Depuis quelques années, on a envie de poser une et une seule question à Mitch Harris : « Mais qu’est-ce que tu branles bordel ??? ».
Tout a commencé par une implication de plus en plus éparse au sein de son groupe principal NAPALM DEATH, au point de ne même plus le voir sur les photos promo et d’être absent du dernier album, ensuite, la sortie plus que louche d’un album tout moisi de DEFECATION qu’il a dénoncé lui-même dans un communiqué de presse virulent comme étant une « arnaque totale indépendante de sa créativité », avant que finalement, un silence en lourde chape de plomb ne l’enterre dans les tréfonds de l’actualité. On avait bien quelques bruits de couloir depuis deux ans, concernant une possible association avec un autre grand nom de l’extrême, mais on connaît la fiabilité des bruits de couloir et la durée de vie de ces rumeurs souvent nées un soir d’euphorie. Mais la réponse à cette fameuse question initiale vient d’être donnée par le label américain Mission Two Entertainment, qui annonce à grand renfort de manchettes la sortie du premier LP de BRAVE THE COLD, qui n’est rien de moins que la première carte postale musicale viable que le musicien nous adresse depuis très longtemps. Les rumeurs d’une association avec le batteur fou des Muppets Dirk Verbeuren étaient donc fondées, et le batteur de MEGADETH a donc bien fait équipe avec le guitariste des RIGHTEOUS PIGS pour élaborer un nouveau répertoire de morceaux tous plus impitoyables les uns que les autres. La joie de retrouver l’un des musiciens les plus attachants et versatiles de sa génération était évidemment immédiatement nuancée par le doute sur la viabilité du projet, bien qu’une collaboration entre Mitch et Dirk ne pouvait aboutir qu’à un massacre intégral. Et finalement, en dépit de possibilités individuelles exceptionnelles, les deux musiciens ont choisi l’approche la plus idoine qui soit, en considérant ce premier tome de l’aventure BRAVE THE COLD comme une récréation ludique et bordélique, lui conférant de fait un charme immédiat et un pouvoir d’attraction total.
Evidemment, les préoccupations conceptuelles de Mitch sont toujours les mêmes. Une dystopie faite de restrictions, de bannissement des libertés individuelles, de monde gangréné par la pollution, d’injustices flagrantes, et d’une existence stérile régie par des principes d’obéissance et de résignation face au pouvoir totalitaire en place. De fait, la production toujours bombastic et un peu stérile de Logan Mader sert admirablement bien le projet, qui sonne comme un cri de révolte Industriel assez proche parfois d’un VOÏVOD revanchard, comme en témoigne le superbe et dissonant « Retrograde », assez proche d’un crossover entre deux œuvres majeures des canadiens, Angel Rat et Negatron. Loin de recycler ce qu’il a déjà proposé au sein de NAPALM DEATH, RIGHTEOUS PIGS, DEFECATION ou MEATHOOK SEED, Mitch reste quand même fidèle à ses styles de prédilection, aidé en cela par le batteur le plus phénoménal de ces quinze dernières années, qui s’en donne à cœur joie dans les blasts mais qui fait aussi preuve d’une grande finesse de frappe dans les moments les plus nuancés. Et cette voix de sorcière qui résonne dans le lointain comme un orale d’infortune ne fait qu’accentuer le côté sombre et mystique du projet, comme si Harris proposait un pèlerinage sur des terres futures pas vraiment accueillantes. Dans les faits, et avec honnêteté, Scarcity n’est pas la révolution artistique que nous étions en droit d’attendre de musiciens de cet acabit. Et je serais tenté de dire que c’est préférable, désacralisant un projet qui n’a pas besoin d’être porté au pinacle, mais bien apprécié pour ce qu’il est : une violente tranche d’extrême, salement bien composée, et interprétée avec les tripes. Mais sous des atours de simplicité, les compositions sont plus travaillées et alambiquées qu’elles ne le paraissent au prime abord, et une réussite absolue de la trempe de « Refuge » démontre que Mitch n’a pas perdu son flair Indus en route, toujours aussi à l’aise dans le genre qui s’accorde très bien de ses riffs étranges et biscornus, comme à la grande époque de MEATHOOK SEED. De plus, l’album est truffé de petites mélodies robotiques et futuristes, et prend des airs d’œuvre d’anticipation très crédible. Et le résultat est inévitable : on prend son pied, on s’éclate totalement, et on danse la gigue sur des hymnes que le NAPALM DEATH le plus récent aurait pu faire siens (« Necromatrix »).
Il faut l’admettre comme vérité, une vérité paradoxale, en ne cherchant pas le bouleversement des données, Mitch et Dirk ont créé un album qui se déguste comme un avenir bien pourrave, mais qui sur le moment donne des indications sur la marche à suivre. Etrangement avant-gardiste dans sa simplicité, Scarcity ressemble à un LP de STRAPPING YOUND LAD capturé à cheval par des rebelles, et remis en selle après une reconstruction de fortune. On sent le même désir de violence positive dans la négativité, les mêmes possibilités de la part de deux compositeurs certes éloignés par le style mais pas par le talent, et des titres aussi radicaux que « Shallow Depth » apportent une plus-value extraordinaire à un tracklisting déjà riche. Entre bourrasques Grind jubilatoires, accalmies Crust en mid tempo que Dirk truffe de ses fills diaboliquement fluides, interruptions par intermittence Indus qui confèrent une aura « mécanique » à l’ensemble, ce premier fruit d’une collaboration pas si incongrue que ça est un achèvement de première classe, et excuse amplement la discrétion de Mitch Harris ces dernières années. On pourrait pourtant en douter en écoutant « Blind Eye », premier titre un peu facile qui utilise les codes vocaux d’ATHEIST pour imposer un up-tempo certes catchy, mais pas vraiment inspiré. Heureusement, cette impression de va-vite est très rapidement dissipée, et si la première partie de l’album reste la plus convenue de l’ensemble, elle laisse très vite la place à des morceaux beaucoup plus conséquents et surprenants, malgré le caractère ludique de ces deux ou trois premiers morceaux plus instantanés que le reste de l’œuvre.
Son impeccable, attitude rigide de la guitare de Mitch, direction artistique réfléchie, le bonheur de retrouver nos deux acolytes en grande forme est total, et ce premier jet de l’aventure BRAVE THE COLD est admirable de fun. En combinant toutes leurs influences, les deux musiciens ont accouché d’un monstre sympathique, un peu velu sur les bords mais plus doux que ses congénères, et adorable dans son humilité. On sent que Dirk et Mitch ont avant tout souhaité se faire plaisir et NOUS faire plaisir, et entre des boucheries Crust/D-beat comme « Dead Feed », et des ambitions plus prononcées sur « Upheaval », Scarcity reste LA grande surprise de cette rentrée, de ces albums qui ne paient pas de mine au départ, mais qui relèguent la concurrence à des années lumières de charbon. Merci Mitch de te rappeler à notre bon souvenir, mais s’il te plaît, manifeste toi un peu plus souvent.
Titres de l’album:
1. Blind Eye
2. Hallmark of Tyranny
3. Monotheist
4. Retrograde
5. Apparatus
6. Dead Feed
7. Upheaval
8. Refuge
9. Necromatrix
10. Shallow Depth
11. Shame And Ridicule
Yes, c'est en cours de rédaction. Au camping, nous n'avons pas été impacté par l'orage, pas de dégâts en tout cas.Merci à toi de t'être présenté à moi, c'est toujours cool de croiser des pa(...)
17/05/2025, 18:12
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04