Rogue Planet

Chugun

30/06/2020

Autoproduction

Continuons donc notre tour du monde de l’extrême, pour découvrir des musiciens de tous horizons, et c’est ainsi qu’aujourd’hui nous entrons en terre israélienne pour y rencontrer les CHUGUN qui accusent quelques années de pratique. Fondé à Tel-Aviv en 2010, le combo a rodé son répertoire pendant des années avant de se lancer professionnellement, et se retrouver à croiser le fer au Wacken. Un premier LP a sanctionné leur parcours en 2015, Virus, et ce sont donc cinq années de silence que Rogue Planet (objet possédant la masse d'une planète mais qui n'est attaché gravitationnellement à aucune étoile ou naine brune : il erre dans l'espace comme un objet indépendant) vient interrompre de son agressivité et de son allant. En cinq ans, la physionomie du groupe a changé, et c’est un trio que nous retrouvons aujourd’hui, évoluant autour des frères Yani (basse/chant) et Timur Sizov (guitare/chœurs), et du batteur Nir Baruch. Exit donc la chanteuse Denise Jani qui vociférait sur le premier LP, et si le changement de tonalité est manifeste, le style en lui-même n’a pas vraiment muté, et gravite toujours autour d’un Death moderne et bien dans son époque. Pour mieux situer les débats, les israéliens citent quelques noms à la volée, SLAYER, CORONER, SOULFLY, CRIPPER, LAMB OF GOD, auxquels vous pouvez éventuellement ajouter ceux de MORBID ANGEL, AT THE GATES, SOILWORK, pour obtenir un cocktail tout sauf original, mais velouté en bouche, et suffisamment brutal pour enivrer les fans d’extrême raisonnable. L’équilibre entre points forts et faibles est assez juste, et en trente-et-une minutes à peine, le trio ne s’embarrasse pas de principes, ne défie pas les lois de la gravitation, et nous livre une copie honnête, mais qui peine à combler leur absence de cinq ans.

Posons les bases, et admettons que Rogue Planet n’est décevant que par son conformisme et par sa production un peu anonyme. Enregistré, mixé et masterisé au AG Studio de Tel Aviv, il peut évidemment se targuer d’un professionnalisme notable, mais entre les saccades de guitare trop traditionnelles et calibrées, un écho de batterie un peu mate qui empêche Nir de vraiment pulser même dans les moments les plus brutaux, et un chant décidément bien linéaire, l’attaque finit par s’essouffler dans une guerre de tranchées que le style ne tolère pas vraiment. Nonobstant ces reproches que j’assume totalement, certains morceaux émergent de la masse, parce qu’ils osent plus de solidité, parce qu’ils évitent les idées déjà recyclées de nombreuses fois, à l’image du très SLAYER « Rogue Planet », plus Thrash que la moyenne, et dont les premières secondes donnent le sentiment d’avoir été créées par le trio King/Hanneman/Bostaph. Et c’est finalement lorsque les musiciens s’éloignent de leurs automatismes Death trop systématiques qu’ils se montrent les plus probants, en insufflant à leur instrumental un groove fluide et entraînant. Côté soli, ceux tricotés par Timur sont plus que capables, et rappellent un peu ceux de feu Chuck Schuldiner, en version moins technique, mais tout aussi mélodiques. Concentrées sur une idée porteuse, les chansons bénéficient d’un nombre conséquent de breaks, ce qui confère parfois une ambiance délicatement progressive. La seconde partie de l’album sonne ainsi plus fraîche et vivifiante que la première, lorsque le tempo décélère pour permettre à chacun de prendre plus d’ampleur. Ainsi, l’écrasant « Extinction Cycle » est un modèle du genre, même s’il souffre du timbre un peu trop forcé de Yani. La dualité vocale n’est pas sans rappeler les canons du Grind, avec un canal central très grave secondé par des cris plus perçants, et lorsque la machine s’emballe sans prévenir, l’énergie est conséquente.

Difficile de pointer du doigt les scories, puisque objectivement tout est carré, propre, et joué au biseau. Mais la plus belle mayonnaise n’est pas la meilleure, et malgré les efforts du trio, elle ne prend que par intermittence, lorsque les enchaînements sont moins évidents, et que les imbrications sonnent plus spontanées. « Andromeda » en est un exemple parfait, même si le riff principal se veut traditionnel. Mais en enquillant les plans sans discontinuer, les CHUGUN provoquent un mouvement de lame de fond qui redynamise le concept, et les dernières minutes en incarnent en quelque sorte l’ultime vague qui déferle sur la grève. On pense aussi parfois aux débuts de MESSHUGAH, lorsque le combo cherchait encore son identité, mais il est évident que la comparaison ne joue pas en faveur des israéliens. Encore un peu timides dans leur approche, encore un peu trop sages dans leur brutalité, il leur manque cette aura démoniaque qui irradie des références les plus connues, même si on sent que le potentiel est là. Le dernier morceau « Gravitational Collapse » en est d’ailleurs une preuve probante, avec sa rythmique à la AT THE GATES et ses blasts inopinés à la MORBID ANGEL. Il devient donc assez clair que le groupe est capable de faire plus ambitieux mais tout aussi concis, et de s’extirper ainsi de la masse de groupes Death/Thrash sympathiques, mais encore trop tendres. Espérons qu’une fois relancés, les trois musiciens en profiteront pour provoquer un peu plus leur imagination, mais en attendant, Rogue Planet reste une déflagration honnête, mais loin d’être assez puissante pour déclencher un nouveau big-bang.

                                                          

Titres de l’album:

01. Simulacra            

02. Predatory Prey               

03. Happiness           

04. Idiot's Guide                  

05. Rogue Planet                  

06. Extinction Cycle            

07. Andromeda                    

08. Gravitational Collapse


Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 17/08/2021 à 14:43
75 %    682

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Antropofago + Dismo + Markarth

RBD 16/01/2025

Live Report

Sélection Metalnews 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2025

Interview

Voyage au centre de la scène : MONOLITHE

Jus de cadavre 15/12/2024

Vidéos

Corentin Charbonnier : l'anthropologue du Metal

mortne2001 09/12/2024

Interview

CARCARIASS + Guests

Simony 06/12/2024

Live Report

FALLING IN REVERSE + HOLLYWOOD UNDEAD

Chief Rebel Angel 06/12/2024

Live Report

Lezard'Os Metal Fest 2024

Simony 02/12/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : STILLE VOLK

Jus de cadavre 01/12/2024

Vidéos
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Chazz

Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)

17/01/2025, 22:44

Bill BAroud

Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !

17/01/2025, 17:03

Humungus

Le coup de la goutte de résine, ça va me faire la soirée...

17/01/2025, 16:52

senior canardo

2 sisters 1 cup ! haha joli pochette

17/01/2025, 10:02

Seb

J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.

16/01/2025, 18:21

MorbidOM

Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène. 

16/01/2025, 12:15

Jus de cadavre

Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.

16/01/2025, 10:22

Simony

Merci Styx je transmets à notre expert informatique.

15/01/2025, 15:53

Simony

Merci Styx je transmets à notre expert informatique.

15/01/2025, 15:53

Styx

Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)

15/01/2025, 12:58

Incroyable album

Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)

14/01/2025, 09:27

Humungus

Qui a dit que l'on n'était jamais content ?!

13/01/2025, 08:36

Humungus

Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.

13/01/2025, 08:36

Capsf1team

Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête. 

13/01/2025, 07:59

Simony

Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)

12/01/2025, 17:38

Humungus

Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)

12/01/2025, 14:27

Benstard

Litany la claque a l'époque. Ce son de grosse caisse du futur.

11/01/2025, 13:35

Buck Dancer

Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.

11/01/2025, 12:16

Capsf1team

Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)

10/01/2025, 09:12

RBD

J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)

09/01/2025, 19:49