Dans la série, « la Colombie est notre amie », j’ai le plaisir de vous introduire aux plaisirs de la violence made in Bogota, et qui n’a rien à voir avec celle des cartels. Non, pensez plutôt à une gigantesque bourrasque Thrash digne de l’explosion sud-américaine de la fin des années 80, reprise à son compte par l’esprit et la voix de feu Chuck Schuldiner (période douloureuse The Sound of Perseverance), en duo avec Kelly Shaeffer d’ATHEIST. L’image évoque-t-elle des sons dans votre esprit tortueux et embrumé par les vapeurs d’un Halloween nébuleux ? Tant mieux, parce que là-bas, c’est la fête des morts tous les jours, et surtout celle d’un Thrash de première bourre que ce trio hargneux (Adrian Manrique: basse/chant, Mario Villamizar: guitare et Daniel González: batterie) distille depuis 2002. Entre temps, ils n’ont pas perdu le leur, puisqu’ils nous ont offert la bagatelle de trois longue-durée, dont Grito En El Abismo et Tirania furent les deux premiers. Plus tôt cette année, les esthètes de la brutalité concrète nous avaient livré leurs vues sur un tournant de carrière important, celui du troisième LP, qui se concrétisait sous la forme d’un CD, Sin Dominio Del Tiempo, disponible en dématérialisé mais aussi en CD via les bons soins des Soundtech Studios. Cet album retrouve donc une seconde jeunesse en ce mois d’octobre, puisqu’il vient d’être réédité en format tape par Morbid Skull Records, tiré à deux cents copies collector qui risquent fort d’être très bientôt épuisées. Car une fois que vous aurez posé vos oreilles sur ce jet de bile concentré, gageons que vous ne rechignerez pas sur les deniers dépensés.
Et vous aurez tout à fait raison.
Dans un style qui ne ménage pas ses efforts, les COBRA s’apparentent musicalement au reptile dont ils ont adopté le nom. Une approche furtive, qui passe par des sinuosités, et qui frappe soudainement, sans prévenir d’un quelconque sifflement. Passant allègrement du Speed bien méchant au Thrash sanglant, les colombiens nous offrent une démonstration vintage pleine de brio, qui tire même parfois vers le Speed/Thrash subtilement blackisé, grâce aux intonations sardoniques et sadiques d’Adrian, le maître de cérémonie. Loin d’être un énième brulot pour tête brulée, ce troisième effort pratique la bousculade par la nuance, et se sert des mélodies pour appuyer la violence. On pense évidemment à toute la scène d’Amérique du Sud, qui aux alentours de 86/87 s’était déchaînée pour rattraper son retard, mais aussi à son homologue US, moins bestiale, mais toute aussi fatale. Des riffs circulaires, une rythmique d’enfer, des lignes vocales délétères, pour un ballet d’outrance à la précision millimétrée qui a su garder sa spontanéité. On pense évidemment beaucoup à SEPULTURA, spécialement lorsque les BPM s’emballent (« Alfa Y Omega », au parfum Arise très prononcé), bien que des nappes de blasts nous éloignent du vintage trop convoité. On peut affirmer sans trop se tromper que les trois colombiens sont parvenus à adapter les codes de l’époque à une approche plus contemporaine, sans sonner ni opportuniste, ni trop daté. Dotés d’une production incroyablement claire et ample, les trois musiciens s’en donnent à cœur joie, et lâchent soli plein de foi, breaks de bon aloi, et accélérations véloces qui rendent leurs morceaux encore plus féroces.
La rythmique d’ailleurs, soutenant une guitare qui taille les riffs les plus aiguisés, fait clairement penser au son des WARFECT, ce qui n’est pas qu’une allusion lâchée au hasard. On peut même prendre ça pour un gros compliment, tant les deux groupes se distinguent de la masse grouillante des tâcherons en basses besognes, par leur talent inné et leur don pour instaurer des atmosphères prenantes soudainement brisées en plein élan par des accentuations intenses. En mid tempo et harmonies sur le dos, les COBRA n’en sont pas moins efficaces, et s’apparentent même à un MEGADETH du désert (« Sangre Y Honor »), mais en version Speed/Thrash amer, « Conquista La Autopista » convainc de ses thèmes accrocheurs, au point d’incarner une sorte d’alter-ego maléfique d’un ACCEPT perdu sur une autoroute colombienne, à la recherche de son Heavy, perdu dans le Power d’un ARCH ENEMY. Références, modulations, mais pas seulement. Et si l’intro tonitruante de «Unidos Para La Guerra » ne ménage si les effets sonores, ni les déflagrations d’une double grosse caisse vraiment grognon, c’est surtout « Metal Legion » qui nous plonge dans un bain d‘acide en fusion, de sa fausse allusion/allégeance à un Metal qu’on constante plutôt uberthrash, et qui parvient même par moments fugaces à évoquer la folie d’un INCUBUS plutôt tenace. Vous le constatez, l’intensité est variée, mais toujours gardée à bonne hauteur pour ne jamais sombrer dans la mièvrerie ou le prévisible routinier.
Pourtant, le title-track ne peut éviter la piste assez empruntée de MEGADETH/TESTAMENT, pour quelques harmonies bien caressées, soudainement déchiquetées par une accélération en pleine montée, qui nous laisse le souffle coupé. Retour en mid inopiné, pour une énième embardée, la stabilité n’est donc pas de mise, sans pour autant se montrer trop versatile pour être convaincant. Les COBRA le sont, assurément, mais démontrent aussi un potentiel technique assez engageant. Chacun dans son domaine connaît parfaitement son boulot, et sans en faire trop, place toujours la bonne intervention au bon moment. Et lorsque les trois compères décident de se la jouer Heavy/Thrash à forts relents Speed, ils se montrent diablement conquérants, comme en témoigne le final soufflant « De Cara Al Fin », qui donne au passage quelques leçons à Schmier et sa bande, perdus dans une nostalgie qui n’en est plus que de nom depuis fort longtemps.
Dans les faits, et une fois toutes les preuves accumulées, Sin Dominio Del Tiempo est beaucoup plus qu’un simple album revival à rajouter à la longue liste dressée. C’est un véritable manifeste de violence musicale intelligente, qui utilise toutes les armes à sa disposition pour s’assurer de notre soumission, et qui serpente entre Heavy, Speed et Thrash avec envie, déclenchant une véritable euphorie chez les fans du genre. En jouant juste et précis, les colombiens justifient leur solide réputation, et laissent augurer d’une boucherie live qui ne fera aucun prisonnier. On ne se méfie jamais assez d’un COBRA esseulé. Il parait sympa comme ça, derrière ses pierres, mais lorsqu’il surgit les crocs en avant et la queue se secouant, il est encore plus dangereux qu’une meute de loups errants. Alors méfiez-vous de sa morsure. Elle laisse les chairs nécrosées et vous colle au tapis pour de bon, seul, dans un Bogota qui aura sans doute autre chose à faire que de vous sauver.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09