Voilà un groupe qui aura mis onze ans, deux EP’s, un live, et quelques dizaines de concerts (euphémisme) pour proposer son premier album, après avoir vogué pendant deux ans sous un pavillon différent. Les THE DEVIL’S HEIR furent d’abord connus sous le nom d’IOKANE entre 2007 et 2009, avant d’opter pour un patronyme pour le moins original cette même année. Rapidement, le groupe se forge un répertoire personnel, et propose à sa fanbase deux EP’s, le premier en 2010 en forme de clin d’œil à deux groupes légendaires (Extreme Noise Terror - The $4.99 EP), le second en 2013 (Initial Explosion), avant de disparaitre des radars discographiques pendant six ans. Et c’est en 2019 qu’on les retrouve en vie, avec le Live In Reno, sans savoir s’ils y ont tué un mec pour le regarder crever, mais ce qui est certain, c’est que le Thrash n’est pas prêt de mourir tant que des musiciens comme eux continueront de le jouer avec autant de passion. Venant d’Ely, dans le Nevada, THE DEVIL’S HEIR n’est pas le groupe lambda qui se contente de piller les grandes influences, et peut se targuer de posséder une approche et un son qui lui sont propres. On se demande d’ailleurs où les américains sont allés piocher leur ADN, tant leur musique est étrange, en convergence, utilisant des éléments de Hardcore, de Black, pour teinter leur Thrash d’une couleur bizarre, que l’on devine avec difficulté derrière un paravent de riffs à la SLAYER. A la rigueur on pense plus à l’arrière-garde de la dernière vague Thrash US des années 80, lorsque des groupes un peu tordus hébergés par des labels comme New Renaissance ou Wild Rags inondaient le marché. Et un morceau aussi personnel que bancal comme « #1 Fan1Brainless Coward » n’aide pas vraiment à situer les mecs sur le marché, ce qui est forcément bon signe en cette époque de formatage old-school.
Cinq potes, Thad Stark (basse), Mike Gregersen (batterie), Brendon Martinez (guitare), Harold Robertson (chant), et Jerod Jacob (guitare), pour élaborer ce Rex Mortuus qui dénote franchement dans la production actuelle. Loin des habiles faiseurs recyclant les recettes du Big 4 ou les astucieux recopiant les devoirs de l’école allemande, les THE DEVIL’S HEIR jouent un Thrash certes peu ancré dans son époque, mais qui aurait même étonné durant l’âge d’or des eighties. Le son global de l’album, très sec et analogique nous renvoie au meilleur du classicisme Crossover, tandis que la performance des musiciens, étrange et résolument personnelle, évoque parfois les ACID BATH, INDESTROY, DEAD HORSE, et toute une clique de groupes qui ne se rangeaient dans aucune catégorie trop précise. D’ailleurs, l’album a parfois des airs de collection de démos collées les unes derrière les autres, tant les humeurs changent, et après deux chansons assez formelles, le groupe se lâche et assume totalement son unicité au travers de compositions évolutives, avec un couple de guitares rachitiques qui font ce qu’elles peuvent pour sonner agressif. Le point fort de ce groupe est indubitablement son chanteur, complètement habité par son rôle de meneur de revue, et qui couine, vitupère comme une sorcière, double ses intonations comme un doppelgänger fun de Glen Benton, évitant le piège d’un chant trop linéaire et classique qui aurait condamné les morceaux à patiner dans la semoule. Je concède qu’il faut quelques écoutes pour supporter la production de l’album (lorsque la double grosse caisse se lance, on la prend pour une boîte à rythmes), qu’il en faut encore plus pour s’habituer au répertoire iconoclaste des américains, mais si vous parvenez à vous faire à cette étrangeté, alors vous tomberez sous le charme d’un disque qui ne ressemble à aucun autre, et sous celui d’un groupe qui ne fait rien comme tout le monde.
Et ne vous laissez surtout pas amadouer par la doublette d’intro, le quintet ayant pris soin de lâcher ses deux bombes les plus immédiates en début de parcours. Ainsi, « Sonic Poison » ressemble à s’y méprendre à du SLAYER repris par FORBIDDEN, tandis que « Exsanguinate », joue pendant presque sept longues et lourdes minutes le jeu de Seasons in the Abyss, avec ses riffs emphatiques, ses mélodies à la King/Hanneman, et son rythme lourd estampillé 1990. Fort peu symptomatiques, ces deux morceaux prouvent toutefois que THE DEVIL’S HEIR connaît son bréviaire et se sent capable de rivaliser avec les meilleures formations nostalgiques du moment, mais qu’il souhaite plutôt proposer une musique plus variée et une approche plus hétéroclite plutôt que de se contenter d’un habile verbatim. « Devastator » se pose d’ailleurs en transition tout à fait crédible, et prépare l’auditeur à la suite du répertoire, moins classique, avec toujours en exergue ce chant si étrange et envoutant. Pas de demi-mesure, on est envouté ou repoussé, et « Hateborn » de sonner comme l’hymne décalé qu’il est, à cheval entre Thrash et Hardcore sans jouer le jeu du Crossover. Pourtant, le groupe possède en la basse de Thad Stark de gros graves qui claquent et qui rappellent les Dan Lilker et Frank Bello, et lorsque le tempo se veut plus up, on headbangue à loisir, sans vraiment savoir où situer nos amis du jour (« Otis »).
Pour beaucoup, l’originalité de ce disque sera son point faible, d’autant que le son ne fait rien pour le normaliser. A l’opposé, les plus attachés à l’excentricité sauront reconnaître un groupe qui casse le moule, et qui n’en fait qu’à sa tête, qu’elle lui dicte des pamphlets bizarroïdes (« Blackout », Rap Thrash ?), des allusions à la NOLA traduites dans un vocable encore plus paysan que la normale (« Demon Inside », un exorcisme groovy et bluesy dans la campagne profonde), ou des jurons mis en musique sur fond de Metal antique et pas toc (« Psychotic Ramblings of a Middle Class Working Man »). Alors, je l’admets, tout ça n’est pas très middle of the road, mais nous avons besoin de groupes comme THE DEVIL’S HEIR pour nous rassurer quant à la santé du Thrash de psychopathes refusant un traitement Bay-Area pour s’intégrer à la société. Et de fait, je place immédiatement ces cinq-là sur ma liste rouge, attendant avec impatience la suite de leurs délires.
Titres de l’album:
01. Sonic Poison
02. Exsanguinate
03. Devastator
04. #1 Fan1Brainless Coward
05. Sitting in This Room
06. Hateborn
07. Otis
08. Blackout
09. Demon Inside
10. Psychotic Ramblings of a Middle Class Working Man (feat. Fahim Pasha)
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