En 1990, vous aviez plusieurs options avant de sortir un album de Hard Rock. Vous conformer aux modes de l’époque, surfer sur la vague sans savoir qu’elle n’allait pas tarder à s’échouer sur les rochers de Seattle. Ou alors, anticiper les nineties, revenir à quelque chose de plus direct et plus Rock, et rester à flots. Choix difficile alors que les cadors des eighties publiaient leur dernier hit, et que finalement, tout ça et l’avenir n’étaient pas une question de choix, mais bien de nature. Et celle des WARRIOR SOUL était justement de ne pas choisir de camp, et de rester fidèles à leurs convictions, au moment de lâcher sur le marché leur premier LP Last Decade Dead Century. Un titre prophétique pour une œuvre qui fit grand bruit, à tel point que METALLICA les embarqua en tournée, et que Geffen mit alors le paquet pour les promouvoir. Il faut dire que la voix de Kory Clarke et de son engagement avaient l’étoffe d’un porte-voix d’une génération X qui allait faire le ménage dans le grand barnum du Rock. Sauf que ce fameux porte-voix/mégaphone d’illusions perdues et d’ennui constaté fut finalement un petit blond au charme indiscutable et à la guitare cheap…De fil (à découdre) en aiguille (prêtée par un pote junkie), ce nouveau messie du Rock continua son chemin, entre un Drugs, God and the New Republic sincère et symptomatique de cette démarche no bullshit et une poignée de disques gravés pour faire plaisir à une mode somme toute passagère, et puis…l’oubli, le split, et l’inévitable comeback quelques années plus tard, le passé loin derrière et un avenir pas forcément plus rose humainement parlant, mais moins condescendant artistiquement.
C’est un fait, aucun album de WARRIOR SOUL n’a eu la prétention de rivaliser avec le choc d’entame Last Decade Dead Century. Que l’on parle de Destroy the War Machine, ou du petit dernier (d’il y a deux ans quand même) Back on the Lash, seule la voix et la gouaille de Kory font le lien, malgré des qualités évidentes et un plaisir de jouer que personne ne pourra contester. D’ailleurs, Back on the Lash sert justement de point de départ et d’ancrage à ce petit dernier, sobrement mais authentiquement baptisé Rock n’ Roll Disease, et qui finalement, n’est rien d’autre que du Rock n’Roll, avec ce petit plus d’authenticité qui manque parfois aux formations suédoises les plus portées sur la nostalgie. En gardant la même équipe, Kory ne s’est pas trompé, et s’est surement contenté de ce qu’il a toujours su faire de mieux, jouer une musique immédiate, en mode tourbillon et tornade, pour mieux bousculer l’ordre établi et tourner le dos aux modes et autres digressions inutiles. Produit par Clarke lui-même et Adam Arling, mixé et masterisé par Miguel Martins, ce nouveau pas en avant qui regarde en arrière ne révolutionnera rien, mais rassasiera les fans, et donnera encore crédit à ce style musical qui n’en finit pas de renaitre de ses cendres, alors même qu’il brule depuis les années 50. En optant pour une formule lapidaire, et une durée réduite, WARRIOR SOUL va à l’essentiel, ne perd pas de temps, et ne lâche qu’une demi-heure de musique qui n’est pas sans rappeler les débuts du groupe, son passé récent, mais aussi la philosophie de D.A.D, des punks américains de la fin des 70’s, et un certain détachement qui confine le projet à une dose d’air frais. Mais finalement, et aussi simpliste que ça puisse paraître, quoi d’autre que le Rock n’Roll pour nous faire encore espérer une fin du monde un peu festive et recentrée sur l’essentiel ?
Plus simplement, ce nouvel effort des américains est une dose d’énergie en barre, une succession de morceaux courts et concis qui pérennisent l’esprit des AC/DC, du Rock scandinave des eighties/nineties, et du Punk Rock le plus rauque et gras. D’ailleurs, il n’est pas surprenant de constater que l’ouverture « Up The Dose » nous la donne justement, non dans les veines mais dans le cœur, avec son riff pataud et son son énorme. Guitares qui bavent propre, chant toujours aussi particulier, un peu nasillard mais sincère, et structure simple qui évite les fioritures comme les louanges non mérités. Pourtant, des louanges Kory en mérite, lui qui fut l’un des premiers héros d’une décade rongée jusqu’à l’os par les désillusions et le manque de crédos. Orienté mid-tempo, citant parfois des influences inconscientes (« Rock N Roll Disease » et son riff d’intro qui rappelle étrangement le « She’s so European » des KISS), mais bourrant direct dans le sens du vent, Rock n’ Roll Disease est un virus primaire qui s’insinue dans l’organisme, et nous purifie les cellules, quelque chose de cru qui fait du bien à l’âme mais ne plonge pas dans les limbes de l’extase artificielle, une manière de rappeler qu’à l’origine, c’était ça, des guitares, une rythmique simple et pilonnée, une voix qui prend aux tripes, et l’envie de penser à autre chose, oublier le vieillissement et rester jeune…pour l’éternité. Mais qu’importe que cette éternité ne dure qu’un instant, qu’importe que le « vrai Punk » soit mort depuis longtemps, que le Hard Rock se soit vendu aux démons du marketing, tant que des artistes de la trempe de Clark continueront de jouer les greasers en mode MOTORHEAD/Johnny Thunders/D.A.D/BACKYARD BABIES et autres ZODIAC MINDWARP, avec des machins qui euphorisent dans le genre de « Off My Face ». Rien de neuf, mais du vieux qui sent bon et qui fait du bruit, et tout le monde est content.
Pas certain que le bonhomme soit de meilleure humeur qu’en 1990, mais il enchaîne les burners dans se poser la question de savoir si l’originalité et la diversité ont encore une importance. Mais les mélodies sont parfois là (« Melt Down »), le binaire est roi, et graveleux dans la voix (« Rock On »), les cassures mettent des coups dans le foie, mais on repart de plus belle (« War Ride Children »), entre les licks collants, les gimmicks tuant et l’énergie globale qui va toujours de l’avant. Mais inutile de regarder en arrière dans une époque qui justement aime s’admirer le nombril, et WARRIOR SOUL, sans rien proposer de neuf, ni de décalé nous fait sourire et danser avec ce nouvel album qui passe comme un shoot par intraveineuse, entraînant une accoutumance, mais aucun effet secondaire. Le manque étant facile à gérer, enfilez-vous immédiatement ce fix de Rock qu’est Rock n’ Roll Disease. Le Rock est une maladie incurable, mais personne n’a jamais eu envie d’en guérir.
Titres de l’album :
1. Up The Dose
2. Rock N Roll Disease
3. Off My Face
4. Melt Down
5. Rock On
6. War Ride Children
7. Going Mental
8. After The Show
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