Ils sont trois. L’un est blond aux cheveux longs, l’autre est châtain avec la barbe, et le troisième est quasiment chauve avec la moustache. Toute ressemblance avec des musiciens existants serait évidemment tout à fait fortuite. Et pourtant, ces trois-là ont des points communs, beaucoup, avec certains groupes, beaucoup. Et sont présentés par la presse, spécialement celle de chez eux, comme les sauveurs d’un Rock qui part en couille, les poils à la dérive. On nous a souvent fait le coup du trio de superhéros sans cape promis à une destinée hors du commun, mais d’ordinaire, ce sont plutôt les anglais qui nous la jouent chauvins. Les Américains, sûrs de leur suprématie, sont plus humbles dans la fierté, alors autant dire qu’il y a quand même anguille sous roche du côté de Pensacola en Floride. Et si ces trois olibrius incapables de faire la différence entre la Pop des BLUR et la rage des ALICE IN CHAINS étaient vraiment aptes à nous extirper du marasme dans lequel le Rock si complaisant nous plonge depuis quelques années ? Parce qu’ils refusent les étiquettes en plus, le Grunge, l’Alternatif, pas pour eux, ça, trop restrictif. Et vous savez quoi ? Ils ont raison, parce qu’ils sont beaucoup plus que ça. Ils sont le trait d’union entre le Grunge des 90’s, le Suburban Rock des 2000’s, et la Pop des 60’s, prise d’un coup de folie moderne sans abimer le brushing de mélodies sur la tête. On connaissait l’amour de Kurt Cobain pour les harmonies, les BEATLES et toute la folie mobtop qui allait avec, il va maintenant falloir faire avec celle plus plurielle des NOISEHEADS pour le patrimoine culturel de ces quarante dernières années.
En substance, il y a tout sur ce Sitcoms for Aliens pour vous satisfaire. De cette pochette absolument affreuse qui ressemble au collage du petit Jean-René, six ans et élève de CM1, à l’ambiance délétère d’une décennie qui transformait les désillusions et l’ennui de la génération X en créativité nonchalante ou explosive, les harmonies de Peter, Paul & Mary (une autre obsession de Kurt C.), jusqu’à ce titre qui nous propose un soap de l’espace, transformant Roswell en terrain de jeu pour scénaristes nostalgiques d’Alf et du Muppet Show. Mais ça tombe bien, parce que les NOISEHEADS sont un show, mais n’ont rien de marionnettes, puisqu’ils tirent leurs ficelles eux-mêmes. Du mal à piger le truc. Ecoutez pour voir, ça va mieux. Bien sûr, 1994 paru en 2013 défrichait pas mal de terrain, mais selon ses auteurs, il était encore un peu trop impudique, et trop nu pour accepter de s’afficher avec les oripeaux d’un spectacle pas encore très bien rodé. Leur second effort éponyme lui était trop fardé, et trop embourgeoisé dans ses habitudes qui restaient à définir. Alors finalement, cette série pour extraterrestres est le script qui leur convient le mieux, à cheval (de Troie) entre les deux. Et par extension, pour un second LP, il passe admirablement bien la rampe et confirme tout le bien que les médias pensent de cette assemblée d’iconoclastes hors du temps et des modes. La seule mode à laquelle ils consentent à adhérer, c’est celle de la liberté de ton qui propose de briser la boucle temporelle réunissant les époques, et condamnant les musiciens à tourner en rond dans le labyrinthe de leurs idées. Et des idées ici, il y en a plein, du talent aussi, de la gouaille, des mélodies, des riffs qu’on retient, et un sacré paquet d’influences. Qu’ils nomment eux-mêmes. SOUNDGARDEN, NIRVANA, PEARL JAM, TOADIES, HAMMERBOX, RAGE AGAINST THE MACHINE, NIN, GIN BLOSSOMS, CRASH TEST DUMMIES, BEATLES. Auxquelles vous pouvez éventuellement rajouter les STONE TEMPLE PILOT, les STONE ROSES, GLASSJAW, SPIN DOCTORS, SMASHING PUMPKINS enfin bref, la crème de la crème des réfuteurs de théories trop figées, et trop difficiles pour faire la fine bouche entre musique populaire et élitisme culturel. Et pourtant, tout ça sent la sincérité populiste des faubourgs à plein nez, lorsqu’un après-midi d’ennui débouche sur une première répétition dans le garage des parents (celui du barbu, plus complaisants envers les velléités artistiques de leur bambin), et de fil en aiguille, le premier show au bal de l’école, vite ruiné par un punch un peu trop corsé. Sales brats va.
Et là, finalement, vous comprenez que je n’ai pas dévoilé grand-chose de ce nouvel album qui risque en effet de casser la baraque pour peu que ces trois-là dénichent un contrat idoine. Et c’est à dessein, parce que je n’ai pas envie de trop en dire et vous gâcher la surprise d’une des musiques les plus vivantes de ces cinq ou six dernières années. Allez, je vous avoue qu’en tant qu’entame, « Wait. » est certainement le hit que Billy Corgan n’a jamais pu composer avec Courtney Love parce que le premier est trop fier et imbu de lui-même et la seconde trop concernée par sa prochaine opération de chirurgie propice à lui donner un air encore plus…alien. Je peux aussi vous confier que « I Bleed » est une jolie transposition de l’univers des NO FX dans le monde en vase clos des SONIC YOUTH. Avec en plus un refrain nasillard sous hélium qui vous contamine un été comme un amour adolescent pas consommé. Et qui laisse avec une impression bizarre de nervosité. Et que « Enter Starship » arrive comme un cheveu STONE TEMPLE PILOT sur la soupe BLUR, histoire d’adoucir de Pop le relevé bien salé d’une épaisseur psychédélique Grunge. Un peu comme si les AFGHAN WHIGS enlevaient leur perruque pour embrasser la culture Junk revival des années 2000, acceptant les refrains des MONKEES comme seule alternative à la vacuité ambiante. Que « Homecoming » célèbre le retour de fac en weekend d’un étudiant ayant un peu trop abusé du Blues N’Gum des ENUFF Z’NUFF entre deux devoirs de littérature anglaise bâclés pour cause de fête à ne pas manquer. Que « ‘72 » est le plus bel hommage à 1991 qui puisse exister. Que les accents OASIS de « Ballad Of Me, Myself, and I » nous réconcilie avec la vague Néo-Pop rétro de la même décennie, sans nous obliger à serrer la main à Noel et Liam, nous permettant ainsi de nous replonger l’espace d’un clin d’œil dans le sublime Purple des STONE TEMPLE PILOT. Chant goguenard mais réellement investi, basse en circonvolutions, et refrain qui pétille de distorsion comme un Dr Pepper bien frais qui gicle sur le gazon bien vert. La Floride, patrie de la joie et de l’harmonie ? Dit comme ça, ça sonne comme un slogan immobilier, et pourtant, c’est la vérité. Surprenant, pour le moins.
Mais le moins, c’est le plus de ce trio qui joue à la fausse économie pour truffer ses chansons d’arrangements instrumentaux plus intelligents que la moyenne. Un trio qui n’a pas oublié les BREEDERS, ni SUM 41 (« Who ? »), qui défie l’intimisme sur le terrain de Liz Phair (« Friend »), qui bride l’électricité d’une pudeur Pop presque énamourée (« Still Alive »), et qui finit acoustico-intime comme aux plus grandes heures de NIRVANA, sans pour autant se réclamer d’un « Something In The Way », dont il emprunte pourtant tout le « Farewell and Goodnight » que Corgan et Iha avait subtilement dérobé en pensant au « Good Night » de Ringo. Et puis tout s’arrête, comme une nuit que le réveil achève d’une réalité qu’on n’a pas forcément envie de confronter à ses rêves colorés…Next Big Thing ? Je pense que les NOISEHEADS sont déjà énormes, mais que peu de gens sont vraiment au courant. Alors, le rôle de Sitcoms for Aliens sera de dégager ces putains de branleurs de leur télé, et de leur arracher leur smartphone à la volée. Pour leur faire comprendre que les 90’s, sous couvert d’une indifférence de surface, incarnaient sans doute la décade la plus passionnée de « vrai », digérant la débâcle d’eighties qui avaient placé l’arrogance au-dessus de l’honnêteté. Ils sont trois. L’un est blond aux cheveux longs, l’autre est châtain avec la barbe, et le troisième est quasiment chauve avec la moustache. Toute ressemblance avec des musiciens existants serait évidemment tout à fait fortuite. Parce que ces mecs-là ne ressemblent à personne.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09