C’est un fait connu, les espagnols, tout comme les allemands sont friands de Hard Rock racé et de Heavy Metal enflammé. Le peuple ibère est connu pour son indéfectible fidélité envers ses idoles d’hier qui ont su rester leurs modèles d’aujourd’hui. Inutile de remettre en cause cet état de fait accepté de tous, et je suis plutôt admiratif de cette adhésion sans restriction qui permet à des groupes oubliés du grand public Rock de toujours pouvoir tourner à Barcelone, Madrid, et pas mal d’autres villes d’Espagne. Mais outre la sincérité d’un public qui lorsqu’il aime, ne compte pas les années, c’est aussi celle des musiciens nationaux qu’il faut louer. Parce qu’eux non plus n’ont pas la mémoire courte, et se souviennent toujours, trente ans après, de l’émergence du Heavy Metal dans leur pays…Les exemples sont formels, et nombreux, et il est inutile d’en dresser une liste ici, qui n’aurait qu’une valeur informative redondante. Mais il est par contre possible de parler d’un des représentants les plus adeptes d’un classicisme 80’s assez prononcé, et qui en ce mois de janvier nous propose son premier longue durée, qui rappellera certainement pas mal de choses à des fans empêtrés dans une nostalgie révérée. Les DEATH KEEPERS nous en viennent donc de Barcelone, ont plutôt fière allure sur leurs photos promos, mais surtout convaincants dans leur entreprise de rappel des origines, rappel qui constitue les fondements de ce premier LP, que les amoureux d’un Hard Rock entier et non dénaturé vont sans doute adorer. L’histoire des barcelonais remonte donc en 2011, lorsqu’ils se sont formés, attendant patiemment deux ans avant d’oser proposer un premier EP, On The Sacred Way, au titre assez prémonitoire dans le fond, et honnête dans la forme affichée. Celle-ci était stimulée par les sonorités si symptomatiques des trente glorieuses (pas les nôtres, celles du Heavy Metal de l’époque), mais se voulait plus présentation qu’imposition, alors même que ce premier jet intégral ose la confrontation, de face, avec un public se réclamant de références que tout le monde connaît et respecte. Lesquelles ? Une simple écoute suffit à en trouver les points d’ancrage les plus solidement implantés, et admettons que les espagnols n’ont pas vraiment cherché à s’en éloigner…
La question qui reste en suspens est donc celle-ci. Peut-on se contenter de singer ses idoles au point de copier/coller leur son dans un contexte de production moderne ? Je serais tenté de répondre par l’affirmative, à la simple condition que les compositions soient suffisamment éloquentes (sans même parler de culot) pour faire oublier qu’elles citent toutes les grandes œuvres dans le texte. Dans le cas des DEATH KEEPERS (Dey Rus - chant, Eddy Gary & Antonio Maties - guitares, Gorka Alegre - basse et Miki Hunter - batterie), l’équilibre entre admiration et personnification est plutôt instable, et surtout, un certain relâchement de l’attention est parfois à déplorer en termes d’intensité, avec un exemple à mettre en avant pour étayer cette hypothèse quasiment déjà vérifiée. Il faut dire que les barcelonais ont un fait un choix plutôt déroutant, en optant pour un titre parfaitement incongru en tant qu’épilogue…Placer une longue ballade progressive et subtile en fin d’album est un pari plutôt risqué pour un groupe se réclamant d’un Hard Rock féroce et sas compromis, et même si « Smooth Hit Love » est le genre de chanson que rêveraient de composer bien des groupes, son ambiance romantique un peu gluante en fait le parangon des reproches que l’on peut formuler à l’égard d’un groupe qui n’a pas encore su choisir entre sa propre identité et celle des artistes qu’il est censé louer. En effet, presque neuf minutes de douceur en guise d’au-revoir n’est pas vraiment le genre de conclusion tonitruante à laquelle nous étions en droit de nous attendre, et même si le morceau est plutôt séduisant et chatoyant, ses arrangements un peu mielleux ne font rien pour nous laisser sur un souvenir merveilleux, même si les parties de guitare sont de toute beauté, et que la basse s’impose sans avoir à trop forcer. N’est pas HELLOWEEN ou IRON MAIDEN qui veut, et même si une poussée de puissance finale vient enfin rompre le charme qui nous endormait dans les bras d’une belle romantique à la chevelure soyeuse et dorée, un bon gros burner des familles aurait constitué un plus probant signe de tête en forme de headbanging que cette extraction à tiroir qui a tendance à rapprocher les espagnols d’un Hard FM qu’ils se plaisent à contredire durant les quarante premières minutes de l’album…
Cet album, comme vous l’aurez compris d’un simple regard à une pochette plutôt bien foutue, est placé sous le signe d’une revisite d’un style que les metalleux connaissent par cœur, puisqu’il représente la base de leur passion. Le Hard Rock, le Heavy Metal, soient les deux éléments fondamentaux d’une digression sur un Rock teigneux, qui ici atteint son apogée de respect, dès l’entame tonitruante de « Rock & Roll City » qui ne se gêne pas pour égrener quelques poncifs éculés. Mais telle est la règle du jeu, et si ce morceau semble se faire un malin plaisir de rappeler le KROKUS de Headhunter ou le Ronnie James DIO des premières années, c’est pour mieux placer un contexte dont il ne cherche pas du tout à s’extirper. Et les morceaux de cette trempe sont légion sur Rock This World, qui de son titre même semble réfuter tout principe de modernisation. On connaissait déjà son homologue sémantique proposé par un KICK AXE à l’agonie, mais ici, c’est plutôt le lyrisme qui l’emporte sur la folie, comme le démontre sans complexes « Fire Angel », qui une fois encore pioche dans les coffres à fanfreluches et cornes du diable du lutin DIO, tout en louchant grave vers le SCANNER le moins inspiré de quoi nous faire vibrer. En toute objectivité, l’ensemble est très bien interprété, puisque les musiciens connaissent leur boulot (spécialement la paire de guitaristes), et que Dey Rus au chant sait méchamment bien souffler le chaud, comme un dragon dérangé dans sa caverne. Mais entre les allusions un peu trop prononcées à HELLOWEEN, les citations dans le texte de l’œuvre MAIDEN, les clins d’œil répétés à Rob Halford et JUDAS PRIEST (« Death Keepers »), les accointances avec un ANGRA résumé à sa partie la moins ambitieuse, et des intonations vocales partageant leur schizophrénie entre Ronnie et Michael Kiske, les ombres des légendes ont tendance à éclipser l’histoire des DEATH KEEPERS qui reste à écrire, et si possible, d’une plume qui ne paraphrasera pas des contes que l’on connaît déjà par cœur (« Haven’s Heaven »).
Ce qui n’empêche nullement, même dans la décalque pure et simple, que le groupe se montre convaincant, spécialement lorsqu’il opte pour un binaire plombant (« Rock This World », toutes les astuces de production et d’arrangements d’il y a trente ans sont replacées intelligemment), ou au contraire en osant le flirt assez poussé avec une douceur bien galbée (« Thriving Forcast », aux soli vraiment bien policés). Le format épique leur sied aussi, et leur colle à la peau comme un spandex aux cuisses de Bruce Dickinson (« Wildfire », un peu naïf, mais baroque n’roll), et la saccade leur permet de nous extirper d’une mécanique un peu trop bien huilée (l’entame diabolique de « Metallia », qui nous fait comprendre d’un autre côté que les espagnols seraient capables de relever des défis bien plus corsés…), mais l’un dans l’autre, et le bilan une fois dressé, on regrette amèrement des choix de facilité, et surtout, que ce premier disque se veuille plus hommage que causeur de dommages, à force de rester sous le poids de la chape de plomb de références vraiment trop évidentes. Mais nonobstant ces reproches tout à fait légitimes, ce Rock This World reste un solide exercice de style, encore trop marqué au fer rouge du passé, mais qui témoigne du potentiel assez conséquent d’instrumentistes qui en tant que compositeurs, ont encore du chemin à faire pour faire sonner leur heure.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09