Deux groupes tchèques pour la même matinée ? Voilà qui n’est pas banal, et qui permet de faire plus ample connaissance avec la scène de ce pays, une scène ouverte, diversifiée, et autant portée sur l’extrême que sur la finesse. Et justement, nos amis de cette seconde moitié de demi-journée pratiquent le contraste avec un panache indéniable.
DOBYTCI MOR est une institution brutale en son pays. Une sorte de prophète de brutalité dont chaque déclaration est appréciée à sa juste valeur. Alors que le groupe semble exister depuis l’orée des années 90 (sous un autre nom), sa production discographique est beaucoup plus récente, avec pas moins de quatre albums parus entre 2011 et 2017. Largement de quoi se tailler une réputation enviable, et totalement justifiée. Car dans le créneau du Death/Grind, la parodie est facile, le classicisme timoré encore plus, et l’originalité est donc appréciable, ce que confirme ce cinquième long tardif, Shambles.
Petr Šarina (basse), Daniel Kanálik (guitare/chant) et Aleš (batterie) se proposent donc de revisiter l’extrême avec une petite touche de flair d’Europe centrale. Coincée entre l’Allemagne, l’Autriche et la Pologne, la République Tchèque possède ses propres codes, nés d’un métissage européen, qui lui permettent de se démarquer des homologues américains ou russes. C’est ainsi que Shambles se partage entre Death brutal, Death mélodique et Grind raisonnable, ce qui a le mérite d’en appeler à la sensibilité de divers publics.
Loin du faisandé qui pue, ou du stérile qui n’a que trop vécu, Shambles est une pièce aussi tendre que gouteuse, et surtout, un exercice de style à trois qui prouve que la bestialité peut être domptée sans être castrée. Quelque part entre CARCASS, AT THE GATES et le vieil OPETH, DOBYTCI MOR se montre aussi agressif que catchy, et un titre aussi accrocheur que « Mutation Genome » prouve que ces musiciens désirent un peu plus qu’un simple boucan Gore prévisible.
Ceci étant dit, le trio devait s’excuser pour son long silence. Alors que ses quatre premiers albums étaient séparés d’une ou deux années, Shambles accuse sept ans de différence avec son aîné The Famine. On sait que le temps est capricieux et que la mémoire est sélective, mais dès les premières notes de « Shambles », les die-hard sauront reconnaître leur groupe fétiche toujours aussi à l’aise dans ce Crossover bancal, mais étonnamment persuasif.
Redoutablement bien produit, émaillé de petites fantaisies rythmiques qui sont caractéristiques des audacieux, mais symptomatique de la brutalité made in Tchéquie, ce nouveau chapitre de la saga est bien agencé, bien dosé, et plus proche d’un Death mélodique sévère que d’un Death/Grind que l’on ingère (de force). Ainsi, l’instrumental « 1991 » permet d’apprécier un peu de douceur harmonique, avant que les débats ne s’emballent une nouvelle fois à la cadence diabolique de « Machinery ».
Si au départ les attentes (pour le néophyte du moins) se placent au niveau d’un Death grivois et barbare, elles changent au bout de quelques minutes pour s’adapter à un art beaucoup plus fin. Truffé de riffs catchy, de cassures précises et d’embardées en blasts millimétrés, Shambles se montre performant, et loin de la faune bigarrée des bouchers en mal de sang frais. Alors, si votre but avoué est de gigoter au son d’une régurgitation animée, autant passer votre chemin. Les tchèques n’ont pas l’intention de jouer les bouffons, et préfèrent signer et soigner de véritables hymnes de saison, comme ce lapidaire mais réfléchi « BSE ».
De vraies ambitions, des capacités irréfutables, pour un bal masqué propre et respectueux d’une certaine étiquette. Rapide mais sous contrôle, méchant mais à l’aise dans son rôle, Shambles nous réserve toutefois quelques vilaines braises, comme en témoigne le très SM « Sex Passion ». Ne vous laissez pas abuser par ces titres qui évoquent sans équivoque un Death viandard et porté sur les sévices les moins avouables. La réalité musicale en est très éloignée, même si le trio sait faire parler le démon qui est en lui lorsqu’il le faut (« Cattle Storm »).
D’ailleurs, la fin de l’album est relativement différente, avec des titres plus courts et plus concis, et donc plus à même de séduire une audience purement Death. Mais même lorsque la température monte, la précision ne fond pas, et le mélange est toujours aussi détonnant (« Psychomutilated »).
De tout pour tout le monde, tel pourrait être le leitmotiv de cette bande éminemment sympathique. Sans bousculer le top 10 des mastodontes du créneau, DOBYTCI MOR prouve qu’il reste un challenger de taille, dont le talent peut lui valoir quelques récompenses méritées. Et si d’aventure votre journée avait mal tourné, vous pouvez toujours utiliser « Machine Gun » comme l’exutoire dont vous avez besoin.
Un album solide, qui montre les crocs, mais qui ne mord jamais sans raison.
Titres de l’album :
01. Shambles
02. Bio Anarchy
03. Mutation Genome
04. 1991
05. Machinery
06. BSE
07. Sex Passion
08. Infected
09. Cattle Storm
10. Psychomutilated
11. Putrid Gravity
12. Machine Gun
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49