Nous en devisions hier, le Death Metal, son passé et son actif, et sa prédisposition à retourner à ses propres racines pour nous permettre de replonger la tête la première dans son marécage nauséabond autrefois visité en tour-bus par des oreilles avides de sensations mortifères. On ne va pas encore revenir une fois là-dessus, mais si, en précisant toute l’importance du legs américain en la matière, via ses représentants les plus nobles et crédibles, DEATH, OBITUARY, DEICIDE, MORBID ANGEL et toute la troupe des aficionados de la puanteur d’outre-tombe. Et comme on ne fait jamais les choses à moitié chez Metalnews.fr, ce ne sont pas moins de trois démos successives qui seront abordées, vu sous l’angle des éditions magical tapes de l’oncle suédois Blood Harvest, à l’esprit pas si revanchard que ça de voir ses cousins d’outre-Atlantique reprendre le leadership que la Suède leur conteste depuis les années 90. De Suède il est question ici, via quelques influences locales, mais le patrimoine génétique des OBSCENE est profondément ancré dans leur culture natale, puisque les références implicitement citées via leur musique efficace sont plutôt à rechercher du côté de la Floride des late eighties, OBITUARY, AUTOPSY et les premiers hurlements de Chuck « DEATH » Schuldiner en tête de liste. Beaucoup de formalisme donc, du classicisme, à outrance, mais aussi un sens aigu de la nostalgie typique qui pousse ces musiciens à se rapprocher des émanations originelles via des ambiances particulièrement délétères, et une science du riff morbide et lourd que les cadors susmentionnés ont quasiment inventé, puis perfectionné par la suite.
Première œuvre donc pour ce quintette d’Indianapolis, Indiana, pour une démo précédemment publiée à compte d’auteur en octobre de l’année dernière, et récupérée par les bons soins du label scandinave en février prochain. En édition ultra limitée, cette cassette vaut son pesant d’euros, puisqu’au-delà de sa caution vintage parfaitement assumée, elle a le mérite de proposer quatre titre bien rodés, qui loin de tourner en rond, nous offrent une boucle temporelle rejoignant dans un loop ultime l’Indiana et la Floride, et 2017 et 1988. Cinq musiciens parfaitement au fait de leur culture légitime (Roy Hayes - basse, Brandon Howe - batterie, Josh Kappel - guitare, Mike Morgan - guitare et Kyle Shaw - chant), et versés dans une interprétation très personnelle du Death le plus embourbé dans ses traumas référentiels (la mort, le temps, l’éternité, l’effondrement social, j’en passe et des plus triviaux), et réfutant tout principe d’évolution en choisissant une superbe production purement analogique qui ferait certainement merveille gravée sur vinyle. Pas question donc de singer les habitudes ultra-modernes du Death scandinave ou du Brutal Death ricain en vogue depuis quelques années, ici, tout est poussiéreux, crasseux, et aussi peu engageant qu’une vieille morgue d’Indianapolis abandonnée depuis une vingtaine d’années, et quasiment enterrée par la végétation environnante. Le trip est ultime, et plutôt bien foutu, puisqu’on s’y croirait à chaque note et à chaque dégueulis de Kyle Shaw, qui régurgite aussi bien son yaourt que l’imputrescible John Tardy sur Slowly We Rot ou Cause Of Death. D’ailleurs, l’atmosphère générale de Sermon to the Snake louche gravement sur les intonations macabres du premier album de la bande des frangins T, évoquant parfois le souffle putride de compositions étouffantes comme « ‘Til Death » ou « Slowly We Rot ».
Le tout est légèrement altéré sans être modifié par quelques influences externes, dont EDGE OF SANITY, ASPHYX, BOLT THROWER, GRAVE, DISMEMBER et IMMOLATION semblent être les principales, sans que l’on puisse valider cet état de fait par le manque de points de comparaison. Si la gravité de ton rapproche parfois indirectement les OBSCENE de la vague scandinave des années 90, c’est bien du côté des USA qu’il faut en chercher les fondements, ce que le très réussi et instinctif « Body Of Tears » prouve sans ambages de ses presque cinq minutes. Guitares en litanie, feedback sous contrôle, lourdeur appuyée mais pas forcée, et surtout, guitares intelligibles malgré leur aspect plus ou moins processionnel, encore plus renforcée par ce chant qui se pose en opposé parfait des Chris Barnes et autres grogneurs en quête de saumon frais. Certes, les accélérations médium laissent à penser que le quintette va pencher du côté ENTOMBED où il va tomber, mais le tout est emballé dans une péremption si marquée qu’on se plaît à repenser aux embaumeurs floridiens de classe A, qui n’économisaient pourtant pas leur énergie à l’époque. Le tout est très vilain sans être cauchemardesque, et surtout, éminemment musical malgré une propension à toujours rechercher le plan qui va mettre à mal. En variant les climats sans dévier de leur trajectoire, les instrumentistes assurent cohésion et diversité, ce qui permet d’apprécier ce quart d’heure pour ce qu’il est, à savoir une bonne tranche de Vintage coupée dans le filet, et saignant comme une plaie béante sur la table d’opération.
C’est bien sûr classique, autant que des titres comme « Shadow Burial » peuvent l’être, avec ce mélange d’un PESTILENCE vraiment pas optimiste et d’un OBITUARY s’endormant sur sa rubrique nécrologique, et plus volontiers tordu à l’occasion d’un lapidaire « Torture Tranquility », qui réconcilie l’IMMOLATION le moins mollasson avec le DEATH de « Mutilation », sans pour autant dénaturer l’hommage pour le faire glisser vers le plagiat. Ajoutez à ça un son de basse assez caverneux pour faire fuir les plantigrades, et une pochette superbe au trait naïf, et vous obtenez une démo tout à fait à la hauteur de son titre de « démo de la semaine », décerné par les confrères estimés de Decibel Magazine, qui se trompent rarement en faisant une confiance aveugle à leur flair auditif. Du Death Metal donc, primaire, et uniquement du Death, pour un refus absolu du métissage culturel qui ne risque toutefois pas de virer à la consanguinité de sa lucidité. Ça sent donc très mauvais, et forcément très bon, un peu comme une ballade à la Stand By Me dans les égouts de Floride à la recherche d’un vieux cadavre pourrissant loin du soleil d’Indianapolis. Tout beurk, mais plutôt chouette non ?
Titres de l'album:
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21/11/2024, 08:46
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