I was old-school before it was cool.
C’est certainement ce que beaucoup de groupes doivent se dire, comparant leurs dates de naissance respectives.
J’étais là avant, oui mais moi je suis true.
T’as vu notre son ? Bah ouais c’est le même que TREPANATIC ORNEMENTATOR
Le quatre-pistes c’était quand même autre chose…Quatre-pistes ? Bouffon, j’enregistre sur un Fisher-price à piles !
HM-2 or die !!! Florida or bust !!!
Ainsi de suite, j’en passe et des meilleures, mais à force d’être old-school, les artistes du monde entier vont finir par passer pour des antiquaires aux tarifs plus ou moins préférentiels. Et on va se vautrer dans la mise en abime lorsque la génération suivante se targuera d’être old-school en clonant le son des groupe qui étaient old-school alors que les autres étaient juste…school. Et alors que les anciens se reforment pour prouver qu’ils sonnaient casher avant le jambon Herta, que ceux qui n’ont jamais arrêté se rapprochent de leur son d’origine pour s’intégrer à la mouvance, il ne reste qu’une poignée de disques bien dans leur époque.
Nonobstant ce constat légèrement accablant, les suédois d’ABSCESSION sortent justement leur second longue-durée sur le très recommandable label Transcending Obscurity Records, appellation d’origine incontrôlée pour tous les maniaques de la violence qui aiment quand même ranger leur chambre. Fondé en 2009, ce quatuor de Linköping s’est déjà manifesté à l’occasion d’un premier effort, Grave Offerings, qui sonnait déjà comme un groupe de Goteborg reprenant les astuces d’un groupe de Stockholm. Au menu, de la HM-2 évidemment, une production sourde et sombre, mais une sorte de crossover assez fameux entre les époques et les sous-genres. Loin de se contenter d’une simple resucée d’ENTOMBED et DISMEMBER pour fêter Halloween, les quatre musiciens (Thomas Clifford - chant, Macke - batterie, Markus - guitare et Manfred Bergling - basse) proposent à leurs fans éventuels un mélange savoureux entre les deux vagues de violence des années 90, comme si ENTOMBED et AT THE GATES croisaient le fer sous le regard malveillant d’UNLEASHED et de l’arbitre SOILWORK.
Mais sans rester campés sur leurs positions, les suédois proposent aussi quelques allusions à l’Angleterre si chère au thé décomposé de CARCASS, via quelques riffs bien connus de Bil Steer. Soit la quintessence d’un Death certes passéiste dans les faits, mais sonnant frais à l’oreille pour peu que les exactions de l’underground trop profond soient vos acouphènes quotidiens.
L’empreinte ENTOMBED (toutes époques confondues) reste quand même la plus profondément ancrée dans le sol aride, ce qu’on constate dès l’écoute du single « Rat King Crawl ». Dispense d’intro à la mode « Living Dead » pour directement creuser la tombe via un énorme lick froid et ténébreux, groove en arrière-plan, rythmique polyvalente, chant évidemment raclé, mais avec des chœurs surlignés qui rappellent le CARCASS de Necrotism et quelques autres exemples plus ou moins probants. Et si le classicisme est évident, le quatuor a beau jeu de ne pas sombrer dans le formalisme de la copie trop prononcée.
Efficace, ce Death l’est, mais aussi savoureux pour qui s’enivre régulièrement de plagiats plus ou moins éhontés. Digne représentant de l’école suédoise, ABSCESSION nous propose quand même autre chose que de l’old-school appliqué et scolaire, et ose même les longues évolutions qui témoignent d’ambitions louables. Ainsi, le title-track « Rot Of Ages » et son baptême renvoyant les DEF LEPPARD dans les cordes du Hard-Rock de salon ose le riff punky, le Death n’Roll écrasant, et casse le rythme en posant en son centre une mélodie fourbe mais fort à-propos. Dès lors, le tableau change les nuances, les mélodies se fraient un chemin sur la palette, et l’originalité pointe plus ou moins le bout de son nez via des associations moins évidentes.
Mais le maître-mot de cette réalisation n’en reste pas moins l’efficacité. On ne cherche pas à révolutionner l’approche old-school qui répond à des règles très précises, mais on propose au moins des riffs accrocheurs et de l’énergie avec des inserts courts qui frappent fort et une double grosse caisse omniprésente (« The Final Furnace »). Le chant de Thomas Clifford, raclé et sentencieux, la guitare rigoureuse et travailleuse de Markus, le beat rapide et précis de Macke font de ce deuxième album un manifeste de violence tout à fait crédible, avec passages en blasts en figure imposée, et ralentissements en mid qui permettent aux harmonies de mordre les mollets comme des serpents.
A chacun son seuil de tolérance dans le recyclage, mais autant admettre que Rot of Ages fait quelques menus efforts pour ne pas se noyer dans la masse, en réconciliant les courants de pensée anglais et suédois. « When The Guillotine Falls » en est une preuve évidente, avec son alternance faisant penser à une collaboration entre Bill Steer, Nicke Andersson et Tomas Lindberg.
Pas aussi vite oublié qu’on ne l’aurait cru de prime abord, ABSCESSION reste tout à fait recommandable, et s’éloigne un peu des facilités usuelles. Un peu.
Titres de l’album:
01. Rat King Crawl
02. Theater Of Pain
03. Dead Man's Hate
04. Rains Of Death
05. Rot Of Ages
06. The Final Furnace
07. When The Guillotine Falls
08. War Machine
09. Prometheus Unbound
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