J’ai failli récemment m’atteler à la chronique du dernier SINISTER, et j’ai finalement jeté l’éponge. Je me suis dit, « a quoi bon donner mon opinion sur un groupe qui propose la même chose depuis ses débuts, et qui de toutes façons remportera l’adhésion de ses fans sans déclencher de changement d’opinion chez ses détracteurs ? ». La question est légitime, et se posait déjà à l’époque, lorsque les RAMONES, MOTORHEAD, CANNIBAL CORPSE, MASTER, AC/DC ou quelques autres icônes incontournables se fendaient d’inédits. En effet, quel est l’intérêt pour un chroniqueur de revenir une fois encore sur l’importance des pionniers, tout en admettant leur statisme depuis des années et leur envie de prolonger une méthode qu’ils ont eux-mêmes mise en place ? Dire que les nouvelles chansons sont comme les anciennes et qu’elles ne valent pas les classiques ? Dire que depuis longtemps, plus personne n’attend la moindre prise de risque de leur part ? Dénigrer leur immobilisme sous couvert de jeunisme ou de groupes plus fondamentaux leur ayant emboîté le pas ? En effet, la roue des interrogations personnelles tourne, comme l’horloge, et on finit par laisser la nouveauté dans sa boîte, de peur de ne rien avoir à dire. La même problématique s’est posée à propos du dernier INCANTATION, qui sont encore deux crans de légende au-dessus de SINISTER, et qui sortent leur douzième album en 2020. INCANTATION, les dépositaires du secret glauquissime du Death à tendance Doom poussé à tous ses extrêmes, et qui depuis le cryptique et massif Onward to Golgotha sont les garants d’une musique sourde, inquiétante, lourde et stressante. Alors, un nouvel album des américains est pour les fans une épiphanie évidemment, puisqu’on sait depuis longtemps que seul INCANTATION sait vraiment faire du INCANTATION. Et justement, sur ce Sect of Vile Divinities, INCANTATION continue de faire du INCANTATION, sans se poser de question, et sans changer quoi que ce soit à son optique barbare et en grand écart.
Par respect pour la foi de John McEntee, seul membre originel à la barre depuis les débuts du groupe fin 80, nul ne peut dire du mal de sa créature, d’autant qu’elle n’a jamais vraiment déçu. Elle a pu chagriner par son manque chronique d’audace, mais jamais par la qualité de sa musique. Et une fois encore, McEntee a composé des morceaux comme lui seul sait le faire, en choisissant une fois encore de se rendre aux deux frontières de l’extrême, frappant la porte de la lourdeur absolue et enjambant la clôture de la vitesse bien sale. Encore une fois produit par l’infatigable Dan Swanö, Sect of Vile Divinities possède un son bien nostalgique et sec comme un coup de trique, mais parfaitement adapté aux changements d’humeur du groupe. Avec des graves profonds mais qui ne broutent pas l’herbe des guitares, un chant méchamment en avant, et un rappel des techniques en vogue au début des années 90, le travail du gourou des consoles est une fois de plus remarquable, et permet à l’entame monstrueuse « Ritual Impurity (Seven Of The Sky Is One) » de nous rentrer dans le lard sans prendre de gants. Mais INCANTATION n’a jamais été le genre de groupe à perdre son temps en politesses inutiles et en salamalecs redondants, préférant commencer directement le massacre par l’épisode de la machette, et à ce titre, ce premier morceau est un modèle du genre, suivi par…onze autres modèles du genre. Je le répète une fois de plus, ce nouvelle album n’offre rien que Dirges of Elysium ou Profane Nexus n’offraient déjà, le mois d’août n’est pas le mois de décembre et on n’est pas à Noël, et Sect of Vile Divinities ressemble comme deux gouttes de sang à ses grands frères, n’égalant évidemment pas la méchanceté de son plus vieil aîné, ni celle de ses cadets, mais il reste une fournée tout à fait honnête de vilénie, comme en témoigne des gestes glauques et lourds comme « Ignis Fatuus », ou des aplatissements en règle comme « Entrails Of The Hag Queen », qui démontrent que les américains n’ont pas perdu leur souplesse de grand écart entre Brutal Death vraiment véloce et Doom Death vraiment atroce.
Rien d’inédit donc, si ce n’est l’accueil d’un nouveau guitariste, Luke Shively (de DISMEMBERMENT), et toujours en premier et second lieutenants Kyle Severn à la batterie et Chuck Sherwood à la basse, pour une valse sans hésitation sur les terres d’un Death Metal de tradition qui ne cache aucunement sa fascination pour le formalisme en vogue dans les années 90. D’un niveau équivalent aux deux ou trois derniers efforts du groupe, et le second pour le retour chez Relapse, Sect of Vile Divinities va bien sûr allécher les fans et peut-être en fidéliser une poignée d’autres, ceux qui tomberont au hasard de la violence sur « Black Fathom’s Fire », ou sur le monstre de lourdeur « Unborn Ambrosia » qui démontre en six minutes pourquoi INCANTATION est toujours aussi indispensable à la scène Death, au même titre que ses homologues de l’époque. Il n’y a pas à tortiller des boyaux, SUFFOCATION, INCANTATION, IMMOLATION sont des noms en on qui depuis le départ sont les leaders d’un mouvement né il y a trente ans, et les seuls à avoir la légitimité d’en perpétrer l’esprit sans avoir recours à des techniques old-school d’imitation. D’ailleurs, personne n’est capable d’imiter le quatuor de Johnstown, qui depuis plus de trente ans propose la même soupe à base de restes humains, parfois mangée glacée, parfois servie bouillante, mais toujours aussi délicieuse et préparée avec la même haine de la modération.
Pochette superbe, production ne l’étant pas moins, pléthore de morceaux qui soulignent un désir de générosité envers la fanbase, ce douzième LP se rangera facilement aux côtés des autres sur l’étagère de la passion et de la fidélité, et c’est pour ça et pour ci que finalement, il est toujours utile de chroniquer les disques d’un groupe comme INCANTATION. Un groupe qui sait rester fixé sur ses propres objectifs, et qui sait toujours ce que ses fans attendent de lui, sans risquer de perdre leur confiance en s’égarant sur les chemins hasardeux de l’expérimentation. Après tout, lorsqu’on a inventé un sous-genre, autant l’exploiter jusqu’au bout au risque de passer pour un indécrottable rétrograde. Mais on aime les rétrogrades ici. Surtout quand ils ont ce talent inné pour nous traîner dans la boue de la lie de l’humanité.
Titres de l’album:
01. Ritual Impurity (Seven Of The Sky Is One)
02. Propitiation
03. Entrails Of The Hag Queen
04. Guardians From The Primeval
05. Black Fathom’s Fire
06. Ignis Fatuus
07. Chant Of Formless Dread
08. Shadow-Blade Masters Of Tempest And Maelstrom
09. Scribes Of The Stygian
10. Unborn Ambrosia
11. Fury’s Manifesto
12. Siege Hive
C est clair du Incantation pur jus mais punaise que c est bon .J adore la pochette de kantor.
Imparable !
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11
Ils sont juste trop faux-cul pour assumer le statut de tribute band, voilà tout.
06/05/2025, 16:15