Sortir un premier album de plus de soixante-dix minutes, et l’entamer par un instrumental de trois minutes est sacrement culotté. Spécialement lorsqu’on évolue dans les sphères Thrash, assez peu réputées pour héberger les accros à la longueur. Alors, la quantité certes, mais quid de la qualité ? En demi-teinte pour le moins, mais avec un désir en filigrane qu’on déchiffre sans peine : ne sonner comme nul autre, et jouer ses propres cartes crânement, comme un joueur de poker musical professionnel.
PHANTOM KILLING, originaire de Winnipeg, est né en 2021, et a rapidement publié un premier EP l’année suivante. Quatuor d’allumés de la violence biaisée (Michael Beaumont - guitare/chant, Ryan - guitare, Blaise Van Humbeck - basse et Tiago Resko - batterie, soit cinquante pour cent de la formation d’origine), cet orchestre ne fait rien comme tout le monde, et se balade dans les arcanes de la brutalité maîtrisée des années 80, en piochant au hasard des rencontres les ingrédients de sa propre révolte.
Et après le sans-chant « Untold Stories », c’est le traquenard « The Resurgence Of Revenge » qui nous cueille à froid, entre la démo travaillée, le bordel d’iconoclastes incapables de ranger leur chambre, et l’amateurisme tirant sur le professionnalisme gauche. Tout ici sonne étrange, daté, comme un disque inédit né dans les années 70, et proposant un Proto-Thrash que tout le monde a ignoré en temps et en heure. Approche étrange et collages ludiques, pour une optique qui rappelle les séances expérimentales japonaises des années 80, lorsque le théâtre et la musique se percutaient de plein fouet. Et dans un costume de BLIND ILLUSION/KUBLAI KHAN plus vrai que nature, PHANTOM KILLING domine la scène, et se laisse aller à des improvisations intéressantes.
Entre DOOM, OUTRAGE, JURASSIC JADE et quelques autres, le quatuor canadien propose une alternative très rafraichissante à la nostalgie ambiante, et refuse les facilités d’un mimétisme de cadors qui n’ont plus aucune leçon à donner depuis des années. Ce Metal qui tient du marasme créatif bouscule les conventions, et ressemble à une coulée de lave avalant tout sur son passage. J’en tiens pour preuve l’énorme et bouillonnant « Clown Fatality’s », qui mixe tant de plans qu’on a du mal à se souvenir du plus important. Et si la musique se veut étrange et hypnotique, le chant roublard agit comme un stimulus d’agacement très crédible et irritant. Mais le pire, c’est qu’on aime ça.
Enfin la plupart du temps.
Oui, on aime être chamboulé, tourneboulé, par autre chose qu’une resucée d’idées made in eighties. La vague rétrograde n’a de cesse de nous prendre pour des imbéciles avec ses formules toutes faites et ses morceaux qu’on connaît déjà par cœur, il est donc plaisant de tomber sur des musiciens qui se creusent un peu la tête pour proposer quelque chose de différent, aussi maladroit et expérimental soit-il.
Concentrés sur un instrumental un peu gauche et mal agencé, les PHANTOM KILLING nous présentent un visage grimaçant, aux traits tirés, mais aux expressions grotesques. On imagine bien les rictus au moment de l’enregistrement de « Mosh City », qui ne moshe pas vraiment et qui a même tendance à fricoter avec le Death autrichien.
Evidemment, en plus d’une heure et dix minutes, la recette attient ses limites en plus d’une occasion. Il est difficile - voire impossible - de maintenir la cadence d’originalité sur une telle durée, et les pistes finissent par se mélanger, entre Thrash Punk et Metal/Hardcore foutraque et improbable. Evitant les accélérations pour rester sur un terrain mid-tempo ou up-tempo, PHANTOM KILLING finit par frustrer, tant on aimerait voir les débats s’enflammer. Certes, l’ambiance est surchauffée dans une cave poussiéreuse, les convives sont aussi barges que les hôtes, mais si « Creature » fleure bon le Progressif maboule, il n’en patauge pas moins dans la semoule de la redite.
Parce que les gaillards n’hésitent pas à défier la montre pour titiller les sept, huit, ou neuf minutes de jeu. C’est assez habile dans le fond, mais moins convaincant dans la forme, d’autant que le son très grésillant de l’album finit par avoir raison de nos tympans. Ainsi, le biscornu « Self-Gallantry » nous assène sept minutes de Heavy Metal braillard et trivial, quelque part entre technique prononcée et déviances aggravées.
Mais tout ça n’est pas grand-chose comparé à « Sea Shepherd », pavé de neuf minutes qui pousse encore plus loin la provocation, autour d’une basse ronde et libre et d’un festival de guitares complètement ivres. Avec un peu d’imagination, on se dit que les progressions ont été composées au fur et à mesure, et improvisées pour le plaisir du geste. Cette sensation est sympathique, mais l’album s’autorise trop de longueurs pour vraiment s’imposer et marquer les esprits.
Amputé d’une bonne vingtaine de minutes, j’aurais parlé de révélation, d’une troupe bigarrée affranchie de toute contrainte, et libérant le Punk qui est en nous. En l’état, je reste plus que dubitatif sur la réelle portée d’un disque qui certes, sonne original, mais qui reste assez répétitif dans ses réflexes.
Toujours est-il que si vous désirez vous éloigner des photocopies colorisées de la génération Rétro-Thrash sacrifiée, ce disque reste un exutoire à une production aussi prévisible que les conséquences d’une marée noire.
Titres de l’album:
01. Untold Stories
02. The Resurgence Of Revenge
03. Clown Fatality’s
04. Alien Invasion!
05. Mosh City
06. Burn The Witch!
07. Creature
08. Dawn of the Heroes
09. Self-Gallantry (feat. Travis Nolette)
10. Human Candles
11. Sea Shepherd (feat. Marty Chatrin)
12. Masquerading Bands
13. Murder Monopoly
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