les CONFORZA, créature protéiforme à la croisée des genres, et qui souhaite justement s’extirper du sien. Si j’avais lu une quelconque bio plus en amont, j’aurais certainement passé mon tour, préférant me coucher que remporter une mise non méritée, puisque visiblement, nos amis s’extasiaient jusqu’à présent dans une sorte de Deathcore très heurté, mais conforme aux dogmes établis. Heureusement pour moi, leur soif d’inconnu et d’inédit les a poussés à s’éloigner de leurs racines pour proposer quelque chose de plus évolutif, et se rapprocher d’un Death Metal progressif, certes bien dans son époque, mais suffisamment culotté pour mériter votre attention. Et en six morceaux seulement, ce nouvel album propose largement assez d’idées pour avoir une place dans votre playlist…
CONFORZA, ce sont donc cinq musiciens (Caitlin Marshall – chant, Jesse Blanchette & Mikey Frasca – guitares, Matt McSweeney – batterie et Matt Desmond – basse), sans complexes, mais aux ambitions affichées, se situant en convergence des extensions les plus bancales de notre nouveau siècle. En convergence de trois catégories extrêmes différentes (Deathcore, Death progressif et Technical Death), Revival joue donc la pluralité, et parvient sans peine à nous convaincre de sa pertinence. Faisant suite à un Beyond Being publié en 2015, ce nouveau LP synthétise en quelques sorte les instincts les plus mélodiques et les ires les plus barbares de la scène Death contemporaine, construisant ses morceaux au gré d’humeurs, la plupart du temps vindicatives, mais suffisamment évolutives pour laisser percer des rais d’espoir harmoniques. Toutefois, et malgré ces indications, il reste très difficile de situer les américains, qui prennent un malin plaisir à noyer le poisson avec l’eau du lac. Beaucoup trop techniques pour n’être que progressifs, beaucoup trop progressifs pour ne se reposer que sur leur bagage, trop mélodiques pour se contenter d’un label Death, et presque trop abscons et diffus pour ne pas se voir regarder d’un air expérimental, les CONFORZA passent leur temps à jouer avec nos nerfs. Chaque morceau semble en effet la somme d’un nombre conséquent de plans, d’idées qui vont et viennent, d’accélérations impromptues, de nappes vocales en second et premier plan, d’infusions presque BM d’avant-garde, de guitares qui s’entremêlent dans un ballet chaotique de riffs sombres et de soli jazzy, tandis que la basse, d’ordinaire bien cachée, s’impose au centre des débats, laissant croire à une liberté de ton permanente que le monstrueux « Regeneration » peine à dissimuler de sa vilénie instrumentale. Pour être plus précis, cette musique en perpétuelle mutation bouscule, choque, pousse les extrêmes dans leurs derniers retranchements, un peu comme si DODECAHEDRON perdait ses partitions pour laisser les EXTOL jouer avec en compagnie de GOJIRA et FLESHGOD APOCALYPSE. La scène vous semble difficile à concevoir et visualiser ? Tant mieux, parce que là est le nœud de la problématique. Nous ne sommes pas ici pour comprendre et vulgariser, mais bien pour nous laisser emporter par un maelstrom de sons et de textures qui s’empilent pour mieux nous faire tanguer.
A ce stade de lecture, beaucoup seront déjà passé à autre chose, et ils auront tort. Car loin d’une machinerie abstraite et expérimentale, Revival est d’une cohérence rare dans la démesure et la violence et « Life Cycle » de se rappeler des méthodes de WATCHTOWER et SIEGES EVEN pour les intégrer à ses équations à la ATHEIST et OPETH. On trouve de la mélancolie dans les harmonies, de la colère dans les élans les plus brutaux, et surtout, des capacités techniques ahurissantes de dextérité, qui produisent une sorte de big-bang épiphanique de strates sonores. La naissance d’une nouvelle galaxie Deathcore qui souhaiterait justement aller au-delà de ses propres limites ? Dans un sens oui, car l’approche virtuellement radicale nous ramène vers le sous-genre, tout en sublimant ses qualités et transcendant ses défauts. Ici, pas question de pilonnage systématique stérile, mais bien d’une progression dans le sens le plus noble du terme, progression par chapitres mais aussi dans la globalité, au point de friser un genre de Techno-Death-Jazz progressif (le break de ce fameux « Life Cycle » est tout bonnement irrespirable avec sa basse en mantra concentrique et sa déconstruction absolue) qui s’assume pleinement, mais qui ne substitue pas la cruauté au profit d’un intellectualisme de bas étage. En pleine continuité, le diptyque « Bloodline » continue sur la même lancée, mais accentue les aspects les plus abrupts, au point d’évoquer la possibilité de cinq instrumentistes jouant une portée différente. Mais lorsque tous se réunissent à l’occasion d’un pseudo refrain mélodique, l’instinct reprend le dessus, et l’efficacité parvient enfin à se faire une petite place. Et cet affrontement permanent entre désir d’être percutant et envie de se laisser aller est parfaitement envoutant, à tel point que ce nouvel album s’envisage plutôt comme un voyage erratique que comme une œuvre linéaire stricto-sensu.
De son entame à sa conclusion, Revival n’accepte donc aucune concession. Alors que « Consummation » raccourcit un peu les choses et semble les moduler, l’épilogue « We Are What We Loathe » en rajoute encore un peu plus dans la démesure, et copie les accents les plus répétitifs de MESHUGGAH pour les rendre encore plus irritants et corrosifs. Mur rythmique, basse qui continue d’explorer sans relâche, et duo de voix entre growls et arrachements de corde vocales pour une symphonie d’exagération totale qui fera fuir les plus modérés, mais qui remportera l’adhésion des plus affolés. Un disque qui ne s’adresse pas à tout le monde, mais qui a le mérite d’oser sans faire n’importe quoi, offrant des perspectives intéressantes au Deathcore le plus stérile qui se voit enfin extirpé de sa condition en impasse. CONFORZA, un nom à retenir pour un avenir des plus incertains, mais au présent qui brouille les lendemains.
Titres de l'album :
1.Life Cycle
2.Bloodline: Prodigal Daughter
3.Bloodline: Matriarch
4.Regeneration
5.Consummation
6.We Are What We Loathe
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