Ah tiens, du Crust suédois. Quelle surprise…En même temps, quoi qu’ils produisent, ces satanés scandinaves en refourguent des palettes entières de par le monde, alors autant accepter cet état de fait. D’autant plus que le Hardcore et tous ses dérivés, ça les connaît. Prenons donc cette affaire par le bon bout, et pas le petit de la lorgnette pour en avoir une vision exhaustive. Les MYTERI viennent de Göteborg, sont cinq (John Persson – chant, Johan Andersson & Mattias Frödén – guitares/chœurs, Franz Alfredsson – basse et Erik Larson – batterie), se sont formés en 2013 sur les cendres d’ESKATOLOGIA, dont provenaient Erik et Johan, se débrouillent tout seul comme des grands pour distribuer leur musique, et nous ont déjà proposé un premier longue-durée éponyme en 2015, deux ans après leur naissance. Voilà donc une bio sommaire, mais qui situe le contexte, sans vraiment expliquer la musique qui vous attend. C’est une musique dense, riche, qui bénéficie de l’expérience d’un parcours scénique assez conséquent, et qui rue dans les brancards, en prenant soin de faire attention à ceux qu’elle renverse. Alors évidemment, le tout est méchamment cru, salement violent, mais pour autant, le nihilisme formel n’est pas de mise, puisque ces suédois barbus ne rechignent pas à intégrer des mélodies à leurs jets de bile. Nous trouvons nous donc face à une nouvelle manifestation Emocore de bon aloi, susceptible de parler aux plus sensibles des vilains qui nous lisent ?
Pas vraiment, quoique le parallèle est loin d’être inintéressant. Dans le fond et une partie de la forme, il est impossible de ne pas rattacher Ruiner à la scène Crust/D-beat locale, et pourtant, doté d’harmonies fatales, cet album se démarque par sa volonté de tout raser pour mieux reconstruire.
Emocrust ? Le terme est ridicule, j’en conviens, et pourtant, cette juxtaposition de rythmiques en marteau pilon et de riffs mélodiques en abandon suggère une telle appellation, sortie de nulle part, mais assez pertinente dans le fond. Sans chercher la provocation décibellique à tout va, le quintette ose justement sortir des sentiers battus et amadouer le chaland de quelques nuances harmoniques bien senties, qui loin d’apaiser la colère, la font ressortir encore plus crue sans en atténuer la véhémence. Plus puissant en se montrant plus accessible, tel est le paradoxe de MYTERI, qui sans manger à tous les râteliers, picore dans quelques auges pour se sustenter. Impossible évidemment de ne pas citer quelques corrélations notables, en établissant un parallèle avec les TRAGEDY, ou les FALL OF EFRAFA, sans que les trois groupes ne soient vraiment semblables sur tous les points. Mais ils en ont de communs, et finalement, ce second LP s’avère assez fascinant sans sa façon de détourner la noirceur pour l’exposer à la lumière blafarde d’une réalité Crust qui percute de plein fouet une gerbe d’espoir Emocore. Les intéressés eux-mêmes parlent de Crustcore, et je ne viendrai pas les contredire, spécialement en encaissant la beigne introductive « Ruiner », qui après une longue intro envoutante et une harmonie en déroulé, file comme un dératé pour se frotter aux limites de vitesse les moins balisées. Les chœurs, intelligemment employés décuplent la puissance de l’ensemble, en frisant la schizophrénie brutale, tandis que les guitares n’ont de cesse de tricoter des motifs accrocheurs, en mélodies d’accroche-cœur. Mais ne vous attendez pas non plus à un torrent de tendresse coulant de paupières scellées de promesses, ici, la vie n’est pas belle, mais vaut quand même le coup qu’on se batte pour elle.
Et on la défend à grands coups de guitares nostalgiques et de rythmique atomique, pour un unisson de percussions globales, dans un effort pour combattre ce destin pas très malin, qui vous laisse y croire alors qu’il est déjà trop tard (« Mördare I Uniform »). Alors, en fin de compte, Ruiner, champ de ruines à perte de vue ou métaphore sur une existence pas toujours très tendre ? Les deux, pour un résultat qui dans son domaine assez étendu, frise la perfection. Car les cinq suédois ont soigné leur partition, pour nous offrir de grosses déflagrations de haine et de ressentiment en union, à l’image sonore de cet imparable « Justitiemord », qui caresse et qui mord, avec toujours ce nœud d’harmonies de guitares en arrière-plan, alors que le chant rumine ses invectives et que la rythmique fracasse la linéarité d’un Crust que les musiciens se plaisent à détourner.
Version courte, l’impact est maximal, ce que démontre un « Deserter » qui adopte enfin une posture franche et défriche encore plus de terrain Crustcore en moins de deux minutes que bien d’autres groupes avec leurs deux mains. Mais la version longue est aussi recommandable, disponible en cinq minutes sur le monumental « Dödens Hav », presque progressif dans l’esprit, et qui glisse quelques dissonances dans ses parties. C’est concentrique, Heavy, avec une fois encore un batteur qui profite entièrement de sa liberté de frapper. Arpèges en son clair, chant qui se modère, mais toujours cette saine colère qui transpire même des émotions les plus sincères. C’est du travail soigné, qui cajole avant de bousculer, et qui exhorte avant de supporter ?
Quoi ?
Une trajectoire de destin capricieux qui présente l’homme comme son propre prédateur, et acteur d’une destruction qui ne semble pas pouvoir changer de direction.
Bien que chanté en suédois natal, on perçoit sans problème la portée de l’implication humaniste des MYTERI, qui ne font aucun mystère de leur dégoût global d’une espèce qui exploite les autres et sa propre planète (« Hatets Fanbärare »). Ruiner, patiemment élaboré, égrène sa philosophie avec beaucoup de finesse et de pertinence, et garde ses arguments intacts jusqu’à la fin, pour nous offrir en guise d’épilogue, une longue suite dramatique, « Urholkningsprocessen », assez proche d’un Post Metal intuitif et onirique. Guitares qui s’apaisent enfin et osent les motifs pleins, répétitions de boucles à l’envi, pour un crescendo prenant qui nous laisse un goût amer dans la bouche. Il est tout à fait possible de voir en ce final le spectacle désolant d’une terre laissée à l’abandon, expurgée de ses scories humaines, avec un seul témoin, qu’on distingue à peine dans le lointain. Un témoin qui n’a rien raté de la chute de l’humanité, et qui contemple sa propre solitude, le cœur serré, mais les mains tendues vers un avenir mieux préparé.
L’acceptation du néant comme base d’une projection ? C’est un peu ce que je retiens de ce second album des MYTERI, aussi sensible qu’il n’est implacable. Une vraie réussite, et une image qui nous renvoie à celle de notre miroir, reflétant des personnalités qui aimeraient que tout aille mieux sans rien faire pour évoluer. Triste, mais terriblement concret.
Titres de l'album:
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