Il existe selon le site Encyclopaedia Metallum dix-huit groupes se nommant DESOLATION de par le monde, en activité ou pas. Brésil, Canada, Chili, Finlande, France, Allemagne, Grèce, Mexique, Norvège, Etats-Unis, Angleterre, soit un bon territoire couvert, et deux occurrences en Suède. Heureusement, il est facile d’y faire la différence entre les deux, puisque l’un est un groupe de Heavy n’ayant sorti qu’une seule démo en 1985, et l’autre, celui qui nous intéresse cet après-midi. Homonymie assez fascinante pour un baptême consensuel, mais un parcours atypique pour ce combo de Kramfors, dont les origines remontent à l’orée des années 90, avec comme d’habitude une première partie de carrière beaucoup moins prolifique que la seconde. Deux périodes bien distinctes donc, l’une de 1990 à 1994, et l’autre de 2014 à aujourd’hui, comme si les moyens qui manquaient à l’époque avaient enfin pu être trouvés, et c’est donc un deuxième longue-durée que nous fêtons aujourd’hui via ce Screams of the Undead qui entérine donc le retour de cette horde sanguinaire venue de Suède. Avec une seule démo publiée en 1993, Church of Sin, les DESOLATION auraient donc pu ne rester qu’une petite notule de bas de page sur un fanzine local, mais leur détermination à revenir à la vie a tout de l’obstination d’un zombi claustrophobe ne souhaitant pas passer sa mort entre quatre planches vermoulues. Zombi, mort, un vocabulaire qui sied d’ailleurs admirablement bien aux suédois, qui se concentrent sur un Death Metal des plus formels, de celui qu’on jouait dans les années 90 au niveau national, et couvrant donc une large période pour un Crossover pas inintéressant du tout.
Distribué conjointement par deux labels locaux, I Hate et Growls From The Underground, Screams of the Undead bénéficie donc d’un soutien sans failles de l’underground justement, qui croit dur comme fer à ces cris de morts-vivants émergeant d’un vieux cimetière côtier. Leur label principal les compare d’ailleurs à une sorte de mélange entre DISMEMBER et EDGE OF SANITY, ce qui en dit assez long sur la jonction opérée par les DESOLATION entre les débuts du style dans leur pays, froids et rigides, et son extension plus mélodique des mid et end 90’s via l’increvable Dan Swano. Dans les faits, cette relation se retranscrit par un instrumental combinant la puissance hivernale des premiers méfaits d’ENTOMBED, UNLEASHED et autres DISMEMBER, et la séduction venimeuse et harmonique de la seconde vague Death nationale, ce qui a le don de produire un effet maximal évitant la déconvenue old-school d’une redite un peu trop redondante ces temps-ci. Mais la fondation du groupe légitimant tout à fait ce regard en arrière, il n’y a pas grand-chose d’opportuniste à reprocher au quatuor (Mattias Lilja - basse/chant, Eddy Wiklund - batterie, Kai Puskala et Peter Näslund - guitares), qui fait encore ce qu’il a toujours su faire de mieux, en prolongeant le travail déjà entrepris sur son premier long, Decapitated, publié il y a deux ans. On y trouvait donc les fondations de ces attaques toujours franches, qui empestent la HM-2 et les riffs congelés à peine sortis du frigo pour être dégustés, ces cassures rythmiques en accélération/décélération, et ce chant caverneux mais intelligible, qui rapproche donc les DESOLATION de la seconde vague de Death suédoise d’il y a vingt ans.
Agression et mélodie, mais dosées de façon homéopathique, beaucoup d’envie et d’énergie dans le jeu, pour une production assez sèche et rêche, aux graves toutefois appuyés et aux médiums exagérés, à tel point qu’on a parfois le sentiment d’écouter un split entre AT THE GATES, EDGE OF SANITY et MAYHEM (« Maniac »), à cause de cette petite touche Black qui vient assombrir un ciel déjà chargé. Pas forcément puristes les suédois, au point d’accepter un peu tout le legs extrême de leur propre pays, même si leur entame reste classique et farouche, avec son riff écrasant en intro et sa circonvolution de guitares en arrière-plan (« Macabre Slaughter »). Pas de doute, les musiciens savent composer des morceaux courts qui cognent, densifiant parfois leur propos pour afficher des ambitions plus épiques (« There Will Be Blood », l’un des plus violents, mais aussi le plus proche du ENTOMBED de Clandestine), ou au contraire, se bornant à ce que le style connaît de plus barbare pour nous éclater les dents (« The Ritual », assez proche de DEICIDE, en version plus mélodique s’entend), pour finalement en proposer une synthèse générique probante et complète. Avec quelques samples qui distillent une ambiance un peu glauque et digne d’une bande-originale lourde et sentencieuse à la Romero (« Screams of the Undead », et son légendaire « Quand il n’y a plus de place en enfer, les morts… » bla, bla, mais toujours efficace dans le contexte), une pincée de mid-tempi qui écrasent tout sur leur passage («The Pharao », qui s’affole brutalement comme s’il se souvenait de son retard DISMEMBER sur la pendule CARCASS), et surtout, des accointances prononcées envers la scène floridienne qui se manifestent autour de riffs précis et d’arrangements caverneux, Screams of the Undead est donc professionnel et honnête de bout en bout, et délivre ce qu’on attend de lui, sans toutefois faire preuve d’une imagination débordante.
Mais dans le marasme old-school actuel le confinant à la retape pure et simple dans la brocante des souvenirs, quelques efforts sont toujours louables et appréciables. C’est ainsi que vous pouvez accorder votre confiance aux DESOLATION, qui s’ils partagent leur patronyme avec quelques collègues lui redonnent ses lettres de noblesse, affichant une belle crédibilité, et des possibilités concrètes.
Titres de l’album :
1.Macabre Slaughter
2.Nightstalker
3.Beyond Death
4.Aokigahara (Forest of the Dead)
5.There Will Be Blood
6.The Ritual
7.Maniac
8.Screams of the Undead
9.The Pharao
10.Diabolical Resurrection
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